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Cartulaires des commanderies Templières

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    Cartulaire de la commanderie de Douzens

    1. — Description des cartulaires A

    Le cartulaire A, conservé aux Archives départementales de la Haute-Garonne sous la cote H Malte nº 2856 provisoirement, se compose actuellement de 149 feuillets ou fragments de feuillets de parchemin, dont 120 couverts par le texte, mesurant 238/255 sur 160/177 millimètres. La foliation de 1 à 149, à l'encre noire, est l'oeuvre de Jean-Baptiste Belhomme, archiviste de la Haute-Garonne au milieu du XIXe siècle (1). Les actes ont été numérotés au crayon par Adolphe Baudouin, son successeur, qui en marge a indiqué les dates des 37 premiers, en même temps qu'il inscrivait la mention Cartulaire A. Douzens au recto des folios 1 et 139.
    Le cartulaire comptait à l'origine 152 feuillets (2) groupés en 19 cahiers (3); trois d'entre eux ont disparu. On repère encore des signatures (c, d, e, f, g, puis a, b, c, d) sur les cahiers III à VII et XII à XVI. Les cahiers VIII et XI ne sont composés que de feuillets blancs.
    Le manuscrit est loin de nous être parvenu intact. L'humidité a laissé de nombreuses traces sur ses feuillets. Des rongeurs se sont attaqués à leurs bords, notamment du folio 1 au folio 39 et du folio 56 au folio 86. Le premier feuillet du premier cahier manque: il n'en reste plus qu'un étroit talon, où se voit encore l'extrémité du bras gauche de la croix du « chrismon » qui précédait l'acte nº 1. Le dernier feuillet du septième cahier a sans doute été détaché à la pointe sèche. Mais c'est le dernier cahier qui a le plus souffert: les folios 143 et 144 sont détachés, du folio 146 il ne reste plus qu'un talon équivalent au tiers de sa surface primitive; le folio 148 est coupé en deux, troué et froissé; le folio 149, troué lui aussi, a perdu sa partie gauche; quant au dernier feuillet, il n'existe plus.
    Ce qui reste de la reliure permet de penser qu'elle est contemporaine du manuscrit. Les cahiers ont été cousus sur quatre nerfs d'un bout à l'autre avec la même aiguillée de cordonnet. Les tranchefiles ont été exécutées en même temps que la couture. Les deux nerfs du centre, doubles, ont été renforcés par des buffles qui retenaient des ais de bois aujourd'hui disparus. Ce sont là les marques d'une technique courante aux XIe et XIIe siècles et progressivement abandonnée à partir du XIIIe (4).
    Au total, le cartulaire renferme 207 documents, datés du 24 avril 1110 au 3 janvier 1183, copiés les uns à la suite des autres, sans titre ni rubrique. Les initiales ont été inscrites à l'encre noire, empiétant légèrement sur la marge, et se développant sur une hauteur de deux à six interlignes.
    Les actes sont ainsi distribués chronologiquement:

    Antérieurs à 1120 : 2;
    De 1131 à 1140: 33;
    De 1141 à 1150: 50;
    De 1151 à 1160: 55;
    De 1161 à 1170: 56;
    De 1171 à 1180: 7;
    De 1181 à 1183: 4.


    L'ensemble comprend cinq parties d'importance inégale: la première, qui s'étend du folio 1 au folio 54 vº, nous a transmis 86 actes (nos 1 à 86), concernant les biens acquis par le Temple principalement à Douzens, à Capendu, à Laure et à Peyriac; le premier document, aujourd'hui incomplet, était précédé d'un « chrismonchrismon » en forme de croix latine cantonnée de deux points et des lettres a et w.
    Le chrismon est en principe le monogramme d'origine paléochrétienne (en Grec « christoramma ») formé de la combinaison des lettre X et P, symbolisant le nom du Christ et pouvant se combiner avec d'autres éléments (croix, alpha et omega, voire un X qui lui donne ainsi la valeur PAX).
    Plus généralement, on désigne aussi su nom de « chrismon » les invocations figurées du haut Moyen âge, plus ou moins grossièrement cruciformes et pourvues de signes tironiens (notamment Amen) ou d'ornements divers, qui, en tête des actes, précèdent l'invocation verbale ou en tiennent lieu, ou encore qui accompagnent les souscriptions.
    La deuxième partie occupe les folios 63 à 78 vº, et se compose de 28 actes (nº 87 à 114) relatifs à la maison de Saint-Jean-de-Carrière; en tête du document initial figure un « chrismon » en forme de croix latine.
    La troisième partie, composée des folios 87 à 126 vº, comporte 57 actes (nº 115 à 171) intéressant les biens de l'Ordre à Brucafel, à Carcassonne et à Villalier; il n'y a pas de « chrismon » au début du premier acte, mais celui-ci s'ouvre sur l'initiale I occupant six interlignes.
    La quatrième partie (fol. 127 à 142 vº) est consacrée au domaine de Gaure: en tout 27 actes (nº 172 à 198), dont le premier est précédé du « chrismon » en forme de croix latine cantonnée de quatre points.
    La cinquième et dernière partie (fol. 143 à 149 vº) groupe 9 actes (nº 199 à 207) relatifs aux possessions des Templiers dans la haute vallée de l'Aude (5); le premier document est également précédé d'un « chrismon » semblable.


