Commanderie de Clichy-sous-Bois
Domaine du Temple de Clichy-sous-Bois
Je n'ai pas recopié tout le texte de cette étude. Je n'ai pris que ce qui concerne les Templiers et les Hospitaliers.
Tandis, que les religieux de Livry arrachaient patiemment la cure à ses détenteurs laïques, les Templiers prenaient pied dans le village et, par une adroite politique d'achats et de dons, se rendaient maîtres en 1267 (22) de la seigneurie, qui devait rester aux mains de leurs successeurs jusqu'à la Révolution. Leurs acquisitions leur parurent bientôt suffisantes pour justifier la création d'un centre d'exploitation : la commanderie apparaît pour la première fois en 1270 (23).
On ignore aussi bien la qualité que le nombre des religieux qu'elle pouvait abriter, mais ses ressources ne lui permettaient certainement pas d'entretenir un personnel abondant. Elle possédait naturellement une chapelle, qui servait aux réceptions (24) et où l'office était régulièrement célébré trois fois par semaine jusqu'en 1307 : à la veille de la catastrophe qui devait s'abattre sur l'ordre, le visiteur de France Hugues de Pairaud aurait emporté calice et ornements sacrés et défendu de dire la messe (25). Mais on peut faire des réserves sur la valeur de ce dernier témoignage, arraché par des juges intéressés et sous l'effet de la torture.
L'exécution de la bulle Ad Providam (2 mai 1312) qui portait dévolution des biens des Templiers aux Hospitaliers fut lente et difficile. L'ordre, que seule la main énergique de Jean XXII devait arracher à une crise redoutable (26), se heurtait aux prétentions du roi, qui entendait non seulement se faire rembourser une ancienne créance, mais encore être largement indemnisé de tous les frais de geôle et de torture (27).
Durant une douzaine d'années on perd de vue la commanderie de Clichy et il est probable que, comme les autres biens provenant du Temple, elle fut gérée par des commissaires royaux, parmi lesquels on compte deux très grands bourgeois de la capitale, Guillaume Pizdoe et Renier Bourdon (28). A quelle date les Frères de Saint-Jean-de-Jérusalem en prirent-ils possession ? On l'ignore. Toutefois, dès le 24 juin 1319, l'hospitalier Adam de Brois dresse l'état des revenus de la maison (29), dont il apparaît comme le chef quatre ans plus tard (30).
Or les Hospitaliers n'étaient pas en mesure de peupler tous les établissements qu'ils avaient hérités des Templiers, mais il ne pouvait leur venir à l'esprit de rompre l'unité des exploitations formées par leurs prédécesseurs. Clichy, sans qu'on sache bien comment, paraît avoir été du nombre des maisons condamnées (31) : ses biens furent rattachés au Grand Prieuré de France, et la gestion en était confiée à l'un des frères de la maison de Paris qui prenait alors, peut-être un peu abusivement, le nom de commandeur (32). Tel fut, par exemple, réduit aux travaux de détail, dont le plus solide en dépit de sa date est celui de Henri de Curzon, La Maison du Temple de Paris de 1354 à 1361, le cas de Pierre de Rampillon ; tel avait été très probablement vingt ans plus tôt celui d'Adam de Saint-Laurent. Au XVe siècle, la commanderie est généralement baillée à titre viager et ses titulaires se recrutent le plus souvent parmi les clercs : Thomas Louette, receveur général de l'ordre (33), en jouit pendant au moins onze ans : il est vrai que Nicole de Giresme avait pris soin de garder par devers lui les bois qui constituaient le plus clair du revenu (34).
Quant à Josse de la Porte, prieur claustral du Temple (35), à peine Méry d'Amboise lui eut-il concédé en 1491 la seigneurie, alors complètement en ruine, qu'il se hâtait d'y mettre un fermier, à charge de consacrer cent écus d'or à la remise en état des lieux (36). Il s'y entendait, ayant déjà par les mêmes moyens tenté d'obtenir treize ans auparavant la restauration d'un autre membre du Grand Prieuré de France qui lui avait été également baillé à viager (37) : le château du Mail.
A partir du XVIe siècle enfin, lorsqu'ils ne sont pas touchés directement par le Grand Prieur, ce qui est le cas le plus fréquent, les revenus de la commanderie appartiennent à des chevaliers de Malte, cadets de bonne famille (38).
