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    Arima (El Areymeh, Qal'at Areymeh, el Oraïmah)

    Le château d'Arima se dresse sur une éminence qui domine une grande plaine entre le Nahr Abrash et son affluent le Nahr Krach.
    Il est question pour la première fois d'Arima en 1148, quand ce château appartenait au Comte de Tripoli, Raymond II. Alphonse-Jourdain, Comte de Toulouse, deuxième fils de Raymond de Saint Gilles et frère de Bertrand (I), Comte de Tripoli, mort en janvier 1112, était venu prendre part à la deuxième croisade accompagné de son fils naturel Bertrand. Alphonse était mort empoisonné à Césarée peu après son débarquement et le bruit avait couru que l'auteur de ce forfait était Raymond II, car on prétendait que celui-ci craignait que son grand oncle ne vînt lui réclamer son comté libanais.

    Bertrand (II), demeuré en Orient tenta en effet de dépouiller Raymond II fils de Pons, et petit-fils de Bertrand, Comte de Tripoli. Il commença par s'emparer du château d'Arima et selon Kamal ed-din, il se proposait d'attaquer Tripoli. Raymond appela à son secours Nour ed din qui se trouvait à Baalbeck et Muin ad-din Anar gouverneur de Damas, auxquels se joignit une troupe de mille cavaliers du frère de Nour ed-din, Saïf ad-din Ghazi, atabeg de Mossoul.

    Au milieu de septembre 1148, l'armée musulmane vint investir Arima. Après plusieurs assauts les mineurs de Nour ed din sapèrent une muraille et pénétrèrent dans la place. Un certain nombre de défenseurs furent tués, les autres «  cavaliers et fantassins, femmes et enfants  » furent conduits en captivité. Parmi les prisonniers se trouvaient Bertrand et sa soeur, que Nour ed din emmena à Alep ; la soeur de Bertrand serait entrée dans le harem de Nour ed-din. La captivité de Bertrand dura jusqu'en 1159 ; à cette date, selon Guillaume de Tyr, le roi de Jérusalem obtint de Nour ed din qu'il lui rendît Bertrand avec quelques autres captifs.
    Ibn al-Athir, Histoire des Atabegs de Mossoul, Historiens orientaux des Croisades, tome II, pages 162-168. — Abou Chama, Livre des deux Jardins, Historiens orientaux des Croisades, tome IV, pages 59-60. — Ibn al-Athir écrit : «  Il en fut du fils d'Alphonse comme de l'autruche dont on dit : l'autruche s'est mise en campagne pour chercher des cornes et elle est revenue sans oreilles.  »
    Après la prise d'Arima l'armée musulmane s'était retirée ayant démantelé la forteresse.
    En 1167, Nour ed din profitant de ce que les forces franques combattaient en Egypte avec le roi Amaury et que le comte Raymond III était prisonnier à Alep depuis la défaite de Harrenc (Harim) envahit le comté, s'empare de Safîtha et d'Arima et, ne pouvant les occuper, les démantèle.

    Les Francs durent les réoccuper presque aussitôt puisqu'à la date de 1170 Abou-Chama parle d'un terrible tremblement de terre qui ruina plusieurs forteresses franques : Safitha et Arima figurent au nombre de celles-ci. L'année suivante (septembre - octobre 1171), nouvelle attaque de Nour ed din. Il assiège Archas qui résiste pendant qu'un corps de troupe s'empare de Safitha et d'Arima et les saccage.
    Abou-Chama, Livre des deux Jardins, Historiens orientaux des croisades, tome IV, page 154 : «  plusieurs forteresses des Francs telles que Hisn el-Akrad (le Crac) Safitha, el Oraïmah, Arka, étaient par suite des tremblements de terre comme plongées dans un océan de ruines.  »

