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Une commanderie templière et sa chapelle en Avignon

Méconnue du grand public car complètement masquée par des bâtiments du XIXe siècle (1), la chapelle des templiers d'Avignon a jusqu'ici également très peu attiré l'attention des historiens d'art (2). Cet édifice est pourtant d'un intérêt certain pour l'histoire de l'architecture gothique en Provence, d'une part parce qu'il présente une architecture déjà aboutie d'inspiration septentrionale, qui paraît novatrice et assez isolée dans une région où les témoins conservés d'architecture religieuse du XIIIe siècle sont assez rares, d'autre part parce que son édification apparaît datée avec précision par les sources entre 1273 et 1281. Cette datation en fait le seul témoin important d'une architecture gothique à Avignon antérieure à l'arrivée des papes et pourrait même lui donner la place enviée de premier édifice de ce style en Provence, avec l'église de Saint-Jean-de-Malte à Aix. Cette chapelle était attenante à une commanderie dont les bâtiments, totalement détruits au XIXe siècle, n'ont laissé d'autres traces que textuelles et il pouvait paraître intéressant d'essayer de les ressusciter dans la limite des sources conservées.

I. — Heurs et Malheurs d'une Commanderie

L'implantation de l'ordre du Temple à Avignon
Les sources font défaut sur l'origine et les circonstances de l'implantation de l'ordre du Temple en Avignon. Le premier document mentionnant de façon certaine sa présence dans la cité remonte à 1174 (3). A partir de 1197, les actes témoignant de transactions de droits ou de biens fonciers deviennent plus nombreux et réguliers. Dans un premier temps, la fondation d'Avignon semble subordonnée à la Maison d'Arles. En 1174, aucun commandeur n'est mentionné et il faut attendre 1188 pour voir attesté Guillaume de Soliers « preceptor domus milici Arelatensis et Avinionensis » (4). Par la suite, à l'exception d'un seul cas, tous les commandeurs successifs porteront cette double titulature et c'est seulement à partir d'Artaud, cité en 1243 en qualité de « preceptor domus avinionensis » (5), que la Maison d'Avignon semble avoir un commandeur propre et s'affranchir définitivement de la tutelle d'Arles. L'établissement des templiers dans la cité rhodanienne semble assez tardif comparé à l'implantation de l'ordre en Provence. Dès le deuxième quart du XIIe siècle, de grands mouvements de donations émanant d'évêques ou de la noblesse locale ont en effet permis la constitution d'un réseau dense de commanderies et de centres d'exploitation comme c'est le cas à Saint-Paul-Trois-Châteaux, Richerenches, Roaix ou encore à Orange. Cette création déjà tardive de la Maison d'Avignon ne fut pas vraiment compensée par un rapide essor des acquisitions. Au milieu du XIIIe siècle, les templiers semblaient en effet n'avoir acquis que quelques terres en bordure du Rhône dans les alentours de leur commanderie et quelques maisons isolées dans la cité. Leur patrimoine paraît en tout cas bien modeste si on le compare à celui rassemblé par l'ordre « concurrent » des hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem (6). En effet, l'Hôpital de Saint-Jean installé presque simultanément à Avignon, jouissait dans le Midi d'un rayonnement de tout premier plan expliqué par la tradition conférant une origine locale à son fondateur Gérard Tenque, par l'utilité hospitalière et par le succès de la croisade (7); il a donc dû représenter une concurrence directe pour le Temple. Mais l'extension des menses épiscopale et canoniale, la constitution du patrimoine communal et l'arrivée des nouveaux ordres mendiants ont sans doute aussi représenté autant d'entraves au développement de la Maison templière... Au tournant des années 1250, la situation semble néanmoins évoluer en faveur du Temple : l'accroissement du patrimoine s'intensifie (8), et surtout, l'ordre obtient enfin le droit d'édifier sa propre chapelle avec un cimetière. L'avènement de Charles Ier d'Anjou comme comte de Provence en 1246 pourrait ne pas être étrangère au brusque regain d'intérêt que connut le Temple en Avignon. Si les preuves documentaires d'une aide directe des Angevins aux templiers manquent à Avignon, celle-ci n'est pour autant pas à exclure puisqu'on sait par ailleurs que tant les Capétiens que leur branche cadette angevine entretenaient de nombreux liens avec l'ordre du Temple. D'une manière indirecte, la soumission par le traité de Beaucaire, en 1251, de la commune d'Avignon, probablement hostile à l'instar de la commune d'Arles (9) au foisonnement et à l'expansion des ordres religieux, a pu favoriser le Temple.

En quel lieu de la ville d'Avignon les templiers se fixèrent-ils à leur arrivée ? Les plus anciennes possessions mentionnées se situent dans une zone d'atterrissements du Rhône à l'ouest de la ville, dénommée « l'Estel », mais il ne s'agit là que de jardins... La première mention de la Maison apparaît en 1197, mais sans indice de localisation (10). Il faut attendre 1259 pour apprendre qu'elle est située dans la paroisse Saint-Agricol (11). Il est probable que, dès l'origine, les frères s'installèrent à l'endroit où s'élève encore aujourd'hui leur chapelle, dans un îlot délimité par les actuelles rues Saint-Agricol et Félix-Gras. En effet, aucun texte ne fait allusion à un premier établissement dans un endroit différent et, comme le fait remarquer E. Duprat, « la quantité d'actes visant l'Estel, sis entre la Sorgue et le Rhône, laisse croire qu'ils attachaient beaucoup de prix à augmenter des possessions voisines de leur Maison » (12). L'environnement topographique de la commanderie (fig. 1) est relativement bien connu grâce à des fouilles archéologiques ponctuelles et aux sources écrites (13). Celle-ci prend place dans une zone habitée depuis la protohistoire, non loin du centre monumental de la ville antique, en face de l'église Saint-Agricol : cette dernière est attestée de façon certaine depuis le début du XIIe siècle et s'installe à l'emplacement d'une nécropole attribuable à l'Antiquité tardive dont on ne sait si elle était déjà liée à un lieu de culte. L'église Saint-Agricol assume en tout cas une fonction paroissiale dès le XIIe siècle tandis que la fonction cimetériale perdurera jusqu'à la Révolution. Aux XIIe-XIIIe siècles, la paroisse connaît une grande activité édilitaire. Des terres, dites de la « vinea vispalis », appartenant à la directe de l'évêque et environnant la commanderie, sont concédées pour être bâties, ce qui donne lieu à la création d'un bourg (14). Les bénédictines de Saint-Laurent puis les dominicains viennent aussi s'implanter à cet endroit de la ville. Durant cette période, les Avignonnais manifestent le besoin d'entourer leur ville d'une enceinte, reconnue archéologiquement tout près du lieu où s'élevait la commanderie du Temple (15). C'est donc dans ce contexte qu'il faut situer l'arrivée des templiers à partir de la deuxième moitié du XIIe siècle : tout près de la « Vigne épiscopale », à l'intérieur des remparts et à proximité d'une porte qui conservera d'ailleurs le nom de « portale templi » (16). Il serait tentant d'émettre l'hypothèse d'une donation de l'évêque aux templiers, à l'origine de la commanderie. Cela n'est pas impossible, les évêques ayant souvent été à l'origine de l'établissement de l'ordre dans leur ville, mais l'étendue des terrains relevant de la propriété de l'évêque n'est pas connue avant le XIVe siècle et aucun document ne permet donc de confirmer cette hypothèse. L'emplacement de la commanderie, dans un secteur de la ville en pleine expansion aux XIIe et XIIIe siècles, correspond assez à ce que l'on connaît pour d'autres implantations urbaines des templiers en Provence. On les trouve souvent dans des bourgs neufs apparus dans le courant du XIIe siècle (Arles, Orange), proches de l'enceinte (Hyères) et, dans la mesure du possible, près d'une porte (Cavaillon, Brignoles, Aix-en-Provence). Ils s'installent de manière générale hors des agglomérations anciennes, dans des terrains laissés libres ou en train de se lotir, ce qui n'a rien de particulier aux templiers, les maisons de Saint-Jean-de-Jérusalem et les hôpitaux étant réduits aux mêmes endroits, tout comme le seront les ordres mendiants au XIIIe siècle.

La commanderie à l'époque templière
Les bâtiments de la commanderie, à l'exception de la chapelle, ayant complètement disparu, le seul moyen d'en avoir un aperçu, il est vrai bien sommaire, reste l'étude des sources écrites. En 1198, on apprend l'existence d'un réfectoire précédé d'un portique (17), conformément à la règle qui prescrivait les repas en commun (18). Même s'il n'est mentionné dans aucun texte, on peut supposer aussi l'existence d'un dortoir également imposé par la règle (19). En effet, seul le commandeur semblait disposer du privilège d'une chambre particulière (20).