    2. — Description des cartulaires B. Top

    Transmis sous la cote H. Malte nº 2855 provisoirement, le cartulaire B comporte dans son état actuel 92 feuillets de parchemins numérotés de 2 à 93, mesurant 154/162 sur 98/105 millimètres. La foliotation à l'encre noire paraît remonter au XVIIe siècle; la numérotation des actes, au crayon, a été faite par Adolphe Baudouin. L'ensemble des transcriptions occupe 90 feuillets (6): dans un cadre délimité à droite et à gauche par un trait vertical, le texte est écrit à raison de 18 lignes au feuillet. Les réglures ont été tracées à la pointe sèche, après indication de leur écartement par des coups de poinçon dont les marques sont encore visibles.
    Comme le précédent, ce cartulaire a beaucoup souffert de l'humidité, qui a fait pâlir, voire disparaître, certaines parties du texte. Il s'y ajoute quelques mutilations: du premier feuillet, il ne reste plus qu'un étroit talon où se voit encore la moitié gauche de l'initiale I de l'acte nº 1; le folio 34 est isolé par suite de la découpure de celui avec lequel il faisait corps.
    En son état primitif, le manuscrit se composait de 94 feuillets répartis en 13 cahiers (7) dont la reliure, préparée selon les mêmes procédés que pour le cartulaire A, est restée inachevée.
    Ce recueil nous a transmis 88 actes (8) qui — à l'exception d'un seul, passé aux environs de 1070 (nº 82) — s'échelonnent entre le 18 mars 1136 et le 8 novembre 1182, et dont la répartition chronologique est la suivante:

    Vers 1070: 1;
    De 1136 à 1139: 3;
    De 1142 à 1148: 7;
    De 1154 à 1160: 8;
    De 1161 à 1170: 42;
    De 1171 à 1180: 22;
    De 1181 à 1182: 5.

    L'ensemble du cartulaire est consacré aux biens de la commanderie des Cours. On y distingue quatre parties:
    La première (fol. 2 à 34, nº 1 à 30) concerne les Cours et le terroir du Layrou ;
    La deuxième (fol. 36 à 75 vº, nº 31 à 74) porte sur les domaines des Mirailles, de Molières et de Valséguier ;
    La troisième (fol. 76 à 83, nº 75 à 81) intéresse les possessions de Peyremale ; enfin la quatrième partie (fol. 84 à 92, nº 82 à 88) est relative à Licairac (Sainte-Foy).