    Après sa grande victoire de Hattin (4 juillet 1187) et la conquête de la Palestine, Saladin était l'année suivante monté en Syrie. Le 30 mai 1188 il installa son camp au voisinage du Crac des Chevaliers et il hésita tout un mois avant de renoncer à l'attaquer. Entre temps il fit des incursions dans la plaine, pilla le territoire de Safitha et d'Arima, s'empara de Qalat Yahmour. Puis il tenta de prendre Tortose, ravagea la ville basse, mais ses attaques contre la puissante citadelle des Templiers furent repoussées (3-11 juillet 1188). Il n'est plus ensuite question du château d'Arima si ce n'est en 1282 où le sultan d'Egypte concluait une trêve de dix mois avec Guillaume de Beaujeu, grand maître du Temple. Arima figure à côté de Safitha dans la liste des territoires des forteresses reconnues comme appartenant aux Musulmans ; cependant une partie du canton d'Arima demeure en la possession des Templiers avec la cité de Tortose.
    Rey a conclu qu'Arima appartenait comme Safitha et Tortose à l'Ordre du Temple.
    15 avril 1282. Rohricht, Regesta..., page 377, n° 1447 : «  territoria de Sahel capta, territoria castelli Curdorum, Safitha. Maiar, Oraimah......et de altéra parte Tortosa, quae fratribus Templi est, et pars cantonorum de Oraimah et Maiar quae eorumdem territorio annexa fuit pace...  » — Maqrizi, Histoire des sultans mamlouks, traduction Quatremère, tome II, page 222. — R. Dussaud, page 91.
    Sources : Paul Deschamps - Les Châteaux des Croisés en Terre Sainte, tome III, La Défense du Comté de Tripoli et de la Principauté d'Antioche. Editeur Paul Geuthner, Paris 1973

    Description du Château d'Arima

    Le château d'Arima très ruiné couvre avec ses dépendances un long et étroit plateau (altitude 171 m, longueur maxima 300 m, largeur maxima vers l'Est 80 m), inclus dans la fourche que forment le Nahr Abrash et son affluent le Nahr Krach. L'assiette de la place qui s'étend de l'Ouest à l'Est, est entourée de fossés. La pente à l'Ouest est assez douce ; elle est plus escarpée à l'Est. C'est de ce côté que se trouve l'ouvrage principal. Il est précédé de deux cours, chacune enfermée dans une enceinte. Deux fossés parallèles séparent ces trois éléments de la forteresse. La première cour était médiocrement défendue par une faible muraille conservée au Sud où apparaît un saillant. Puis franchissant un fossé on accède à la deuxième cour défendue par deux murs. L'entrée est sous le commandement d'une tour qui subsiste, dressée sur un talus, située à l'angle Nord-Ouest. Au-delà d'un deuxième fossé, on aborde la partie la mieux fortifiée qui constitue le château proprement dit. D'Ouest en Est il s'étend sur 76 m dans sa plus grande longueur et du Nord au Sud sur 45 m. Cet élément a été remanié de telle sorte que l'on ne peut y retrouver avec certitude un plan régulier. Il semble pourtant qu'il formait un rectangle régulier flanqué de tours d'angle et, au milieu du front Ouest, une tour commandant l'entrée ; cette tour était l'ouvrage le plus important (12,50 mxll m). Elle est en partie conservée. La tour de l'angle Sud-Ouest est encore debout avec son talus ; elle porte de grands bossages taillés à la rustique.
    Dans cette tour on remarque une pierre remployée portant un fragment d'inscription grecque, sans doute une épitaphe de l'époque impériale, information que nous devons à M. Louis Robert.

    Plan du château d'Arima

    Plan du château d'Arima
    Plan du château d'Arima - Sources : dessin de Pierre Coupel

    La courtine du Nord borde une longue salle voûtée, en partie comblée. Il reste encore le talus d'un saillant situé à 16 mètres en avant de la tour Nord-Est. Ce saillant paraît s'être rattaché à un avant-mur qui fermait la place de ce côté. Une partie de ces vestiges comportant un appareil à bossages grossiers, paraît appartenir à la première construction des Croisés prise par Nour ed din, en 1148. Les dispositions du château d'Arima rappellent celles du château de Subeibe à l'Est de Tyr.
    D'Arima, on a une vue fort étendue sur la plaine côtière et la mer. On aperçoit au Nord le château de Safitha et dans le lointain au Sud le Fort d'Akkar.
    Sources : Paul Deschamps - Les Châteaux des Croisés en Terre Sainte, tome III, La Défense du Comté de Tripoli et de la Principauté d'Antioche. Editeur Paul Geuthner, Paris 1973