Fig. 1. — Plan topographique du secteur de la commanderie du Temple, de l'antiquité tardive au XIVe siècle
Chapelle templière d'Avignon — Trace supposée de l'enceinte de repli du bas-empire
Chapelle templière d'Avignon — Trace supposée des enceintes du XIIe et XIIIe siècle
Chapelle templière d'Avignon — Sorge à l'emplacement du béal de la première enceinte
Chapelle templière d'Avignon — Remparts du XIVe siècle
Chapelle templière d'Avignon — Nécropole de l'antiquité tardive
Chapelle templière d'Avignon — Cimetière médiéval
Chapelle templière d'Avignon — Livrée cardinatrice
Chapelle templière d'Avignon — Maisons du XIVe siècle, le chiffre se rapporte à la publication du terrier Anglic Grimoard par A.M. Hayez
Chapelle templière d'Avignon
Zones connues par des fouilles archéologiques
A : — Fouille de la rue Bouquerie en (1990)
B : — Fouilles autour de l'église Saint-Agricol (1977 — 1981)
C : — Sondage dans la cour de la préfecture (1955)
D : — Fouilles du garage Régina (1959)
E : — Fouilles de l'Oratoire (1991)
Chapelle templière d'Avignon


Une partie au moins des bâtiments possédait un étage puisqu'est mentionné le « solario domus templi avinionensis » (21). En 1307, c'est une cour attenante à la commanderie qui est citée (22). L'inventaire du 24 janvier 1308, effectué à la demande du pape dans toutes les commanderies templières du comté de Provence, énumère encore d'autres bâtiments à usage plutôt utilitaire : métairie, cellier, cuisine qui rappellent la vocation essentiellement agricole de la Maison, ainsi qu'une salle d'habitation (23). Il est vraisemblable d'imaginer plusieurs ailes de bâtiments disposées autour d'une cour. Celles-ci devaient se situer au nord de la chapelle après qu'elle fut édifiée. Cela paraît être en effet le seul endroit possible puisque des maisons confrontaient la chapelle au sud et à l'est au XIVe siècle (24), (fig. 1).
L'époque est certes assez tardive, mais les limites de la commanderie ne devaient pas avoir variées depuis son origine. Cette disposition intérieure est hypothétique, mais elle correspond assez à ce que l'on retrouvera à l'époque moderne où la disposition médiévale a pu perdurer et à ce que l'on connaît pour d'autres commanderies. A Jalès, en Ardèche, les bâtiments sont réunis autour d'une cour centrale et la chapelle se trouve également au sud (25). A Sainte-Eulalie de Cernon, dans le Larzac, la disposition correspond encore à un quadrilatère autour d'une cour avec l'église au nord...

La Maison d'Avignon était-t-elle entourée d'une enceinte ?
Sa position à proximité du premier rempart du XIIe siècle — peut-être même n'existait-il pas encore lors de l'installation du Temple ? — pouvait la rendre vulnérable, et ce d'autant plus que la ville connut une histoire assez mouvementée au XIIIe siècle (siège de Louis VIII en 1226, lutte aux côtés du comte de Toulouse, rébellion contre Charles Ier d'Anjou). Ceci aurait pu justifier la construction d'éléments de fortification dont sont d'ailleurs pourvues de nombreuses commanderies. Ces éléments existent à l'époque moderne (26), mais sont-ils toujours représentatifs de l'état médiéval ?

Les sources du XIVe siècle nous éclairent également davantage sur l'emplacement précis de la commanderie, désormais passée aux Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem. Celle-ci était située dans un îlot délimité par les actuelles rues Saint-Agricol, où se trouvait son entrée (27), au nord, Félix-Gras à l'ouest (28), Bouquerie à l'est, et par une traverse qui n'existe plus au sud (29), (fig. 1). Il est probable que la disposition de la voirie soit héritée au moins des XIIe-XIIIe siècles, le cadastre dans cette partie-ci de la paroisse ayant été peu affecté par la reconstitution du tissu urbain consécutif à l'installation de la papauté...

La commanderie sous les Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem
Les événements qui provoquèrent la chute du Temple sont connus : les 23 et 24 janvier 1308, les templiers du comté de Provence sont arrêtés sur ordre de Charles II et leurs biens séquestrés. A Avignon, un certain Pierre Baraillier est nommé séquestre (30) et continue à administrer les biens de la commanderie (31). Comme tous les biens des templiers et conformément à la bulle « Ad providam Christi » (1312), la commanderie est dévolue à l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem. Le transfert de la Maison du Temple à l'Hôpital paraît s'être déroulé sans problèmes — ce qui en Provence ne fut pas le cas partout — puisque les nouveaux propriétaires des lieux semblent connus assez tôt dans le voisinage. Ainsi, dès 1316 un texte fait allusion à la transversia retro ecclesiam templariorum quondam, nunc vero Hospitalorium Sancti Joannis Jerosolymitani » (32). Cependant, rien n'indique que les hospitaliers y résidaient déjà. En 1321, lors de l'érection de l'église paroissiale Saint-Agricol en collégiale, Jean XXII concède à sa nouvelle fondation deux cloches et le bois d'oeuvre du choeur de la chapelle des templiers (33).

Dans ces conditions, il est difficile de penser que les religieux de l'Hôpital occupaient alors la commanderie.
Il semble en effet que ces derniers n'aient quitté leur ancienne Maison qu'aux alentours de 1330 à la suite d'un litige avec le prieur de l'église Saint-Pierre, leur paroisse de résidence (34).
En 1342, un texte apporte la confirmation de la présence des hospitaliers dans les murs de l'ancienne propriété du Temple. Une lettre de Clément VI mentionne en effet « l'hôtel contigu à l'église qu'occupent les frères de l'Hôpital et qui appartenait autrefois à l'ordre du Temple » (35). Cet acte, qui interdisait toute réquisition de l'église et de la maison attenante, garantissait qu'aucun cardinal ne pouvait établir sa livrée dans la nouvelle propriété des hospitaliers. Les frères s'étaient plaint en effet que certains des leurs, ainsi que des visiteurs qu'ils recevaient, avaient été molestés à plusieurs reprises par des assignataires et des gens de la curie. On se doute bien que, pour motiver l'intervention du pape, les hospitaliers durent être confrontés à quelques clercs peu scrupuleux en quête de résidence à un moment où le gonflement de la population consécutif à l'arrivée de la papauté entraînait une sérieuse pénurie de logements.

Mais au lieu de penser, comme le veut la tradition érudite, que la commanderie fut un temps affectée en tant que livrée, peut-être faut-il plutôt se demander si elle ne put simplement servir de logis entre 1309 (arrivée de Clément V à Avignon) et 1330 à quelques personnages importants qui auraient vu d'un mauvais oeil sa restitution.

La commanderie sous les hospitaliers de Saint-Jean ne semble pas avoir connu un essor particulier, ce qui peut paraître étonnant si l'on songe aux liens forts qui unissaient la papauté à l'ordre (36). Malgré l'importance centrale que revêtait la nouvelle capitale de la chrétienté pour l'Hôpital — centre de collecte des responsiones et lieu de réunion des dignitaires avec le pape — l'effectif de la préceptorie était représentatif d'une commanderie provençale d'importance moyenne (37). Du point de vue monumental, les hospitaliers, comme souvent ailleurs, paraissent s'être contentés des bâtiments légués par le Temple (38), alors que presque tous les établissements religieux de la ville faisaient l'objet de reconstructions sous l'impulsion des grands prélats. Par la suite, les catastrophes de la deuxième moitié du XIVe siècle causèrent bien des difficultés à l'ordre. La peste et le passage des grandes compagnies provoquèrent un abandon des cultures de la part des tenanciers et des dégâts matériels (39) qui furent la cause de sérieux problèmes financiers pour l'Hôpital, contraint d'arrenter certains des membres annexes de la commanderie. La crise de recrutement commune à tout l'ordre ne semble pas atteindre tout de suite la Maison d'Avignon. Cependant, si en 1373, l'effectif de quinze religieux est encore l'un des plus importants des commanderies du Grand Prieuré, et s'il reste encore cinq chapelains pour desservir les églises sous la juridiction de l'ordre, un seul frère sergent réside en ville, tandis que les sept autres se répartissent dans les membres annexes (40). Il est difficile dans ces conditions de parler de vie commune. Si les enquêteurs dénombrent encore une dizaine de frères et trois donats en 1411, bien peu semblent résider dans les maisons de l'ordre (41).

Le commandeur lui-même a déserté la préceptorie qu'un frère est chargé de régir (42). Finalement, la maison-mère elle-même en vient à être arrentée. Le premier acte d'arrentement conservé intervient en 1443 (43). Le précepteur Marat Hugolin avec l'assentiment de Bertrand d'Arpajon, prieur de Saint-Gilles-du-Gard, arrente la commanderie avec toutes ses dépendances à deux seigneurs. Ces derniers s'engagent à entretenir un sacristain, à verser les « responsiones » au trésorier de l'ordre et à effectuer les réparations nécessaires à la maison et à l'église de la commanderie.