    3. — élaboration des cartulaires A. Top

    L'écriture du principal compilateur des cartulaires A et B peut être identifié avec celle de Guilhem de « Palacio » , dont on possède 21 actes originaux s'échelonnant entre le 15 février 1172 et le 27 novembre 1199 (9). Cette écriture, légèrement inclinée vers la droite dans les premiers actes, l'est tantôt vers la droite et tantôt vers la gauche aux environs de 1182; après quoi elle est presque uniquement penchée vers la gauche (10). Cette évolution graphique se manifeste également dans le traitement des sommets des hastes, en queue d'aronde de plus en plus nettement dessinée. La tendance au gothicisme s'accentue, à mesure que la cursivité fait des progrès. La longueur de la carrière connue de Guilhem de « Palacio » (une trentaine d'années) permet de comprendre cette évolution. Son écriture, assez serrée, porte tout d'abord la marque du XIIe siècle, puis subit l'influence des formes annonciatrices de la cursive gothique du XIIIe siècle; à la fin, l'écriture du vieillard se fragmente, le module grossit, l'inclinaison devient irrégulière (11).
    La personnalité de Guilhem de « Palacio » se manifeste par l'utilisation de « compendia » qui lui sont propres, tels le « si » au lieu du « sci » normal pour « sancti » , Elle transparaît plus encore dans l'emploi de la contraction « affrâ » , « afrâ » (affronta, afronta) dans les formules d'énumération des confronts. Dans ses actes les plus anciens, il se sert presque exclusivement de l'abréviation « cici » (circi) évoluant en « ci cio » ou « c cio » (circio ou cercio), voire « c ci » (cerci) dans les documents qu'il rédige à partir de 1175.
    On doit à Guilhem de « Palacio » la totalité du cartulaire A (12), à l'exception des folios 13 vº, 14, et la majeure partie du cartulaire B (fol. 52 vº à 92). Les différences d'écriture qui, à première vue, feraient croire à l'existence d'au moins deux copistes, ne sont en fait que les étapes de l'évolution graphique retracée plus haut.
    Dans une première étape, Guilhem de Palacio transcrit 192 actes et demi du cartulaire A, dont le plus récent est du 4 mars 1171, et 11 actes du cartulaire B (nº 49 à 59) ne dépassant pas la date du 10 septembre 1170 ; à cette série, il joint deux actes du cartulaire A (nº 113 et 114), dont le second est daté du 12 mars 1172. Son écriture, légèrement inclinée vers la droite, la fréquence de la contraction « affrâ » , « afrâ » , se retrouvent dans les plus anciens originaux de sa main. Entre 1172 et 1175 s'opèrent les mutations signalées plus haut dans les abréviations.
    Dans une seconde étape, Guilhem de Palacio copie 36 actes: 11 du cartulaire A (nos 161 à 171), dont aucun n'est postérieur au 3 janvier 1183, et 25 du cartulaire B (nos 29-30 et 60 à 88) s'achevant le 8 novembre 1182. Son écriture se modifie, présente les caractères indiqués plus haut; cependant sa personnalité reste marquée, entre autres, par l'usage de l'abréviation affrâ, afrâ.
    Peu avant Guilhem de Palacio, un scribe anonyme a copié 46 actes du cartulaire B, portant les nos 1 à 28 (fol. 2 à 32) et 31 à 48 (fol. 36 à 52), et dont les plus récents sont datés de 1169. Il se distingue de son confrère par l'usage très fréquent de la contraction « affrt » , « afrt » (affrontât, afrontat), quelquefois traitée sous la forme « affrat » . Il se sert aussi le plus souvent de la suspension « cire » ou « cerc » pour représenter le mot « cercio » , qu'il transcrit intégralement à l'occasion. Son écriture, régulière et de petit module, traduit une tendance à l'inclinaison vers la droite. L'encre a pris partout une teinte brun-roux.
    L'intervention d'un troisième copiste est tout à fait accidentelle: ayant dû remplacer quelques instants Guilhem de Palacio, il a transcrit dans le cartulaire A la fin de l'acte nº 10 et la totalité du nº 11 (fol. 13 vº— 14). Son écriture, légèrement inclinée vers la gauche, est caractérisée par l'emploi du « e » cédille, archaïsme qu'on ne retrouve pas chez ses deux confrères.


    4. — élaboration des cartulaires B. Top

    Nous parvenons donc aux conclusions suivantes: semble avoir été entreprise au plus tôt dans le courant de 1171: l'essentiel de la documentation était alors constitué. Le nombre des actes postérieurs à cette date est assez faible par rapport à l'ensemble conservé dans les deux manuscrits.
    2. La transcription s'est effectuée en deux phases distantes de plusieurs années. Jusque vers 1175, un compilateur que nous avons identifié avec le scribe Guilhem de Palacio a rédigé la presque totalité du cartulaire A et 11 actes du cartulaire B, pour lequel il prenait la suite d'un copiste anonyme. A partir de 1183, le même Guilhem de Palacio achève son oeuvre, ajoutant 11 actes au cartulaire A et 25 au cartulaire B (13).
    Travaillant d'après les originaux, Guilhem de Palacio les a groupés en dossiers concernant les divers domaines du Temple de Douzens, avant de les transcrire dans le cartulaire A. S'il a suivi l'ordre topographique, rapprochant dans la mesure du possible les actes consacrés à un même terroir (14) il ne s'est aucunement préoccupé de l'ordre chronologique: dans chaque partie, il s'est contenté de faire figurer en tête les titres qui avaient mis le Temple en possession du domaine. Ces remarques sont aussi valables pour le cartulaire B (15), dont Guilhem de Palacio n'a pourtant rédigé qu'une partie.
    Dès le début du XIIIe siècle, le cartulaire A a été annoté par une main anonyme, à laquelle nous devons cinq mentions réparties entre les dossiers de Saint-Jean de Carrière et de Brucafel. Plus tard, sans doute dans le premier tiers du XIVe siècle, une nouvelle main a analysé en marge plusieurs actes du dossier de Douzens. Enfin, en plus de quelques notes du XVe siècle, il faut signaler plusieurs inscriptions de la fin du XVIe siècle ou du début du XVIIe. Quant au cartulaire B, il n'a été annoté qu'au XVIIe siècle par une main qui a rédigé de sommaires analyses en tête de chaque acte.


