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    Les forts de la plaine Akkar

    Les forts de la plaine d'Akkar : Bordj Maksour — Bordj Zara — Bordj Arab — Bordj Miar — La Tour de Tolké — Bordj Selaa — Bordj Mouheish — La Tour de Tabardja.

    Nous étudierons maintenant quelques Forts situés dans la Plaine d'Akkar ou dans son voisinage. Plusieurs sont certainement l'œuvre des Francs ; d'autres sont trop ruinés pour en décider.

    Citons Bordj Maksour, Bordj Zara, Bordj Arab, Bordj Miar entre Safitha et Yahmour, la tour de Toklé au Nord de Safitha.

    Bordj Maksour (1), à 8 km à l'Ouest de Tell Kalakh est presque entièrement ruiné. On voit des traces de fossés.

    Bordj Zaraest à 4 km au Nord de Tell Kalakh. La tour est en assez bon état et conserve son escalier. Ce Bordj se trouve sur l'emplacement d'un temple antique dont le calcaire blanc a été utilisé pour les angles de la tour.
    Comme postes avancés vers la route Homs-Tripoli, on peut citer Bordj Zara et Tell Kalakh.
    Sources René Dussaud - Topographie Syrie, page 93.

    Bordj Arab
    Des postes fortifiés secondaires assuraient la liaison entre Chastel-Blanc et Tortose qui, tous deux, étaient aux mains des Templiers ; c'était Qal'at 'Areimé, Qal'at Mohash, Bordj 'Arab, Bordj Mi'ar, Qal'at Yahmour ou Chastel-Rubrum.
    Sources : René Dussaud, Topographie Syrie, page 119, (ou Ain el Arab), est placé à la rencontre du Nahr el Kebir et de son affluent le Nahr el Khalife. On voit dans cette vallée une éminence appelée Tell Khalife (4). Ibn al-Furat écrit que Beibars, après avoir pris Chastel Blanc en février 1271 et avant d'attaquer le Crac, s'empara des fortins qui environnaient la grande forteresse ; parmi ceux-ci il enleva Tell Khalife. Les Francs appelaient cette contrée la Terre de Galife (5).
    On reconnaît dans la tour très bien conservée de Bordj Arab, des fragments tels que des linteaux remployés d'une construction byzantine, des sculptures dans des blocs de lave, où sont figurées des roses, une croix pattée gravée dans un disque ; des croix semblables se retrouvent dans l'église d'Amioun (6), à l'Est de Nephin, qui paraît dater de la fin du XIIe siècle.

    Bordj Miar (7) se trouve au Sud-Est de Qal'at Yahmour.

    La tour de Toklé, au Nord de Chastel Blanc, poste en grande garde sur une croupe du Djebel Terlil a été dressée là sans doute pour surveiller le territoire des Assassins. C'est assurément une tour franque. Rey, y a relevé des marques de tâcherons analogues à celles de Saône et du Crac.

    Tour de Toklé

    Tour de Toklé, marques de tacherons
    Figure 1 - Sources : Tour de Toklé d'après Rey

    Il constate que ces postes de liaison établis par les Francs ont été construits d'après un plan uniforme. Il a choisi la tour de Toklé comme type d'étude. Il en donne la coupe et le plan (7). Voici ce qu'il écrit : « Ces tours qui représentent en petit toutes les dispositions d'un donjon sont invariablement carrées et se composent de deux étages voûtés, subdivisés eux-mêmes par des planchers... On pénètre dans la salle basse par une porte à linteau avec arc de décharge. Au centre de cette salle est creusée une citerne. Pour aller chercher la porte qui donne dans les escaliers droits qui montent aux étages supérieurs, il fallait atteindre le niveau du plancher au moyen d'une échelle ; une voûte en berceau couvre le premier étage et une voûte d'arêtes sans arêtiers supporte la plateforme supérieure ; un second plancher divisait ce second étage en deux pour réserver sous la plateforme un magasin à provisions. Un mâchicoulis commande la porte. Le rez-de-chaussée pouvait servir au besoin d'écurie pour quelques chevaux. »

    Tour de Toklé

    Tour de Toklé
    Figure 2 - Sources : Tour de Toklé d'après Rey

    Tour de Toklé

    Tour de Toklé
    Figure 3 - Sources : Tour de Toklé d'après Rey

    Ainsi Rey qui a dû visiter plusieurs de ces bordjs assurait qu'ils étaient tous semblables. Les dimensions hors oeuvre sont presque exactement les mêmes.
    La tour de Toklé a 14 m x 12,80 m et celle de Bordj Arab, 14 m X 13,40 m. Remarquons en passant que le donjon de Qalat Yahmour a 15 m x 14 m et que la principale tour du Fort d'Akkar a 13 m X 13 m.