En 1461, le précepteur donne la commanderie avec presque tous ses membres pendant trois ans pour 1.200 florins à deux marchands et au commandeur de Saint-Pierre-en-Vers sous les mêmes conditions : payer chaque année 65 florins au trésorier de Rhodes et entretenir quatre chapelains pour le service de l'église (44). Malgré la désertion de la commanderie par les frères, leur église continue donc à être desservie. En 1495, quatre chapelains sont chargés de dire la messe quotidiennement, mais en l'absence de sacristain, c'est un prêtre de l'église Saint-Agricol qui aide au service de la chapelle contre une rente. La commanderie est toujours régie par un rentier-fermier et le commandeur dispose de cens et de rentes sur plusieurs terres pour assurer sa subsistance tandis que les prêtres-desservants de l'ordre ont une pension fixe (45). A cette date, on ne sait s'ils résidaient dans la commanderie, mais il est sûr en revanche qu'aucun religieux n'y demeure continuellement en 1504 (46).

En cette fin de Moyen Age, la situation de l'Hôpital de Saint-Jean à Avignon reflète donc tout à fait celle de l'ordre entier. Miné par les problèmes économiques, victime de l'abandon de l'idée de croisade, celui-ci connaît une crise de recrutement et une crise morale et se désintéresse de la gestion de ses biens. A cette époque se met en place le mode d'organisation qui régira désormais hommes et biens jusqu'à la Révolution.

Les bâtiments sous les chevaliers de Malte
Les sources écrites ne nous apprennent rien sur l'organisation et l'état des bâtiments de la commanderie durant leur occupation par les hospitaliers. Dans quel état est la commanderie lorsqu'en 1443, les locataires s'engagent à y effectuer les réparations nécessaires ?
Rien ne permet de le dire avant 1495 où une partie de la maison paraît être laissée dans un état de ruine avancé (47). En 1504, un inventaire des meubles (48) donne quelques mentions de pièces (une grande chambre avec une plus petite derrière, une chambre qui donne sur une cour, et trois autres pièces), tandis que l'inventaire suivant (49), daté de 1509, fait allusion à un nombre de pièces beaucoup plus important.

La commanderie paraît alors composée de sept salles au rez-de-chaussée et de quatre à l'étage.
La salle basse de la sacristie et l'église sont aussi citées, ainsi qu'une chambre récemment construire qui donne du côté de l'église Saint-Agricol.
En 1541, lorsqu'on procède à un nouvel inventaire, un cellier et une cuisine sont mentionnés (50).

La maison semble vide de meubles, était-elle alors inhabitée ?
Les renseignements sont donc modestes. Ces bâtiments correspondent-ils toujours à la commanderie du Temple ?
Quelles ont pu être les modifications apportées par les hospitaliers ou leurs locataires ?
On se heurte là encore à la ténuité des sources qui n'apportent pas de renseignements précis avant le XVIIe siècle. A partir de cette époque, les procès-verbaux de visites générales du Grand Prieuré apportent enfin de précieux renseignements sur la composition et l'état des bâtiments. Ces visites, ordonnées par le Grand Prieur de Saint-Gilles, qui paraissent occasionnelles à la fin du Moyen Age, deviennent beaucoup plus régulières à partir de la fin du XVIe siècle (51). Destinées à vérifier la gestion et les moeurs du personnel des maisons de l'ordre, la conformité du culte divin, la liste et les revenus des possessions ainsi que l'état des bâtiments domestiques et religieux, celles-ci fournissent une vision quasi photographique de la vie de la commanderie.

Elle se compose alors de deux corps de bâtiment qui ont chacun une entrée indépendante sur la rue Saint-Agricol.

La maison dite du sacristain (B), située au nord de la chapelle (C), comprend deux pièces à vocation utilitaire ouvertes sur une cour au rez-de-chaussée, deux étages et un grenier. Une cour située au chevet de l'église et un jardin dans son prolongement font également partie de la collation du sacristain.

Le corps de logis appelé communément « Maison de la commanderie » (A) occupe l'angle des rues Saint-Agricol et Sainte-Praxède (actuelle rue Félix-Gras).
Le rez-de-chaussée comporte une dizaine de pièces, la plupart à usage matériel (cuisines, celliers, écuries...), mais comprend aussi les chambres dites des domestiques ainsi que deux grandes et belles pièces avec plafonds à la française et cheminées. Les deux étages abritent chambres à coucher et salons desservis par des corridors. La distribution des pièces se fait par un escalier en vis situé dans une tour. Il permet l'accès aux étages ainsi qu'au grenier, est ouvert sur un jardin et sur les deux couloirs qui distribuent les salles au rez-de-chaussée et descend jusqu'aux caves. De cette maison, on accède aussi facilement à la chapelle : certaines pièces ouvrent sur une tourelle à l'angle sud-ouest de l'édifice qui dessert une tribune haute ainsi que le clocher (52), alors qu'un corridor permettait l'accès à une tribune basse ouverte sur le vaisseau de l'église.

Plan de la commanderie

Chapelle templière d'Avignon
FIG. 2. — PLAN DE LA COMMANDERIE DE SAINT-JEAN-DE-RHODES EN 1742-1745


L'agencement de la Maison ne connaîtra aucune modification d'importance jusqu'à la Révolution. La première description précise, qui remonte à 1613, concorde en effet avec un plan daté de 1742-1745 (53) et avec les procès-verbaux de visites ultérieures.
Ces bâtiments devaient-ils encore quelque chose à l'époque médiévale ?
Certains aspects pourraient permettre d'envisager l'hypothèse d'une reconstruction partielle ou totale. Le nombre de pièces mentionnées par les documents antérieurs (une quinzaine tout au plus) paraît bien loin de celui atteint au XVIIe siècle.
Certains éléments architecturaux évoqués dans les visites, comme les nombreuses salles munies d'une cheminée, les plafonds à la française ou les fenêtres à meneau, plaident peu pour une attribution à une période antérieure à la Renaissance. Cependant, la disposition des bâtiments autour d'un espace central, l'impression d'un édifice finalement peu ouvert sur l'extérieur, la présence d'une tour, assez remarquable pour figurer sur un plan de la ville daté de 1630 (54), ainsi que les éléments de défense ne pourraient-ils pas évoquer une conception antérieure ?

En fait, la commanderie n'a pu être agrandie que progressivement par l'ajout de nouvelles pièces comme en témoignerait en 1509 la mention d'une « caméra nova » (55) ou la construction en 1595 « d'une petite chambre à la basse-court » (56). Le gros oeuvre hérité des templiers n'a donc été remanié que par l'ajout d'éléments au goût de l'époque.

Les hospitaliers, passé le marasme du bas Moyen Age, ont donc pu se contenter de restaurer les bâtiments qui paraissent dégradés à la fin du XVe siècle. Ces solutions économiques peuvent en effet paraître assez appropriées à la situation de l'ordre à Avignon qui ne devait pas disposer d'importants moyens financiers. De plus, on voit assez mal les Hospitaliers rebâtir complètement une commanderie qu'ils n'habitaient plus et dont l'apport de revenus au commandeur était l'unique fonction. Ce type de composition à plan centré, fermée sur la rue et dont les étages sont distribués par une tour n'en reflète pas moins l'architecture de certains hôtels urbains provençaux de l'époque, au nombre desquels on peut citer les trois hôtels arlésiens reconstruits au XVIe siècle par les chevaliers de Malte.

Dans ce contexte, la présence d'éléments fortifiés n'est pas forcément attribuable non plus à un état ancien des bâtiments : ces trois maisons arlésiennes offrent également un aspect de tradition médiévale ; créneaux, chemin de ronde et mâchicoulis n'ont qu'une valeur ostentatoire et décorative et sont tout à fait inaptes à la fonction défensive (57).

La commanderie sous l'Ancien Régime demeure tout aussi vide de religieux. Les commandeurs, à l'exception de certains qui durent avoir une vie particulièrement édifiante, n'y résident plus depuis longtemps et ont pris l'habitude de louer leur maison (58). Les chapelains de l'ordre, bien que censés être astreints à résidence, ne se font pas remarquer pour leur assiduité non plus !

Mieux, certains d'entre eux louent leur demeure à des laïcs, à l'encontre des prescriptions de la règle de l'ordre (59).
Ils se sont déchargés du service divin sur des clercs séculiers nommés par le commandeur (60), si bien que les enquêteurs ne peuvent que déplorer l'écart entre les devoirs des chapelains et le service réel de la chapelle qui semble bien négligé (61). Bien loin de leur vocation d'origine, ces chevaliers de Malte allaient être durement frappés par les événements révolutionnaires...

Les bâtiments de la Révolution à la destruction
Conformément au décret de la Convention du 19 septembre 1792 prescrivant la vente comme biens nationaux des biens de l'ordre de Malte, et malgré l'opposition du sacristain Joseph Morenas (62), on procéda presque aussitôt à l'évaluation des possessions de l'ordre en Avignon en vue de leur séquestration. Le 2 avril 1793, la commanderie est finalement vendue dans sa totalité à un particulier (63). Cette attribution lui sera fatale... En 1824-1825, une expertise des lieux effectuée à la suite d'un litige laisse apparaître un grand état de délabrement (64).