    5. — Le cartulaire C. Top

    Le cartulaire C, coté H Malte nº 2857 provisoirement, est composé de 11 feuillets de parchemin (16), non compris les feuillets de couverture, mesurant 247/260 sur 152/162 millimètres. La foliotation de 1 à 11, tracée au crayon, est de la main d'Adolphe Baudouin, de même que la numérotation des actes et la mention Cartulaire C. Douzens portée au recto et au verso du feuillet initial de couverture. L'aspect général est soigné. Délimité à gauche et à droite par deux traits parallèles verticaux espacés de 5/7 millimètres, le texte est écrit à raison de 23 lignes au feuillet. Les réglures, dont l'écartement est indiqué par des coups de poinçon, ont été tracées à la pointe sèche.
    Ce manuscrit n'a pas tout à fait échappé aux injures du temps. Des traces d'humidité y sont visibles. Le feuillet initial de couverture est déchiré, troué et taché en divers endroits.
    Dans son état actuel, le cartulaire comprend 11 documents, séparés par un double interligne, sans titre ni rubrique. Les initiales sont rubriquées, à l'exception de la dernière (fol. 10 vº) qui est noire: de facture soignée, elles s'inscrivent entre les deux traits verticaux de la bordure du texte sur une hauteur de deux à six interlignes. L'ensemble des actes est rédigé d'une seule main, en minuscule de la seconde moitié du XIIe siècle, légèrement penchée vers la droite. L'auteur anonyme de la compilation se caractérise par l'emploi systématique du double accent au-dessus du groupe « ii » , ainsi que par le fréquent usage du « e » cédille. Son oeuvre apparaît ainsi vraisemblablement comme la première de la série.
    On ne peut manquer d'être frappé par le souci d'unité qui a présidé à la compilation du cartulaire. Tous les actes se rapportent aux acquisitions réalisées de novembre 1129 à avril 1134 au plus tard par frère Hugues Rigaud, maître de la province de Provence et d'Espagne, presque uniquement à la suite de dons. Le compilateur les a classés dans l'ordre géographique, donnant la priorité aux documents audois: un premier groupe (nº 1 à 4) intéresse les possessions de Peyriac, de Blomac et de Douzens; puis ce sont deux actes (nº 5 et 6) relatifs aux biens de Pomas et de Pauligne; les documents suivants (nº 7 et 8) concernent, l'un Névian (Aude), l'autre Avalon (Isère); le quatrième groupe (nº 9 et 10) vise les biens acquis au Puy; le dernier acte enfin (nº 11) ne mentionne aucun nom de lieu, mais peut être rattaché au nº 7.
    On voit qu'il ne s'agit pas vraiment d'un cartulaire de Douzens. Plus vraisemblablement, la compilation a été faite à la demande de frère Hugues Rigaud, qui avait reçu toutes les donations. Nous n'avons cependant pas voulu le dissocier dans la publication des cartulaires A et B.
    Quelques annotations ont été portées aux XVIe et XVIIe siècles dans les marges de ce cartulaire que, respectant la classification de Baudouin, nous publierons sous le titre de cartulaire C.