    Amira par René Dussaud

    Il faut chercher aux environs d''Arqa le fortin de Tayibou, mentionné dans le traité de 1282 entre les Templiers de Tortose et le sultan d'Egypte. Les possessions du sultan sont énumérées dans l'ordre géographique : Hisn el-Akrad, Safitha, Mi'ar, 'Areimé, Halba, 'Arqa, Tayibou, Qoulai'at. Or, il existe une localité du nom de Sheikh Taba, à peu de distance à l'est de Halba, qui doit être la transformation, en un sheikh imaginaire, du nom de Tayibou.

    Citadelle d'Arima par René Grousset

    Tentative de Bertrand de Toulouse pour disputer à Raymond II - le comté de Tripoli. La guerre de Araima et l'appel aux Turcs.
    Les pèlerins de la Deuxième Croisade avaient été scandalisés de l'accord intervenu entre les barons de Jérusalem et le régent de Damas, de la trahison de l'élément franco-syrien, écrivent leurs chroniqueurs. Un exemple de ces ententes entre Musulmans et Francs de Syrie, rendues inévitables par une longue cohabitation, nous est fourni par le pacte conclu entre Raymond II, comte de Tripoli, d'une part, Mu'în al-Din Unur et Nûr al-Dîn, de l'autre. Exemple singulièrement plus typique même, puisqu'il nous montre les Francs de Syrie n'hésitant pas à faire appel à la protection musulmane contre les Croisés nouveaux-venus.

    On a vu que le comte de Toulouse, Alphonse Jourdain, venu par mer prendre part à la Deuxième Croisade, avait été empoisonné dès son débarquement à Césarée, vraisemblablement à l'instigation de son petit-neveu, Raymond II de Tripoli, lequel craignait de voir se dresser en lui un compétiteur. De fait, le fil de la victime, le jeune Bertrand, resté en Palestine après le départ des Croisés, entreprit d'arracher à Raymond II le comté de Tripoli, et commença par s'emparer du château de Araima (Aryma), au sud-ouest de Safita, à mi-chemin entre cette ville et l'embouchure du Nahr al-Abrash. La position était bien choisie car elle coupait la route de Tripoli à Tortose, les deux principaux centres du comté. Pour conserver son patrimoine, Raymond n'hésita pas à faire uppel à Mu'în al Din Unur et aussi, ce qui était plus grave, à Nûr al-Dîn (mi-septembre 1148). Les deux princes turcs acceptèrent avec empressement et vinrent tous deux assiéger Araima. Bertrand se défendit avec vaillance, mais les mineurs turcs ayant pratiqué une trouée dans la muraille, il dut se rendre. Les Turcs réduisirent en captivité tous les Francs de Araima, «  cavaliers et fantassins, femmes et enfants  », et ils ne s'en retournèrent qu'après avoir détruit la citadelle. Nûr al-Din emmena avec lui Bertrand à Alep. La captivité du prince toulousain devait durer douze ans.
    René Grousset. Histoire des Croisades et du Royaume Franc de Jérusalem, tome II, page 270. Paris Plon 1935

    Reddition d'Alexandrie au roi Amaury.

    Ainsi fut fait et Arnoul porta au camp franco-égyptien les propositions de paix de Shîrkûh : une fois encore on déclarerait la partie nulle, chacun rendrait ses prisonniers et les deux armées franque et zengide évacueraient l'Egypte en laissant Shâwar tranquille possesseur du pouvoir, mais avec amnistie pour ceux des Egyptiens qui, comme les habitants d'Alexandrie, avaient soutenu Shîrkûh. Ces propositions satisfirent tout le monde, les Francs parce qu'ils avaient atteint leur but en empêchant le rattachement de l'Egypte à l'empire zengide, et Shâwar plus encore, parce qu'il se trouverait ainsi délivré à la fois de ses ennemis zengides et de ses alliés francs.