Par la suite, la commanderie est séparée en deux lots allant à des propriétaires différents, l'un (fig. 2, B + C) regroupe l'ancienne sacristie et la chapelle et sert désormais d'auberge, l'autre (A) correspond à l'ancienne maison du commandeur (65).

En 1834, le premier lot — d'ailleurs toujours connu sous le nom de « Saint-Jean-de-Rhodes » — abrite « l'Hôtel du Pont » mais paraît dans un état de dégradation avancé (66). On imagine que l'autre lot se trouvait dans un état semblable et c'est probablement ce qui en 1837 décida ses propriétaires à reconstruire les parcelles correspondant au corps A de la commanderie (67).
L'autre partie du couvent n'allait pas tarder à connaître le même sort : en 1862, les parcelles correspondant au corps B apparaissent reconstruites dans le tableau des matrices de propriétés du cadastre (68). Ces diverses reconstructions correspondent au bâtiment qui existe actuellement sous le nom « d'Hôtel du Louvre ». Seule l'ancienne chapelle templière échappa à ce triste sort.

II. — La chapelle templière : Un jalon dans l'architecture gothique provençale

Circonstances de l'érection et datation

Chapelle templière d'Avignon
Figure 3

Le 13 septembre 1273, Ronselin de Fos, Grand Maître de l'ordre du Temple en Provence, délègue le frère Guillaume de Saint-Jean pour négocier avec l'évêque, le prévôt et le chapitre d'Avignon au sujet d'une chapelle que le haut dignitaire du Temple a l'intention d'édifier dans la paroisse Saint-Agricol. Après de multiples tractations, au cours desquelles interviennent le chapitre et le recteur de l'église Saint-Agricol, l'évêque Robert II d'Uzès autorise finalement les templiers à bâtir leur chapelle avec un cimetière et prend soin de réglementer les droits de « mortuage et de legs » (69). Cette autorisation tardive, alors que le droit d'élever ses propres oratoires avait été reconnu dès 1139 à l'ensemble de l'ordre (70), va dans le sens de ce qui a été dit plus haut sur la lente intégration du Temple dans la cité. Les hospitaliers avaient acquis ce droit à Avignon dès 1199 (71). Ailleurs, à Saint-Paul-Trois-Châteaux, à Richerenches, ou à Roaix, les templiers avaient obtenu ce privilège dès leur arrivée (72).

Arcs de vaisseau

Chapelle templière d'Avignon
Fig. 4. — Départ des arcs du vaisseau au-dessu d'un châpiteau du vaisseau.

En 1281, en tout cas, cette chapelle est mentionnée pour la première fois sous le vocable de Notre-Dame-de-Bethléem dans le testament d'un certain Girarde Levenières qui souhaite être inhumé dans le cimetière attenant (73). Cette « ecclesia templi », par la suite encore souvent mentionnée, correspond-elle à l'édifice qui existe encore actuellement ?

Etat actuel de l'édifice
Cette chapelle dans son état actuel fait peine à voir tant elle a subi les avanies du temps. Transformée en écurie au temps de l'Hôtel du Pont, les baies gothiques en partie murées, les murs percés de nouveaux accès, ses belles proportions masquées par l'ajout d'un plancher en bois, elle finit d'être mutilée à l'extérieur par la construction de l'Hôtel du Louvre. Elle fut sauvée de la démolition qui l'attendait probablement par l'intervention du félibre Anselme Mathieu, devenu gérant de l'hôtel en 1875, qui entreprit de réhabiliter l'étage et de le convertir en salle de restaurant. Tandis que le rez-de-chaussée restait voué à la fonction de débarras, l'étage allait connaître un renouveau : le félibre fit déboucher les fenêtres d'origine pour y poser des vitraux, refaire entièrement les remplages de la grande baie du chevet (fig. 15) et repeindre le tout en couleur dorée (74) !

Plan et élévation intérieure

Chapelle templière d'Avignon
Fig. 5. — La tribune fermée sur le vaisseau

Le plan de cette chapelle (fig. 3) se résume à un simple vaisseau rectangulaire, long de 23,80 m et large de 8 m, divisé en quatre travées barlongues de longueur à peu près égales, et terminé par un chevet plat. Une tourelle d'angle à cinq pans est accolée au sud-ouest de l'édifice. Le voûtement est constitué de croisées d'ogives quadripartites dont les nervures retombent, par l'intermédiaire de triples chapiteaux à tailloirs polygonaux débordants, sur des piliers de trois colonnes groupées, séparées entre elles par de larges gorges (fig. 4). Aux extrémités est et ouest du vaisseau, les nervures retombent sur de simples colonnes d'angle, à bases polygonales, surmontées d'un seul chapiteau. Les bases des triples colonnes de la nef ne sont pas visibles car le sol actuel a été surélevé d'1 m par rapport au niveau originel. Elles doivent cependant présenter le même profil octogonal, comme le laisse entrevoir un sondage entrepris il y a une quinzaine d'années (75). Les doubleaux forment un arc brisé surbaissé dont le profil assez complexe est constitué par un tore à listel entre deux gorges et deux tores, auxquels succèdent encore quatre gorges séparées par un filet et deux autres tores. Les ogives, qui pénètrent entre les doubleaux et les formerets justes avant leur retombée sur le tailloir (fig. 4), sont moulurées d'un tore à listel entre deux gorges et deux tores. Les clés de voûte, situées à 14,70 m par rapport au sol d'origine, sont ornées d'une couronne de feuillages et renforcées par des motifs sculptés anthropomorphes (cf. infra). Un cordon mouluré court sur le pourtour de l'édifice, au départ des fenêtres qui éclairent chaque travée, à 4 m du sol d'origine, rythmant ainsi l'élévation.

La première travée renferme une tribune (fig. 5) soutenue par une voûte d'ogives dont les nervures retombent, à partir d'une clé armoriée d'un fer de lance située à 7,40 m du sol d'origine, sur des colonnes adossées aux piliers supportant les arcs du voûtement de la nef. Les nervures diagonales sont profilées d'un tore à listel entre quatre tores séparés par deux gorges. L'arc brisé surbaissé porteur de la cloison qui ferme la tribune sur la nef comprend deux assises de claveaux, l'une moulurée d'un tore à listel entre deux gorges et deux tores, l'autre de quatre tores séparés par deux gorges. Les nervures retombent sur un groupe de trois chapiteaux (fig. 3, 2.N, 2.S) dont la corbeille nue est seulement décorée de deux tores semi-circulaires sans qu'il y ait vraiment de tailloir, l'astragale formant aussi un simple anneau. Les chapiteaux des colonnes d'angle (fig. 3, l.N, l.S) présentent un seul rang de feuillage assez touffu, séparé de l'astragale en anneau par un gorgerin laissé nu. Les tailloirs polygonaux, formés de trois tores en ressaut de taille décroissante séparés par des gorges, s'apparentent assez à ceux de la nef. La pièce haute ouvre sur l'escalier en vis de la tourelle d'angle par une porte en plein cintre et prend jour sur le vaisseau par une fenêtre en arc segmentaire. Son installation a entraîné la condamnation des baies nord et sud éclairant la travée à l'origine, mais probablement aussi celle d'une vaste rose ouverte sur la façade occidentale.

Clé II et III

 
FIG. 6. — MOTIF OCCIDENTE DE LA CLE III     FIG. 7. — MOTIF OCCIDENTE DE LA CLE II

A quand remonte l'édification de cette tribune qui ne fut à l'évidence pas prévue dès l'origine ?
En 1308, la mention d'un solarium renfermant les archives de la commanderie atteste la présence d'un étage à l'intérieur même de l'édifice (76).

Hélas, rien ne prouve qu'il s'agisse de la construction qui existe encore, le terme évoquant effectivement un niveau supérieur mais le plus souvent en bois. L'attribution de cette tribune au XIVe siècle n'est cependant pas improbable si l'on se réfère à des critères stylistiques comparables. Les chapiteaux (fig. 3, l.N et l.S) présentent ainsi les mêmes caractéristiques que ceux de l'actuelle sacristie, datée du XIVe siècle, de l'église Saint-Jean-de-Malte à Aix-en-Provence. Même s'ils se rencontrent habituellement plus tardivement dans le XIVe siècle (77), il ne semble pas invraisemblable d'attribuer les chapiteaux à corbeille nue simplement délimitée par deux bagues parallèles (2.N, 2.S) au début de ce siècle.