    6. — Histoire des cartulaires A. B et C. Top

    Mis sous scellés en 1793, le fonds de l'ordre de Malte (qui avait recueilli les archives des Hospitaliers, administrateurs de la commanderie de Douzens depuis 1313) ne fut transféré que vingt ans plus tard aux archives de la Haute-Garonne. De successifs déménagements, des anciennes archives du diocèse au second étage de la préfecture, puis, au milieu du XIXe siècle, dans la chapelle du ci-devant archevêché, annexe de l'hôtel préfectoral, brisèrent son ordonnance et y provoquèrent des pertes irréparables.
    Conformément à la circulaire du ministre de l'Intérieur du 31 mai 1842, les cartulaires A et B furent reconnus, identifiés et analysés par l'archiviste Jean-Baptiste Belhomme: les résultats de ce travail étaient consignés dans le Catalogue général des cartulaires des archives départementales, publié par la commission des archives départementales et communales (Paris, 1847).
    Mais il ne fut pas question du cartulaire C avant le dernier quart du XIXe siècle. Il fut d'abord utilisé par Antoine du Bourg, qui en publia partiellement l'acte nº 2 dans son Histoire du Grand Prieuré de Toulouse... (Toulouse, 1883). En 1891, Adolphe Baudouin le répertoriait, ainsi que plusieurs articles non encore classés du fonds de Malte. Les trois cartulaires furent alors déposés dans un carton avec ceux de la Selve, de Montsaunès, de Vaour et de Villemartin.
    Une nouvelle étape de leur histoire s'ouvrit en 1902, quand le marquis d'Albon, préparant l'édition de tous les documents relatifs aux Templiers, chargea un ancien élève de l'école des Chartes, nommé Joseph Gardère, de les transcrire avec d'autres pièces. Le travail de copie fut mené à terme en deux ans, mais la publication ne devait avoir lieu qu'après la mort de son initiateur.
    A peine connus des historiens, les manuscrits leur devinrent inaccessibles. Remis en place sous des cotes erronées, ils ne furent pas catalogués par Félix Pasquier dans son répertoire manuscrit des registres domaniaux de l'Ordre de Malte, achevé à la fin de 1921. Ils étaient considérés comme perdus lorsqu'on 1946, M. Benjamin Faucher, archiviste de la Haute-Garonne, les retrouva à la faveur d'une révision générale des registres du fonds de Malte; ils portent depuis lors les cotes indiquées plus haut.
    A la suite de ces trois cartulaires, il nous a paru utile de publier 26 actes isolés, conservés dans les layettes du fonds de Douzens. Il est en général possible d'expliquer que, bien que concernant les biens de cette commanderie, ils n'aient pas été recopiés:
    1. Certains sont relatifs à des biens acquis ultérieurement par le Temple, sans qu'il y soit fait mention de celui-ci (nº 1, 5, 6, 8, 9, 16, 24). La milice n'apparaît qu'accessoirement dans les actes nº 7 (comme seigneur d'un bien vendu) et 10 (dans une clause d'un testament). Tous ces actes constituent cependant un complément naturel à la documentation fournie par les cartulaires.
    2. D'autres, à partir du nº 11, sont postérieurs à 1169, et il est certain que, particulièrement pour le cartulaire A, le travail de transcription a été mené avec beaucoup moins de rigueur pour ces actes tardifs. Nous nous sommes arrêtés nous-mêmes à l'année 1179 comprise, les actes postérieurs à celle-ci étant exceptionnels dans les cartulaires.

    On ne peut, en revanche, attribuer qu'à la négligence ou au désordre le fait que les actes nos 2, 3 et 4 n'y aient pas été transcrits.
    Pour faciliter le classement d'ensemble, ces 26 actes ont été numérotés dans l'ordre chronologique, sous la lettre D.


    7. — La datation des actes. Top

    La datation des actes est faite en années de l'Incarnation, indiquées par les formules « anno Incarnationis dominice » , ou « anno ab Incarnations Domini » , ou encore « anno divini incarnati Verbi » , celle-ci moins fréquente. La mention post « millesimum » y est parfois ajoutée (ainsi: A, 106). A l'intérieur de l'année, les mois et les quantièmes sont désignés selon le calendrier julien. Le jour de la semaine figure aussi, dans environ 90 p. 100 des cas, sous la forme feria .II. ou feria .V. ou « die sabati » , ce qui permet d'utiles vérifications. En un cas apparaît l'indication du jour de la lune (17), mais c'est exceptionnel, et les mentions d'indiction ou d'épacte sont totalement absentes. La mention du roi régnant est également fournie, mais sans précision de l'année de règne (18).
    Les éléments ainsi énumérés sont en général rassemblés, soit au début, soit plutôt à la fin de l'acte. Quelquefois l'année figure seule en tête, et les autres indications se trouvent rejetées à la fin.
    Le problème essentiel est évidemment pour nous celui du style adopté pour le début de l'année. Il paraît possible d'aboutir aux conclusions suivantes:
    1. Le style le plus couramment adopté est celui de l'Annonciation (25 mars), selon le calcul florentin. Ce style concorde pour la plus grande partie de l'année avec celui de Pâques, et l'on pourrait hésiter. Cependant, sur 9 actes (19) dont la date tombe entre le 25 mars et le dimanche de Pâques, il est possible de vérifier que la nouvelle année a déjà commencé. Un seul acte fournit une contre-épreuve en faveur du style de Pâques (20).
    2. Toutefois 21 actes (21) sont datés selon ce même style de l'Annonciation, mais avec le calcul pisan — qui, on le sait, faisait commencer l'année 9 mois et 6 jours avant le 1er janvier où elle débute pour nous. Ces actes se répartissent de 1136 à 1182, donc dans toute la période couverte par nos cartulaires, et sans qu'il soit possible de les mettre en relation avec tel ou tel scribe (22). Ces données sont à verser au dossier, déjà fourni, de la diffusion du calcul pisan dans le Languedoc au XIIe siècle (23).