    Peut-être y a-t-il lieu de signaler ici d'autres tours isolées qui se trouvaient sur le rivage et servaient sans doute de phares. Ainsi au Sud du Comté, la tour (8) dite Van Berchem a étudié Bordj Mouheish (10) : « Cette tour, dit-il, s'élève au bord d'une falaise, à environ dix mètres au-dessus du niveau de la mer. Carrée et trapue et bâtie en moyen appareil, elle est conservée jusqu'à la hauteur des mâchicoulis, à environ 9 m du sol. Au pied de sa face Est s'ouvre une porte basse dont le linteau est un bloc monolithe.

    Bordj Selaa « la tour du feu », au Nord de Batroun ; Bordj Mouheish tout près de Giblet au Sud ; et la tour de Tabardja un peu au Nord du Nahr al-Mu'amiltain, le long de la côte de Sarba qui conserve les restes d'un grand temple, Djouni, d'où provient un Jupiter héliopolitain actuellement au Louvre, sont des sites antiques, puis au-delà du pont romain de Ma'amiltein, Tabarja et Bawar, Bourj Mouheish et, plus à l'Est, Fatqa ou Fetaqa.
    Sources : René Dussaud, Topographie Syrie, page 62

    Tour de Bordj Mouheish

    Tour de Bordj Mouheish
    Figure 4 - Sources : Tour de Bordj Mouheish, d'après Van Berchem

    Tour de Bordj Mouheish

    Tour de Bordj Mouheish
    Figure 5 - Sources : Tour de Bordj Mouheish, d'après Van Berchem

    Au-dessus est une fenêtre carrée flanquée de deux archères ; le linteau est soulagé par un arc de décharge dont les claveaux sont sculptés de chevrons à rosettes. Ce décor du XIIe siècle offre une analogie frappante avec celui de l'archivolte de la face Est du baptistère de l'église de Djebeil. ... » L'intérieur comportait deux étages voûtés d'arêtes. « Tous ces caractères trahissent l'époque des Croisades.

    Le Burj Muhech et la tour de Tabardja qui dominent le rivage sur deux promontoires et se voient l'une de l'autre, devaient faire partie d'un cordon de postes destinés à garder la route, à surveiller la mer et à transmettre des signaux. » Le Guide Bleu signale que Bordj Mouheish est encore presque intact (11).

    Notes - Les forts de la plaine Akkar

    1. Lammens, Musée belge, IV, 1900, page 283.
    2. Dussaud, Revue archéologique, 1897, tome I. Topographie Syrie, page 93; cité par Renan, Mission de Phénieie, page 126.
    3. Renan, ibid., Dussaud, Topogr., page 119.
    4. Carte du Cel P. Jacquot, L'État des Alaouites, 1929 et carte des environs de Safitha, page112. Sur le Tell Khalfié voir Clermont-Ganneau, Rec. d'archéologie Orientale, tome II, page 179. — Van Berchem dans Journal asiatique, 1902, page 446.
    5. En 1179 « Terra Galifa », Cartulaire général des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, tome I, page 378. — Rôhricht, Rey., page 152, n° 572. En 1185 Raymond de Trois Clés échange cette terre en même temps que le Casal Aieslo avec l'Hôpital contre d'autres Casaux. Cartulaire général des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, tome I, page 479. — Rôhricht, Reg., page 109, n° 642. Rey, Colonies franques, page 364.
    6. Pierre Coupel, Trois petites églises du comté de Tripoli, dans Bulletin du Musée de Beyrouth, tome V, figure 12, Croix à Amioun et à Bordj Arab.
    7. Van Berchem, page 97 « Tour en ruine sur une colline. » Bordj Miar figure sur la carte du Gel Jacquot, L'État des Alaouites, 1929.
    7. Rey, Les monuments de l'architecture militaire des Croisés, 1871, pages 101-102, figure 29 coupe et plan.
    8. Voir notre chapitre I, page 9.
    9. Voir René Dussaud, page 62.
    10. Van Berchem, Voyage, page 104, figures 32-33, que nous reproduisons ici.
    11. Guide Bleu de Syrie-Palestine (1929) page 37. Le Guide Bleu fait cette réserve que certaines de ces tours au bord de la mer peuvent être des constructions arabes ; ainsi non loin de là, Bordj Qadiset Helena n'est que du XIVe siècle.