Les éléments sculptés

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Fig. 8. — Clée de travée I

Les motifs qui prolongent les clés feuillagées sont dignes d'intérêt.
Celui de la travée du choeur représente un ange tourné vers l'ouest, les ailes déployées, tenant un phylactère de la main gauche et pointant l'index droit.
Les clés des travées III et II présentent chacune deux figures, l'une tournée vers l'ouest et l'autre vers l'est. Le motif occidenté de la clé III (fig. 6) est identique à celui du choeur, tandis que le motif orienté représente un ange les mains jointes en signe de prière.
La clé II montre à l'ouest un personnage soufflant dans une trompe d'appel qui semble surgir de la couronne feuillagée à la rencontre des deux arcs diagonaux (fig. 7). Du côté est, un personnage, également dépourvus d'ailes, semble tenir un rouleau.
Dans la première travée, la couronne végétale est remplacée par un Christ en majesté derrière lequel surgit un ange (fig. 8).
Ces sculptures, qui présentent une grande finesse dans le traitement des visages et des plis des tuniques, semblent ne rien devoir au milieu local ni au fond de la sculpture romane (78). Cette façon de renforcer les clés rappelle un procédé bien établi dans le domaine septentrional à partir de la deuxième moitié du XIIe siècle. Au siècle suivant se développe cette tradition des têtes sculptées placées dans les angles formés par la rencontre des ogives à Paris (Notre-Dame, Sainte-Chapelle...) et dans de nombreux édifices du domaine royal (79). En Provence, on connaît un exemple précoce de ce procédé à l'église Notre-Dame-du-Thor, mentionnée en 1202, où la clé de voûte de l'abside est élargie par un motif en étoile (80). On retrouve pour la première fois l'adoption de motifs anthropomorphes dans une fondation directement inspirée de l'art du Nord, aux travées du choeur de la basilique de Saint-Maximin (1296-1316). Au XIVe siècle, on observe des éléments comparables à la cathédrale Saint-Sauveur à Aix, pour laquelle des influences étrangères transparaissent également, et à Avignon à la chapelle de Tous-les-Saints rajoutée en 1322 au sud de la cathédrale Notre-Dame-des-Doms.

La chapelle des Templiers présenterait donc le premier exemple connu en Provence de ces bustes se dressant à la croisée des ogives, qui semblent directement faire référence au domaine francilien où le thème de l'ange comme des Christ bénissant sont courants (81).

Les chapiteaux, quant à eux, présentent des corbeilles dont le décor s'organise en deux rangs bien individualisés de motifs floraux tous différents. Ils peuvent se présenter sous la forme de petits bouquets nettement différenciés laissant une grande partie de la corbeille nue (fig. 9), avoir l'aspect de grosses feuilles grasses isolées ou montrer un aspect nettement plus touffu (fig. 10).

Chapiteaux




FIG — 9 — CHAPITEAU 3.N — FIG — 10 — CHAPITEAU 4.N — FIG — 11 — CHAPITEAU 4.S

Un exemplaire présente des crochets (fig. 11), également organisés en deux registres, à l'extrémité desquels surgissent des groupes de trois feuilles à trois corolles. On pourrait considérer comme archaïsant ce type de traitement, qui tend à disparaître dans le domaine de l'Ile-de-France dans le troisième quart du XIIIe siècle, où il ne subsiste plus que sous une forme dégénérée (82), et qui est représenté ici dans son plein développement. On ne saurait pour autant attribuer les différences stylistiques qui caractérisent ces chapiteaux à diverses étapes du chantier. Celui-ci a dû en effet se dérouler relativement rapidement compte tenu de l'importance moyenne de l'édifice et du fait qu'aucun signe de rupture n'a pu être décelé sur les parements tant intérieurs qu'extérieurs (83). Il semble donc que l'on puisse attribuer la diversité des traitements à la présence de plusieurs sculpteurs porteurs d'un style propre à chacun.

Les tailloirs polygonaux possèdent un large rebord à profil semi-circulaire à neuf pans séparé par une gorge d'un autre rebond à profil semi-circulaire à onze pans (fig. 10).

Ces tailloirs massifs, archaïques dans le sens où ils créent une rupture visuelle entre les nervures et les piliers qui sont censés les prolonger, sont tout à fait comparables à ceux de l'église hospitalière aixoise de Saint-Jean-de-Malte (fig. 12).

Le traitement des corbeilles est également assez proche. On y retrouve cette double rangée de végétaux aux bouquets bien individualisés, avec ces feuilles à la découpe bien accentuée ou ces grasses corolles qui pointent vers le bas. Ces ensembles de chapiteaux semblent représentatifs de la « flore naturaliste » qui apparaît en Ile-de-France dans le troisième tiers du XIIIe siècle (84). Les tailloirs polygonaux se retrouvent également dans le domaine royal ou encore en Bourgogne.

L'ordonnance extérieure

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FIG. 12. — Saint-Jean-de-Malte, supports du vaisseau

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FIG. 13. — Façade méridionale

Les façades latérales sont rythmées par de profonds contreforts au droit des supports intérieurs, reliés entre eux par de massifs arcs en plein cintre (fig. 13) qui supportaient un chemin de ronde. Les arcs bandés entre les contreforts sont abondamment utilisés en Languedoc au XIIe siècle et perdurent au XIIIe siècle sur des édifices dont les églises toulousaines des ordres mendiants demeurent les exemples-type.
En Provence, ce procédé est plus rarement utilisé : on le retrouve sur un bâtiment de la commanderie templière de Richerenches (fin XIIe ou début XIIIe siècle) et au XIIIe siècle à la cathédrale d'Aix. Il survivra au Palais des papes au XIVe siècle, où il apparaît comme un archaïsme, ainsi que dans bon nombre de petites églises fortifiées lors des troubles du bas Moyen Age. Il paraît significatif de rencontrer ces arcs sur un édifice fondé par un ordre militaire, même s'ils ne doivent plus avoir ici aucune fonction défensive, puisque les mâchicoulis souvent laissés entre les murs « goutterots » et les arceaux sont ici absents. Il faut donc y voir une volonté ostentatoire à l'instar du parti de beaucoup d'églises languedociennes du XIIIe siècle, où ces « souvenirs de fortification » cèdent le pas aux préoccupations décoratives (85). Les contreforts se terminaient originellement en glacis et venaient buter contre le parapet du chemin de ronde. Ceux qui sont situés aux angles de l'édifice étaient à l'origine surmontés de pinacles dont seules les bases subsistent.

La tourelle d'angle, dont l'éclairage intérieur n'est constitué que de trois archères à double ébrasement situées au sud, contribue encore à l'aspect militaire de l'édifice. Elle était à l'origine couverte d'une flèche (86) et devait vraisemblablement recevoir le clocher de la chapelle (87).

Les ouvertures
Les fenêtres du vaisseau, qui à l'intérieur montent jusqu'aux formerets, sont divisées en deux lancettes terminées par un arc trilobé, les écoinçons ajourés, le tout surmonté d'un quatre-feuilles. Les meneaux sont de fines colonnettes à bases polygonales, sans chapiteau, avec un simple anneau au départ des arcs trilobés (fig. 14).

Cette forme de remplage est tout à fait caractéristique du style gothique rayonnant à la mode en Ile-de-France dans les années 1250. La baie axiale du chevet (fig. 15) ne conserve plus grand chose de son état d'origine (88), mais ses dimensions sont assez exceptionnelles dans une région où la plupart des églises gothiques gardent des ouvertures restreintes, même au chevet. La façade occidentale (fig. 16) était à l'origine ouverte par une vaste rose de 5 m de diamètre, dont le contour était souligné dans la moitié supérieure par un demi-cercle mouluré qui retombait sur de petits culots sculptés. Le remplage, abîmé par de récentes ouvertures, était composé d'une série de six oculi, avec un quatre-feuilles inscrit dans chacun d'eux, entourant vraisemblablement un oculus central. Là encore, les comparaisons locales ne sont pas aisées, mais on peut remarquer l'audace de cette vaste ouverture par rapport aux roses des églises avignonnaises du XIVe siècle.

Le portail principal s'ouvre au nord dans la deuxième travée. A l'intérieur, les piédroits sont moulurés d'une fine colonnette encadrée de deux baguettes et de deux gorges et ce profil est repris par l'arc segmentaire de couvrement. L'ornementation de cette ouverture est encore enrichie par un encadrement mouluré qui rejoint le cordon courant le long du mur. Le tout est surmonté d'un arc de décharge selon un procédé bien connu en Provence. L'extérieur est aujourd'hui complètement mutilé. A l'origine couverte par un arc brisé et subdivisée par un trumeau (89), cette entrée adopte des ébrasements dont la modénature (une colonnette encadrée de deux baguettes entre deux gorges et deux petits tores, chaque colonnette étant ornée d'un fin chapiteau à feuillage) se répète sur chacun des quatre ressauts. Un porche ménagé entre les contreforts, agrémenté de chaque côté d'une colonnette à chapiteau feuillage et probablement couvert d'un arc brisé, précédait ce portail. Sous ce porche avaient été aménagées des niches décorées d'une arcature trilobée qui accueillaient des statues sous un dais, tout comme le trumeau du portail (90). Un second portail (fig. 16), à l'origine ouvert sur la façade occidentale, mais condamné à l'époque moderne, s'apparente à l'entrée principale par son agencement et la modénature des piédroits, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.