    Certains actes sont datés de façon incomplète, par la seule mention de l'année; nous les avons, en ce cas, placés à l'intérieur de l'année calculée selon le style florentin, puisque celui-ci a été généralement appliqué.
    Des erreurs dues soit aux rédacteurs des actes, soit aux copistes des cartulaires, expliquent qu'une vingtaine de documents (24) présentent une discordance entre les divers éléments de leur datation.
    Enfin 10 actes ne sont pas datés (25); nous nous sommes efforcés d'en proposer une datation, au moins approximative, d'après les éléments dont nous disposions, et qu'une notice indique chaque fois au lecteur.


    8. — Nomenclature des rédacteurs des actes originaux. Top

    L'examen des souscriptions nous a permis d'établir la liste suivante des scribes rédacteurs des actes originaux (nous indiquons les numéros des actes et leurs dates extrêmes):
    — Guillelmus ou Gillelmus: A, 86 (1110).
    — Osmundus: A, 89 (1113), et D, 1 (1132).
    — Petrus Raimundi, presbiter: C, 1 (1130).
    — Galterius Calnesius, filius Guigonis Calnesii: C, 8 (1132).
    — Guillelmus, alias Guillelmus Adaulphi, notarius domni Rogerii vicecomitis Carcassensis: A, 1, 5, 23, 29, 36, 46, 47, 58, 73, 78, 79, 115, 121, 123, 124, 146, 148, 171, 172, 174, 176, 181, 186, 202, 205. — B, 1, 11, 14. — C, 2. — D, 3 (du 1er avril 1132 au 25 juillet 1147), et ses deux scribes:
    — Bernardus, diaconus: A, 12, 13, 49, 128, 139, 142, 144, 145, 149, 206. — B, 2, 3, 4, 5 (du 1er décembre 1141 au 12 février 1148).
    — Arnaldus de Magriano: A, 25, 60, 129, 184, 187. — B, 18 (du 13 décembre 1146 au 12 février 1148).
    — Bernardus de Port, canonicus Sancti Pétri: A, 40. — C, 3 (1133-1134).
    — Bernardus Salomonis: A, 38, 185. — C, 4, 5, 6 (1133-1135).
    — Nicolaus, sacerdos: A, 45 (1er janvier 1134).
    — Bernardus de Rovenago: D, 2 (2 novembre 1134).
    — Raimundus: A, 21 (28 janvier 1135).
    — Petrus de Ecclesia: A, 96, 101, 107 (du 25 mars 1135 au 20 septembre 1148).
    — Pondus: A, 102, 103, 108, 109, 110, 111 (du 24 avril 1136 au 31 janvier 1147).
    — Petrus: A, 42, 57, 70, 200. — B, 9 (du 25 mai 1137 au 9 décembre 1142).
    — Petrus de Magalaz: A, 11, 175, 203 (du 21 juin 1138 au 2 septembre 1142).
    — Pondus Guillelmi: A, 100 (26 juillet 1139).
    — Jordanis: A, 61 (16 avril 1141).
    — Bernardus: A, 13 (1er janvier 1141).
    — Arnaldus, capellanus de Barbairano: A, 99 (vers 1133-1143 ?).
    — Bernardus Guitardus: A, 34 (26 juillet 1147).