    On peut se demander, il est vrai, pourquoi le roi Amaury n'eut pas la tentation d'exploiter plus à fond son succès en écrasant Saladin et Shîrkûh. La raison en est, à coup sûr, dans l'inquiétude qu'il ressentait toujours pour la Palestine, exposée aux diversions de Nûr al-Dîn.
    C'est à cette époque, en avril-mai 1167, que Beha al-Din (Deux Jardins, 111) place la surprise, par Nûr al-Dîn, du château de Munaitira, Mneitri ou Moinestre, fort du comté de Tripoli qui gardait la route du Liban, entre Jebail et Baalbek (cf. DUSSADD, Topographie, 73 et 397). Mais le Kamil al-tewârikh (545-546) situe, on l'a vu, cet événement un an plus tôt, entre novembre 1165 et octobre 1166.
    En effet, pendant que le roi se trouvait engagé en Egypte, Nûr al-Dîn, ayant appelé à lui, de Mossoul, son frère Qutb al-Dîn, avait conduit une campagne contre le comté de Tripoli (sans doute spécialement choisi comme objectif parce que le comte Raymond III était prisonnier). De Homs où il avait opéré sa concentration, Nûr al-Dîn était venu piller les terres dépendant du Krak des chevaliers (Qal'at al-Hosn), puis il était venu assiéger — sans résultat, semble-t-il — la place de 'Arqa, à 26 kilomètres seulement au nord-est de Tripoli. De là Ibn al-Athîr l'envoie prendre et ruiner le port de Jabala, tout au nord, à la frontière du comté de Tripoli et de la principauté d'Antioche, ce qui, comme itinéraire, est assez invraisemblable : en effet le même Ibn al-Athîr nous montre ensuite Nûr al-Dîn allant s'emparer de Qal'at al-'Araîma (Aryma) et de Sâfithâ (Chastel Blanc), ce qui ne s'explique que si, après avoir pillé la plaine de 'Arqa, l'atabeg est remonté vers le nord par la plaine de Akkar, al-Araîma et le noeud de routes de Sâfithâ, pour rentrer à Homs à travers la plaine de la Boquée. Il semble bien en tout cas que Burj Sâfithâ, le Chastel Blanc des chroniqueurs, soit tombé en cette année 1167 aux mains de Nûr al-Dîn qui, ne pouvant l'occuper, le démantela.
    Remarquons d'autre part, que les auteurs arabes, à commencer par Ibn Al-Qalânisî et Ibn al-Athîr, brouillent souvent Jabala ou Jébélé (Gebel, Zibel) et Jebail ou Byblos (Gibelet, Giblet).

    Dans une nouvelle campagne, Nûr al-Dîn vint attaquer la frontière nord-est du royaume de Jérusalem, défendue, depuis la chute de Panéas, par la forteresse de Hûnîn. A son approche les Francs évacuèrent la forteresse après l'avoir incendiée. Nûr al-Dîn y arriva le lendemain et acheva de démolir les murailles. Il songeait à aller ensuite attaquer Beyrouth, mais, des dissentiments s'étant produits parmi les siens, il dut licencier son armée. Sa diversion n'avait en somme abouti qu'à des résultats insignifiants puisque Sâfithâ et Hûnîn devaient être reconstruits presque aussitôt par les Francs. Le roi Amaury n'en jugea pas moins avec raison qu'une nouvelle attaque était toujours possible en Palestine. Aussi dut-il être heureux de mettre fin à l'expédition d'Egypte en concluant une paix victorieuse.
    La forteresse de Hûnîn fut reconstruite dès 1179 par le connétable Onfroi II de Toron. C'est le Chastel-neuf des chroniqueurs (Rey, Colonies Franques, page 478). — Sâfîthâ, le Chastel Blanc, fut de même reconstruit et puissamment fortifé par les Templiers qui en reçurent la garde (cf. Rey, Colonies Franques, pages 135-136. Et du même Rey, Etudes sur l\'architecture militaire des Croisés, pages 101-102.
    René Grousset. Histoire des Croisades et du Royaume Franc de Jérusalem, tome II, pages 498-499. Paris Plon 1935

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