    Sources : Paul Deschamps - Les Châteaux des Croisés en Terre Sainte, tome III, La Défense du Comté de Tripoli et de la Principauté d'Antioche. Editeur Paul Geuthner, Paris 1973

    Tours et postes isolés

    En France, les cols des montagnes, les passages des rivières et certains points stratégiques d'une importance secondaire étaient souvent gardés par des tours isolées et à la défense desquelles pouvait suffire une garnison peu nombreuse.

    Les diverses places de guerre possédées au moyen âge par les chrétiens dans le nord de la Syrie étaient reliées entre elles par de petits postes ou tours élevées d'après un plan uniforme ; un grand nombre subsiste encore aujourd'hui, savoir : Bordj-ez-Zara, Bordj-Maksour, Aïn-el-Arab, Toklé, etc. etc.

    C'est cette dernière que j'ai choisie comme type d'étude. Ces tours, qui représentent en petit toutes les dispositions d'un donjon, sont invariablement carrées et se composent de deux étages voûtés, subdivisés eux-mêmes par des planchers, système dont j'avais déjà observé l'emploi dans les casernements du château des Cerines, dans l'île de Chypre, et qui se comprend facilement par la coupe. On pénètre dans la salle basse par une porte à linteau avec arc de décharge. Au centre de cette salle est creusée une citerne. Pour aller chercher la porte qui donne dans les escaliers droits montant aux étages supérieurs, il fallait atteindre le niveau du plancher au moyen d'une échelle; une voûte en berceau forme le premier étage et une voûte d'arête sans arêtiers supporte la plate-forme supérieure; un second plancher divisait ce second étage en deux pour réserver sous la plateforme un magasin à provisions. Un mâchicoulis commande la porte, le rez-de-chaussée pouvant au besoin servir d'écurie pour quelques chevaux.

    Sur les pierres formant les murs de cet édifice, j'ai relevé les marques suivantes laissées par les tâcherons.

    Tour de Toklé

    Tour de Toklé, marques de tacherons
    Figure 1 - Sources : Tour de Toklé d'après Rey

    Il est encore un autre type analogue de postes secondaires remontant à l'époque des croisades. Je vais en donner un exemple en décrivant la tour de Kermel, qui s'élève au milieu des ruines de la ville de Chermula, où étaient cantonnés au temps de la domination romaine les cavaliers scutaires d'Illyrie (1).

    Tour de Kermel

    Tour de Kermel
    Tour de Kermel - Sources : Tour de Kermel d'après Rey

    C'est également une tour carrée construite par étages en retraite. Elle est entourée d'une chemise avec talus en maçonnerie. Cette première défense paraît avoir été jadis garnie d'un parapet crénelé, aujourd'hui dérasé. La tour forme le réduit de cet ouvrage; la porte s'ouvre un peu au-dessus du sol, et ou y accède par un escalier de quelques marches.

    Une citerne encore intacte existe dans la base de la tour, qui paraît n'avoir eu qu'un étage consistant en une grande salle percée de six meurtrières; elle était voûtée en berceau, et dans l'épaisseur de la muraille nord ou avait ménagé l'escalier conduisant à la plate-forme qui couronnait autrefois l'édifice.

    A quelques pas se voient les arasements d'un vaste bâtiment carré, flanqué de quatre tourelles rondes, et qui parait avoir été une espèce de caravansérail dépendant selon toute apparence du poste dont l'étude nous occupe en ce moment.

    Kermel formait avec Zouïera et Es-Semoa l'extrémité orientale des postes couvrant vers l'Egypte la frontière du royaume latin.

    Un grand réservoir, datant d'une époque fort ancienne et qui est parvenu intact jusqu'à nos jours, conserve durant la saison des pluies l'eau qui coule des collines voisines. En l'année 1172, toute la cavalerie de l'armée du roi Amalric campa sur ses bords durant plusieurs semaines (2).
    Sources : Rey (Emmanuel Guillaume), Etude sur les monuments de l'architecture militaire des croisés en Syrie et dans l'Ile de Chypre. Paris, Imprimerie Nationale M. DCCC. LXXI.

    Notes - Tours et postes isolés

    1 Notitia dignitalum imperii orientalis, pages 91 et 92.
    2. Guillaume de Tyr, livre I, XX, chapitre XXX.


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