    — Arnaldus de Clairano: A, 2, 6, 27, 31, 33, 62, 63, 64, 66, 67, 68, 69, 71, 85, 87, 88, 95, 116, 117, 118, 119, 120, 125, 126, 127, 130, 131, 132, 133, 134, 135, 136,138, 140, 141, 143, 147, 150, 152, 153, 154, 155, 156, 157, 159, 162, 163, 164, 165, 167, 168, 170, 173, 182, 183, 190. _ B, 10, 13, 15, 16, 19, 20, 21, 22, 25, 27, 28, 29, 30, 31, 35, 37, 38, 42, 45, 46, 51, 54, 58, 61, 62, 63, 65, 69, 70, 71, 73, 76, 77, 79, 83, 85, 86, 87, 88. — D, 7, 13, 15 (du 22 juin 1148 au 3 janvier 1183). Faut-il confondre avec lui Arnaldus, de A, 122, 194, 195, 196, 197, 198, et B, 24, 47 (1155-1167) ?
    — Falcho: A, 199 (22 février 1150).
    — Rotbertus, presbiter: A, 55 (7 mars 1150).
    — Raimundus: D, 5, 8, 9 (vice Stephani capellani) (1152-1165).
    — Raimundus de Albariis: A, 17,18, 20, 41, 44, 50, 54, 76. — D, 6,10 (du 4 avril 1152 au 15 mai 1167).
    — Arnaldus Rogerius: A, 193 (1155-1156).
    — Carbonellus: A, 10,15, 26, 30, 37, 39, 48, 56, 65, 72, 80 (du 21 novembre 1155 au 9 juillet 1163).
    — Petrus: A, 82 (1156-1157).
    — Guillelmus Gaucelmi: A, 9, 16, 32 (du 12 janvier 1156 au 9 mars 1157).
    — Guillelmus: A, 8,14, 24, 43, 53, 77, 81, 84, 90, 91, 189, 192. — B, 34, 40, 43, 44. — D, 11, 12, 14 (du 12 janvier 1156 au 19 avril 1174).
    — Raimundus de Alairaco: B, 17 (10 mars 1158).
    — Guillelmus Homo Dei, capellanus de Gaure: A, 160, 188, 204 (de novembre 1159 au 2 janvier 1162).
    — Petrus Barravus ou Barraus: A, 161. — B, 7, 8, 26, 84 (du 12 juillet 1162 au 1er février 1182).
    — Guillelmus de Ferrals: A, 35. — B, 12 (de 1162 au 30 juin 1163).
    — Petrus, alias Petrus capellanus de Glujano: A, 59. — B. 39 (décembre 1164).
    — Guillelmus, levita: A, 19, 51, 52 (du 31 mars 1165 au 23 février 1166).
    — Guillelmus Calveti: A, 158 (22 décembre 1166).
    — Guillelmus Caroli: A, 137 (18 septembre 1167).
    — Guillelmus Rogerius: B, 6, 60, 78, 80, 81 (d'août 1167 au 11 mars 1174).
    — Pondus, capellanus: A, 105. — B, 57 (1er février 1167, 5 août 1168).
    — Stephanus: A, 74 (4 octobre 1168).
    — Petrus (Calvetus) de Pomar: A, 98, 113. — B, 32, 41. — D, 19 (du 24 septembre 1168 à janvier 1176).
    — Bernardus de Flaciano: B, 59, 72 (1168-septembre 1170).
    — Pondus de Subirag: A, 94, 104. — B, 23, 33, 36, 48, 49, 50, 53, 56 (du 5 avril 1168 au 29 août 1170).
    — Stephanus de Mairaco: A, 22, 92, 93, 166. — B, 55 (du 10 août 1168 au 13 mai 1171).
    — Guillelmus de Palacio: A, 7, 28, 75, 97, 114, 151. — B, 75. — D, 15 bis, 16, 18, 20, 21, 22, 23, 24, 25 (du 13 février 1169 au 3 mars 1179).
    — Raimundus de Boanno: B, 52 (5 janvier 1170).
    — Bernardus: B, 64, 67 (août-novembre 1172).
    — Geraldus de Marcelencs: B, 74 (3 mai 1173).
    — Bernardus, levita: B, 66 (18 avril 1175).
    — Berengarius de Lengontio: D, 17 (28 mai 1175),
    — Geraldus: B, 68 (20 février 1176).
    — Adalbertus de Sipiano: A, 169 (19 mars 1181).
    Cartulaires des Templiers de Douzens — Publiés par Gérard et Elisabeth Magnou, sous la direction de Philippe Wolff — Paris, Bibliothèque Nationale — 1965