Tradition, innovation et postérité de la chapelle des templiers
L'édifice présente certains traits qui apparaissent comme des concessions à l'art méridional, ainsi la muralité rendue par ces murs massifs d'un mètre d'épaisseur, ces profonds contreforts et ces solides arcs bandés.

Baie sud de la troisième travée

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FIG. 14. — Baie sud de la troisième travée

Le chevet avec sa baie axiale

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FIG. 15. — Le chevet avec sa baie axiale

A l'intérieur, la simplicité des supports, où l'idée de prolonger le profil des arcs qui portent la voûte jusqu'au sol n'apparaît pas encore, est loin des tendances contemporaines en Ile-de-France. L'effet de verticalité est encore gêné par ces épais tailloirs débordants, même si la hauteur des voûtes, proportionnée à la largeur du vaisseau, donne à l'élévation un élan peu commun parmi les monuments provençaux. La simplicité de la modénature des portails, seulement profilés de boudins, peut encore relever du même esprit méridional. De même, le remplage de la rose occidentale est bien loin des formes composées de colonnettes rayonnant autour du centre, alors habituelles dans le domaine francilien. Cependant, bien des traits semblent encore étrangers à la région, depuis le profil des nervures qui s'interpénètrent avant leur retombée sur le tailloir, ou encore le traitement des sculptures, jusqu'aux baies qui constituent un apport de lumière inhabituel dans les monuments régionaux. Si la nef unique semble directement faire référence à l'architecture gothique méridionale, ce type de plan se retrouve largement dans les régions septentrionales, car il répond aux nécessités d'une communauté monastique modeste. La présence de ces divers éléments, qui se développent au même moment dans le domaine français, corroborent en tout cas la datation de Notre-Dame de Bethléem fournie par les textes.

Pourtant cet édifice qui, à une époque précoce pour la région, porte la marque d'un style déjà abouti, ne semble pas y avoir laissé de postérité. En effet, les églises avignonnaises présenteront au XIVe siècle des aspects typiquement méridionaux : prédominance de la muralité, étroitesse des ouvertures, traitement relativement grossier des remplages, absence de recherche de verticalité...

Le relatif isolement de la chapelle des templiers nous amène donc à nous interroger sur sa ressemblance avec l'église hospitalière de Saint-Jean de Malte à Aix. Si l'on fait abstraction de la présence à Aix d'un transept, d'un clocher-porche et de dimensions beaucoup plus imposantes justifiées par une communauté religieuse plus importante, les deux monuments paraissent proches. Ainsi le plan, les supports qui se ressemblent, de la base octogonale aux chapiteaux en passant par les triples colonnes, les remplages des fenêtres qui partent d'un cordon mouluréeacute; à l'intérieur, le principe de la vaste baie orientale sur un chevet plat, les clés de voûte ou encore le profil des ogives, sont à bien des titres comparables. A l'extérieur encore, les contreforts surmontés de pinacles, le principe du chemin de ronde, jusqu'aux détails comme les pans coupés en trompe à l'angle des murs et des contreforts ou bien la mouluration entourant la rosé occidentale présentent bien des airs de parenté (91) !

Elévation

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FIG. 16. — Elévation de la façade ouest
(Relevé F. Chardon, Service archéologique du Conseil général du Vaucluse).

Bien des éléments troublants apparaissent donc, dont le moindre n'est pas la très probable contemporanéité des deux chantiers puisque l'église Saint-Jean-de-Malte fut reconstruite entre 1272 et 1277 à la demande de Charles Ier d'Anjou (92). Cette intervention comtale dans une fondation religieuse n'a rien d'étonnant; Charles Ier, à l'image de saint Louis, a également manifesté son pouvoir par une politique édilitaire, qui, bien que moins organisée et systématique que celle de son frère, n'en reflète pas moins un état d'esprit propre aux capétiens qui se perpétuera sous toute la dynastie angevine. La fondation de Saint-Jean-de-Malte par Charles Ier comme celle de la basilique de la Madeleine à Saint-Maximin par Charles II, participent donc du même esprit en introduisant en « terrain conquis » une architecture typiquement française.

« Terrain conquis », Avignon l'était aussi depuis sa soumission à Charles Ier et on a vu l'effet bénéfique que son arrivée a pu avoir sur les activités du Temple. N'est-il donc pas plausible d'envisager un lien entre l'avènement de l'Angevin et l'érection de la chapelle templière ?
On peut en effet se demander si l'influence politique du comte de Provence a pu se doubler d'une influence artistique perceptible sur cet édifice ?
Enfin, un maître d'oeuvre, si ce n'est français du moins pétri d'exemples français, ne fut-il pas commun aux deux chantiers d'Aix et d'Avignon ?

La chapelle au temps des hospitaliers
Les hospitaliers, installés dans l'ancienne église templière, ne semblent pas y avoir apporté de modifications importantes. Le seul ajout visible se résume à des peintures qui subsistent sur le parement du chevet de chaque côté de la baie axiale (fig. 15).

Elles s'organisaient sur deux registres, mais leur mauvais état de conservation ne permet de distinguer que deux saints en pied sous un décor d'arcature trilobée. L'assurance des traits, par exemple dans le pli des vêtements, et le décor architectural correspondent assez au style qui apparaît à Avignon dans la deuxième moitié ou le troisième quart du XIVe siècle (93).

Sous les chevaliers de Malte, les descriptions des procès-verbaux de visites donnent une idée assez précise du mobilier de l'église. En 1595, l'ornementation de la chapelle semble bien négligée, à l'image de l'autel qui apparaît comme pauvrement orné (94). Au début du XVIIe siècle, l'autel consacré à saint Jean-Baptiste apparaît, avec sa pierre sacrée en marbre enchâssée de bois, surmonté d'un retable représentant les deux saint Jean et la Vierge (95). Le sanctuaire semble nettement individualisé : en plus d'une clôture en bois, le choeur, aussi en menuiserie et composé de quarante stalles superposées, n'ouvre sur la nef que par des portes. L'interdiction du choeur aux fidèles revêt donc toujours une grande importance (96). Au milieu du siècle, ce dispositif paraît trop encombrant, on démonte donc les boiseries (97). Faut-il voir dans cette volonté de mieux mettre l'autel en valeur une décision tardivement inspirée de la réforme tridentine ?

En 1734 en tout cas, le nouvel autel, désormais « à la romaine » et surélevé, apparaît vraiment ostentatoire et tout à fait à la mode baroque dans son ornementation. Derrière lui, un escalier en pierre à deux rampes permet d'accéder à une niche en berceau où est exposé le Saint Sacrement (98). La nef comporte deux ou trois autels secondaires selon les époques, dont un au moins appartient à une confrérie de saint Jean-Baptiste (99), et une tribune charpentée ancrée dans le mur sous la tribune médiévale (100). On peut encore relever la présence d'un bénitier en bronze, de douze tableaux accrochés tout autour des murs, d'une chaire à prêcher, de confessionnaux (101) et de « diverses épitaphes enchâssées dans la muraille » (102). Du Temple aux Chevaliers de Malte, on a évoqué une commanderie à Avignon, son implantation, ses bâtiments et leur gestion jusqu'à leur destruction. Miraculeusement rescapée, la chapelle Notre-Dame de Bethléem apparaît comme un jalon relativement isolé dans l'histoire de l'architecture gothique provençale. Les aspects novateurs qu'elle revêt ainsi que sa ressemblance avec l'église Saint-Jean-de-Malte posent les problèmes, hélas insolubles pour l'instant, de ses influences et du rôle de la dynastie angevine dans l'introduction en Provence de formes inhabituelles au milieu méridional. Étant donné l'intérêt que présente en tout cas cette chapelle, il serait souhaitable de la voir enfin restaurée pour être montrée au public.
Sources : Damien Carraz — Une commanderie templière et sa chapelle en Avignon : Du temple aux chevaliers de Malte — Société Française d'Archéologie — Musée des Monuments Français — Tome 154 — Année 1996.