    Notes

    1 — Il nous a laissé lui-même sa signature au milieu du folio 84: Belhomme, conservateurs Archives de Languedoc.
    2 — Dont 122 étaient occupés par le texte du cartulaire: précision fournie par une note XVIe siècle inscrite au folio 78 vº: « CXXII fz escriptz » .
    3 — De 8 feuillets chacun.
    4 — Nous devons ces renseignements à l'obligeance de M. Moor, chef de l'atelier de restauration de la Bibliothèque municipale de Toulouse, que nous en remercions vivement. C'est une reliure de ce type que porte en particulier le Missel à l'usage de l'église d'Arles en Roussillon, manuscrit du XIIe siècle, actuellement conservé à la Bibliothèque municipale de Perpignan (ms. nº 4, anc. 26).
    5 — Les Bernots, Pieusse, Notre-Dame-de-Maiceille et Espéraza.
    6 — Les folios 35 et 93 sont restés blancs.
    7 — A savoir onze de 8 feuillets, un de 4, et un de 2.
    8 — Les initiales, tracées à l'encre noire, se développent sur une hauteur de un à trois interlignes. Une main les a annotés au XVIIe siècle.
    9 — H. Malte, fonds de Douzens, layette 1 (anc. Douzens 1), nº 9 à 11, 21, 24 à 31, 33; layette 29 (anc. Cabriac 1), nº 2, 12, 16 à 22.
    10 — L'inclinaison vers la gauche triomphe dans un acte du 28 septembre 1184 (layette 1, nº 10). Toutefois, à la fin de sa carrière, Guilhem de « Palacio » se laisse aller à rédiger certains passages inclinés vers la droite: c'est visible dans un document du 27 novembre 1199 (ibid., nº 11).
    11 — Tous ces caractères s'observent dans l'acte du 27 novembre 1199.
    12 — Détail amusant: Guilhem de « Palacio » s'est trahi en commettant par distraction une erreur dans la transcription de la dernière ligne de l'acte 8, daté du 5 mars 1169. Au lieu de reproduire le nom du scribe rédacteur de l'acte original (layette 29, nº 9): Guillelmus scripsit jussione Stephani cappellani, il a tout bonnement écrit: Guillelmus de « Palatio » hanc cartam scripsit, comme pour un acte rédigé par lui.
    13 — Nous avons un indice prouvant que Guilhem de Palacio a travaillé au cartulaire B postérieurement à 1180. Dans sa transcription de l'acte nº 75 (fol. 76-77) passé le 14 octobre 1172, il a commis une erreur en mentionnant le règne de Philippe-Auguste, et non celui de Louis VII. Ayant l'habitude de porter cette indication sur ses actes originaux, il s'est laissé entraîner à la noter sur sa transcription.
    14 — Ainsi, dans le dossier de Brucafel (fol. 87 à 126 vº), la répartition des actes est la suivante: Brucafel (nº 115 à 138), Caumont (139 à 146), bourg Saint-Vincent de Carcassonne (147 à 151), Brucafel (152 et 153), Floure (154), dons de personnes (155 à 160), etc.
    15 — Par exemple, le classement des actes nos 31 à 74 est le suivant: Mirailles (31 à 41), Molières (42 à 48), Valséguier et Peyremale (49 à 71), Molières (72 à 74).
    16 — Il y en avait 12 à l'origine: entre les actuels folios 9 et 10, un feuillet a été coupé avant même la transcription des actes, puisque l'acte nº 10 se poursuit sans arrêt, à cheval sur cette coupure cependant visible. 17 — A, 24: ... luna vicesima sexta ..., en 1156 (a. st.), ce qui est exact.
    18 — Sauf en un cas, A, 199: « anno dominice Incarnationis MCL, regni Lodovici XIIII » , ce qui est exact.
    19 — A, 170, 171, 177 à 180, 192. — B, 38. — D, 16. On peut sans doute y ajouter le A, 66.
    20 — A, 37: la date indiquée est le 7 avant les calendes d'avril, 1158, 5e férie. Or le 26 mars tombe un mercredi en 1158, et un jeudi en 1159 (où Pâques fut célébré le 12 avril). Il faut donc corriger en 1159, ce que le scribe eût dû faire lui-même s'il avait utilisé le style de l'Annonciation. Toutefois, le cas étant unique, on ne peut absolument écarter l'idée d'une inadvertance du scribe. 21 — Ce sont les nº : A, 8, 15, 25, 39, 52, 55, 61, 81, 93, 96, 104, 107, 161, 186, 200; et B, 43, 55, 61, 78, 80, 81. Une petite notice placée sous l'analyse de chacun de ces actes indique les raisons que nous avons de penser que le calcul pisan a bien été utilisé dans tous ces cas, sauf erreur du copiste, bien entendu.
    22 — Ainsi Carbonellus date en style pisan les nº A, 15 et 39. Mais nous avons une dizaine d'autres actes rédigés par lui et datés selon le calcul florentin.
    23 — Ch. HIGOUNET, Le style pisan, son emploi, sa diffusion géographique, dans Le Moyen âge, 1952, nº l-2, p. 31-42.
    24 — 24 exactement: A, 2, 10, 16, 26, 48, 51, 57, 60, 65, 66, 70, 92, 103, 137, 165, 166, 194, 195 ; B, 8, 17, 77, 84, 86 ; D, 15. — Dans tous les cas, une notice placée après l'analyse de l'acte expose les éléments du problème, et présente une solution lorsqu'un choix entre les erreurs éventuelles apparaît vraisemblable.
    25 — Ce sont les nº: A, 3, 4, 99, 112, 201, 202 (acte daté, mais dont une déchirure a emporté une partie de la date.) B, 82 — C, 9, 10. — D, 26.

    Cartulaires des Templiers de Douzens — Publiés par Gérard et Elisabeth Magnou, sous la direction de Philippe Wolff — Paris, Bibliothèque Nationale — 1965

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