Notes
1. — L'édifice est englobé dans l'ancien Hôtel du Louvre, au n· 23 rue Saint-Agricol.
2. — La bibliographie se limite à l'étude déjà ancienne et assez succincte de J. Biarne, La chapelle des templiers d'Avignon, dans Annuaire des amis du palais des papes et des monuments d'Avignon, 1970, p. 27-38, et à quelques lignes chez R. Bailly, Les templiers. Réalités et mythes, Isle-sur-la-Sorgue, 1987, p. 102-104, et dans le C. A. F., L. H. Labande, Anciens couvents d'Avignon : les templiers, dans Congrès archéologique de France. Avignon, LXXVI' session, vol. 1, 1909, p. 31.
3. — II est question dans ce document d'une transaction entre le Temple et un certain Bertrand Matheron qui désire échanger la tasque qu'il possède sur un jardin appartenant à l'ordre contre un cens qu'il lui doit, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 56 H 5198. Acte également publié par E. Duprat, Notes et documents sur l'Ordre du Temple à Avignon, dans Annales d'Avignon et du Comtat Venaissin, 1914, p. 88-89.
4. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5193. Acte également publié par E. Duprat, op. cit., p. 91.
5. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5196.
6. — D. Le Blevec, L'Hôpital de Saint-Jean-de-Jérusalem à Avignon et dans le Comtat Venaissin, dans Actes du colloque du Banaux, 1983, p. 27-28.
7. — D. Le Blevec, Aux origines des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem : Gérard dit « Tenque » et l'établissement de l'Ordre dans le Midi, dans Annales du Midi, n· 132, 1977, p. 147-151.
8. — On mesure cette évolution par le nombre d'actes conservés dans le chartrier des templiers. Celui-ci renferme soixante et un rouleaux datés après 1251 contre treize seulement antérieurs à cette date, Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5193 à 56 H 5202.
9. — L. Stouff, Les hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem dans l'économie et la société arlésienne des XIVe et XV siècles, dans Provence historique, t. XLV, fasc. 179, 1995, p. 73.
10. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5197, en 1197, un acte est passé « in stari milicie avinioni ». En 1174 5 — 6 H 5198), la « domus milicie » était déjà citée, mais peut-être ce terme dénomme-t-il plutôt « l'institution du Temple », la « Maison » étant assimilée à l'ordre, que son lieu réel de résidence.
11. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5194 : achat d'une maison dans la paroisse Saint-Agricol confrontant à l'ouest la commanderie du Temple.
12. — E. Duprat, Notes et documents sur l'Ordre du Temple à Avignon, dans Annales d'Avignon et du Comtat Venaissin, 1914, p. 77.
13. — Notamment le terrier de l'évêque Anglic Grimoard qui, pour le bas Moyen Age, donne des renseignements inestimables sur la topographie urbaine, A. M. Hayez, « Le terrier avignonnais de l'évêque Anglic Grimoard » 1 — 366-1368), Paris, 1993.
14. — Cette directe et les terres qui en dépendent n'apparaissent pas dans les textes avant le XIIe siècle. En revanche, l'étendue de ces terrains est bien connue pour le XIVe siècle et certains étaient contigus à la commanderie, A. M. Hayez, op. cit., p. XXIII et p. 78-79.
15. — J.-L. Blaison, P. Bretagne, D. Carru, Avignon, rue Joseph-Vernet, dans Notes d'information et de liaison, Direction des Antiquités de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, juin 1989, p. 177.
16. — P. Pansier, Les rues d'Avignon au Moyen Age, dans Mémoires de l'Académie de Vaucluse, 2e série, t. XI, 1911, p. 316.
17. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5196.
18. — H. de Curzon, La règle du Temple, Paris, 1886, p. 33, art. n· 23.
19. — H. de Curzon, op. cit., p. 114, art. n· 145.
20. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5201.
21. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5197, 1273.
22. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5197.
23. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, B 437.
24. — Une maison appartenant à une riche famille marchande, les de Sade, confrontait le chevet de la chapelle de la commanderie. En 1364, en effet, Hugues de Sade lègue à son fils une maison dans la paroisse Saint-Agricol confrontant à l'est la maison du cardinal Guillaume de La Jugie, ou livrée de Poitiers, et à l'ouest la maison du Temple, bibliothèque municipale d'Avignon, ms 5609, fol. 787. Trois maisons confrontaient quant à elles la chapelle sur son côté méridional, A. M. Hayez, Le terrier avignonnais de l'évêque Anglic Grimoard, nos 112-113-114, p. 77-79.
25. — R. Saint-Jean, La commanderie de Jalès, dans Revue du Vivarais, 1987, p. 22.
26. — Bibl. mun. d'Avignon, ms 5764, fol. 201.
27. — En 1396, il est en effet question de la « carreria publica ante januam S. J. Iherosolimitani et ante cimiterium S. Agricoli », P. Pansier, Les rues d'Avignon au Moyen Age, dans Mémoires de l'Académie de Vaucluse, 2e série, t. X, 1910, p. 51.
28. — Cette rue portait alors le nom de « rue de Saint-Jean-de-Jérusalem ». Sans doute que l'aile ouest de la commanderie la confrontait puisqu'une maison ouverte sur la rue à l'ouest était aussi attenante à la Maison de Saint-Jean au nord, A. M. Hayez, Le terrier avignonnais de l'évêque Anglic Grimoard, p. 79, n· 115. Cette rue conservait encore le souvenir du Temple puisqu'on la nommait parfois « carreria retro templum », elle pouvait donc être antérieure au XIVe siècle, A. M. Hayez, op. cit., p. 59, n· 83, et p. 79-70, n· 103-104.
29. — Cette traverse, qui portait également le nom de « transversia retro templum », faisait l'angle avec la rue Saint-Jean et devait aboutir à la livrée de Guillaume de La Jugie. Quatre maisons attenantes à la Maison de Saint-Jean au nord ouvraient sur cette rue au sud, A. M. Hayez, op. cit., p. 77-79, nos 112-113-114-115.
30. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, B 156, fol. 19 v·.
31. — En mai et en juillet 1309, deux reconnaissances de biens sont adressées à « Petro Baraylli campsor procurator seu actor domus milicie templi », Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 5199.
32. — P. Achard, Dictionnaire historique des rues et des places publiques de la ville d'Avignon, dans Annuaire administratif, statistique et historique du département de Vaucluse, 1856, p. 242.
33. — G. Mollat, Jean XXII, lettres communes, t. IV, Paris, 1910, analyse n· 14634.
34. — A. M. Hayez, Les livrées avignonnaises de la période pontificale, dans Mémoires de l'Académie de Vaucluse, 8e série, t. III, 1994, p. 39.
35. — Archives vaticanes, registre Avignon 67, fol. 156. Nous remercions M. M. Hayez, conservateur aux Archives départementales de Vaucluse, de nous avoir communiqué la transcription de cet acte.
36. — Pour le contexte général entre la papauté et l'Hôpital, voir A. Luttrel, Papauté et Hôpital : l'enquête de 1373, dans J. Glénisson, L'enquête pontificale de 1373 sur l'ordre des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, vol. 1, Paris, 1987, p. 4-42.
37. — En 1338, celle-ci comprenait une douzaine de religieux — un chevalier, trois chapelains, huit frères sergents — et huit donats, B. Beaucage, Visites générales des commanderies de l'Ordre des Hospitaliers dépendantes du Grand Prieuré de Saint-Gilles 1 — 338), Aix, 1982, p. 426.
38. — La préceptorie accueillait des hôtes, comme l'évêque l'acte de 1342, mais on peut penser que les grands dignitaires n'y résidaient sans doute pas, à l'instar de Juan Fernandez de Hérédia qui possédait un hôtel confrontant la commanderie au nord, A. M. Hayez, Le terrier avignonnais de l'évêque Anglic Grimoard, p. 79, n· 115.
39. — En 1373, seule la maison de Graveson et la chapelle de Tarascon apparaissent détruits tandis que les autres possessions ont résisté, B. Beaucage, L'effondrement de la gestion du patrimoine de l'Hôpital en France du sud-est 1 — 373-1429), dans Provence historique, t. XLV, fasc. 179, 1995, p. 127-128. En 1411, le procès-verbal de visite générale des commanderies du Grand Prieuré de Saint-Gilles conclut qu'il est impossible d'estimer la somme à affecter aux réparations des bâtiments de tous les membres de la Maison d'Avignon détruits depuis trente ans et préconise plutôt de les reconstruire entièrement, Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 124, fol. 8, voir pour complément B. Beaucage, op. cit., p. 130-131. Cette date pourrait coïncider avec les incursions de Raimond de Turenne dans le Comtat. La commanderie cependant, protégée par les remparts de la ville et les rançons consenties par le pape pour éloigner les grandes compagnies, n'a pas dû être affectée par les différentes luttes qui dévastèrent la région.
40. — N. Goulet, Les effectifs des commanderies du grand-prieuré de Saint-Gilles en 1373, dans Provence historique, t. XLV, fasc. 179, 1995, p. 112.
41. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 124, fol. 3-3 v·.
42. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 1265, fol. 1.
43. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 E 5/710, fol. 531-532.
44. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 E 12/1615, non folioté.
45. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 125, fol. 24-27.
46. — II est en effet précisé, lors de la prise en location de la maison par un certain Antoine de Layes, qu'au cas où des chapelains-desservants auraient besoin de chambres, ils recevraient celles qu'ils occupaient du temps du locataire précédent, Arch. dép. de Vaucluse, 3 E 5/1478, fol. 38.
47. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 125, fol. 24.
48. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 E 5/1478, fol. 39.
49. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 1418.
50. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 E 5/1428, fol. 9.
51. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 130, 56 H 134, 56 H 165, 56 H 177 et 56 H 1292.
52. — Trois portes, maintenant condamnées, qui furent ouvertes dans les pans de la tourelle (fïg. 16), témoignent de ces accès.
53. — Livre des plans et bornages des bâtiments et des terres de la commanderie d'Avignon, Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 1262.
54. — Bibl. mun. d'Avignon, est. Atlas 104).
55. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 1418.
56. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, non folioté.
57. — J.-M. Rouquette, L'architecture d'un prieuré de l'ordre de Malte en Arles, communication inédite présentée au cours du colloque sur Les commanderies des hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem dépendantes du Grand Prieuré de Saint-Gilles, tenu à Aix-en-Provence en mai 1994.
58. — Par exemple Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 130, fol. 597, 56 H 177, fol. 6, 56 H 165, fol. 5, etc...
59. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 130, fol. 596 v·, 56 H 1292, fol. 6 v·, 56 H 1280, etc...
60. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 4221.
61. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 177, fol. 5.
62. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 Q 12. Ce malheureux frère finira d'ailleurs sur l'échafaud, Bibl. mun. d'Avignon, ms 5609, fol. 827.
63. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 Q 25.
64. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 U 2/737-738.
65. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 U 2/468.
66. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 U 2/740.
67. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 P 3-007/18, p. 900 v·.
68. — Arch. dép. de Vaucluse, 3 P 3-007/18, p. 889.
69. — Arch. dép. de Vaucluse, I G 5, fol. 17.
70. — A. Demurger, Vie et mort de l'ordre du Temple, Paris, 1989, p. 70.
71. — D. Le Blevec, L'Hôpital de Saint-Jean-de-Jérusalem à Avignon et dans le Comtat Venaissin au XIIIe siècle, dans Actes du colloque du Barroux, 1983, p. 23.
72. — R. Bailly, Les Templiers. Réalités et mythes, Isle-sur-la-Sorgue, 1987, p. 23, 27 et 57. Il est vrai que dans ces cas, l'initiative de l'installation de l'ordre revenait aux évêques, mais il est des cas, comme à Saint-Gilles-du-Gard ou à Aix-en-Provence où ce ne fut pas si facile, J. A. Durbec, Les Templiers en Provence. Formation des commanderies et répartition géographique des biens, dans Provence historique, 1959, p. 24 et 35.
73. — E. Duprat, Notes et documents sur l'ordre du Temple à Avignon, dans Annales d'Avignon et du Comtat Venaissin, 1914, p. 93, doc. VII. Cet acte comporte, avec l'autorisation de 1273, la seule mention du cimetière du Temple. Ce lieu, avant tout réservé aux frères de l'ordre, pouvait accueillir des laïcs, à l'instar de ce Girarde Levenières, comme le permet la sentence épiscopale de 1273. Mais l'isolement de ce testament semble aller dans le sens des remarques formulées par J. Chiffoleau sur le déclin des ordres militaires, négligés par les testateurs à partir de la fin du XIIIe siècle, J. Chiffoleau, La comptabilité de l'au-delà, Rome, 1980, p. 230.
74. — La chapelle, ainsi que le lot immobilier comprenant l'hôtel dans lequel elle est englobée ont été rachetés par le Conseil Général de Vaucluse à la fermeture de l'établissement en 1979. Devant les menaces de démolition toujours présentes, la partie haute fut inscrite à l'Inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 1965, jusqu'à ce que la totalité de l'édifice soit inscrite en 1993. Bien que la destruction du plancher intermédiaire ait redonné à la chapelle son volume initial, celle-ci continue de croupir dans le plus grand délabrement en attendant d'hypothétiques volontés de restauration.
75. — R. Aujard-Catot, S. Gagnière, Avignon, chapelle des Templiers, rapport de sondages, dactylographié, avril 1980.
76. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, B 437. Il est intéressant de noter qu'à l'époque moderne, cette tribune conservait encore les papiers de l'ordre de Malte, Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 177, fol. 7, 56 H 227, fol. 5 v·, etc...
77. — Ainsi, les chapiteaux de l'église de la chartreuse de Villeneuve-lèz-Avignon, consacrée en 1358, et ceux de l'église Saint-Didier à Avignon, consacrée en 1359, même s'ils n'adoptent pas le même profil, n'en possèdent pas moins une corbeille nue simplement délimitée par deux tores.
78. — Elles sont loin par exemple des consoles sculptées du Palais des Papes qui, en plein XIVe siècle, présentent une facture d'inspiration toute romane.
79. — Comme par exemple à la collégiale Saint-Frambourg de Senlis 1 — 225-1230), au prieuré de Bray-sur-Aunette (vers 1260) ou à Notre-Dame de l'Assomption de Trumilly (vers 1270-1280), M. Bideault, G. Lauthier, Ile-de-France gothique, Paris, 1987, p. 105, 371 et 384.
80. — P. Héliot, Eléments franco-picards et bourguignons dans l'église Notre-Dame-du-Thor, dans Provence historique, 1969, p. 81.
81. — On retrouve des anges tenant des phylactères ou des couronnes au choeur de Saint-Yved de Braine, au transept nord de la cathédrale de Laon ou encore à la Sainte-Chapelle. L'image du Christ bénissant se retrouve très souvent également, comme au déambulatoire du choeur de Notre-Dame de Noyon ou au transept nord et au choeur de la cathédrale de Chartres, R. Branner, Keystones and kings. Iconography and topography of the gothic vaults of the Ile-de-France, dans Gazette des Beaux-Arts, 1961, p. 70-71.
82. — D. Jalabert, La flore gothique. Ses origines, son évolution du XIIe au XVe siècle, dans Bulletin monumental, 1932, p. 228.
83. — La répartition des signes lapidaires gravés sur les parements extérieurs, qui se retrouvent de façon homogène sur les différentes parties de l'édifice, corrobore cette observation.
84. — D. Jalabert, La flore sculptée des monuments du Moyen Age en France, Paris, 1965, p. 102.
85. — R. Rey, Les vieilles églises fortifiées du Midi de la France, Paris, 1925, p. 178.
86. — D'après les vues anciennes de la ville d'Avignon, Bibl. mun. d'Avignon, est. Atlas 96 — 618), est. Atlas 104 5 — 1 — 630).
87. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, fol. 5 v·.
88. — Le remplage actuel, constitué de deux groupes de lancettes géminées, avec un quatre-feuilles dans chaque tympan, surmontées d'un oculus de réseau polylobé avec tous les écoinçons ajourés, a été refait au XIXe siècle. Une coupe de l'église dressée au temps de chevaliers de Malte (Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 1262) donne une idée du remplage précédent. Il procédait de la même division en deux lancettes géminées, avec arcatures trilobées, surmontées de quadrilobes obliques, les écoinçons ajourés également. La rosé surmontant le tout présentait neuf lobes plus petits, au lieu de six sur l'actuelle.
89. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, fol. 6.
90. — Les statues mentionnées du temps des chevaliers de Malte, une Vierge à l'Enfant au trumeau, une autre Vierge et un saint Jean-Baptiste sous le porche, ne devaient peut être plus rien aux templiers, mais nul doute qu'elles en remplaçaient d'autres prévues originellement, Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, fol. 8.
91. — Certes, on peut relativiser ces ressemblances. Les profils des doubleaux sont plus « évolués » à Avignon et aucun support ne reçoit les formerets à Aix alors qu'ils descendent jusqu'au tailloir chez les templiers. Les clés ne sont pas renforcées non plus à Aix. Mais ne s'agit-il pas là de détails ?
92. — Y. Esquieu, L'église des hospitaliers de Saint-Jean-de-Malte à Aix, dans Congrès archéologique de France, 1986, p. 111.
93. — Cette datation nous a été proposée par Mme M.-C. Leonelli, du centre de recherche du Petit Palais; qu'elle en soit ici remerciée.
94. — En effet, les chandeliers « qui servent à l'autel » sont « médiocres » et les nappes qui le couvrent sont « fort vieilles », Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, fol. 3.
95. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 130, fol. 594 v·.
96. — En témoigne par exemple le souci du sacristain qui fait mettre « sur le portail du coeur une grade de bois avec une croix pour contre-garde qu'on ne puisse entrer », Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227.
97. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 134, fol. 1119 v·.
98. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, fol. 4-5.
99. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, fol. 2 v·-3, 56 H 130, fol. 595.
100. — Arch. dép. du Gard, H 889, fol. 242.
101. — Arch. dép. des Bouches-du-Rhône, 56 H 227, fol. 3, 56 H 227, fol. 5.
102. — La chapelle conservait en effet une fonction funéraire à l'époque moderne. D'après le chanoine de Veras, les chevaliers dignitaires étaient ensevelis dans le choeur et des personnes extérieures à l'ordre dans la nef, Bibl. mun. d'Avignon, ms 1738, fol. 293-297.

Sources : Damien Carraz — Une commanderie templière et sa chapelle en Avignon : Du temple aux chevaliers de Malte — Société Française d'Archéologie — Musée des Monuments Français — Tome 154 — Année 1996.
Chapelle en Avignon

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