La disparition de la commanderie devait-elle entraîner celle de la chapelle ? On peut en douter. L'ancien Temple de Balizy, supprimé à peu près à la même époque que celui de Clichy, possédait encore la sienne au milieu du XVe siècle (39). Malheureusement, rien ne prévaut contre le silence des textes. Les Hospitaliers disposaient certes à Clichy d'une belle demeure, la seule convenable du village, Charles V pourra s'y loger en novembre 1365 (40), et c'est à bon droit, semble-t-il, que le procès-verbal des visites de 1456 la dépeint comme « ung mout bel hostel » (41) ; mais jamais, pas plus dans les visites que dans les baux, il n'est question d'un local spécialement affecté au culte.
Faut-il en conclure que les Hospitaliers, le commandeur, que ses fonctions obligeaient à faire de fréquents séjours à Clichy, le Grand Prieur de France, lorsqu'il lui prenait fantaisie de passer quelque temps au milieu des bois, assistaient aux offices de l'église paroissiale confondus avec les villageois dont ils étaient les seigneurs ? C'est beaucoup moins certain. Ici encore on ne peut avancer qu'avec une extrême prudence ; mais les décisions prises par Amador de la Porte entre 1641 et 1644 paraissent impliquer la reconnaissance d'un état de fait beaucoup plus qu'une innovation. La reconstruction de l'église, on s'en souvient, date de cette époque. Les propriétaires influents semblent en avoir profité pour se faire attribuer les chapelles du chœur : Clément Darce, conseillé du roi et trésorier de France en Bourgogne, construit en 1643 celle de la Madeleine, située derrière la sacristie, où il fondera par testament, l'année suivante, un service hebdomadaire (42). Le Grand Prieur, pour sa part, dut revendiquer la chapelle de la Vierge. Certes il est étrange qu'on n'y fasse aucune allusion avant 1662 (43) et que les délibérations capitulaires passent la chose sous silence. Mais, si l'ordre ne doit pas cet oratoire aux bons offices de l'oncle de Richelieu, pourquoi donc alors porterait-il ses armes ? Or, le 28 mars 1665, les visiteurs des chambres prieurales, reçus à Clichy par le maître d'école François Duguey, sont conduits dans la chapelle de la Vierge, sise à main gauche du chœur, dont elle est alors séparée par une cloison en balustre : des lambris de bois revêtent entièrement le pourtour, et les armes d'Amador de la Porte, qui sont sculptées dans les boiseries au-dessus de l'autel, frappent également les deux croisées (44). On reconnaît sans peine la chapelle actuelle, aujourd'hui lambrissée jusqu'à mi-hauteur et fermée par une grille très basse. Ses dimensions paraissent avoir varié : au XVIIe siècle, elle ne comprenait qu'une travée, la seconde appartenant à M. de Prime, procureur du roi en sa forêt de Livry et de Bondy, qui s'y fait enterrer en 1662 (45). Mais la séparation, sans doute mal assurée, favorisait les empiétements, car le 27 mai 1784 les visiteurs décident que leur chapelle sera restreinte au premier pilier, c'est-à-dire ramenée à sa dimension primitive (46). L'ameublement, très simple et entretenu avec soin (47), comprenait bancs et prie-Dieu (48).
Si l'on en croit les visites, ils servaient uniquement au Grand Prieur (49) ; en fait il paraît bien que ses fermiers, tout au moins à la fin de l'Ancien Régime, en aient eu eux aussi le bénéfice : l'usage de la chapelle est nommément spécifié dans les derniers baux, tant de la ferme que de la maison seigneuriale (50).
La facilité avec laquelle Amador de la Porte s'établit dans le chœur de l'église sans que sa présence, ni celle de ses successeurs, soit jamais contestée, bien qu'ils n'eussent aucun titre de fondation, laisse à penser qu'il continuait une tradition ancienne. Peut-être les Hospitaliers disposaient-ils déjà dans l'église primitive, sinon d'une chapelle, tout au moins d'un autel. La mère du commandeur Adam de Saint-Laurent ne pouvait qu'y être inhumée. Mais les ouvriers qui, à deux reprises au moins et à plusieurs siècles de distance, refirent le pavage, ne se souciaient guère ni de la qualité ni des intentions de la défunte. Estimant que la dalle pouvait encore servir, ils l'utilisèrent comme matériau de remploi, probablement après l'avoir écornée, et finirent par la placer sur le rebord de la marche séparant la nef du chœur, à l'extrémité opposée et le plus loin possible de la chapelle affectée à l'ordre de Malte. Elle ne paraît pas avoir changé de place depuis.
Sources : Anne TERROINE. Bulletin de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France, pages 47 à 61, 89e année. Bibliothèque historique de la ville de Paris. 1963.
BNF
22. E. Mannier, Ordre de Malte. Les commanderies du Grand-Prieuré de France..., Paris, 1872, in-8°, page 17.
23. E. Mannier, opuscule cité, page 18.
On trouvera quelques détails sur la commanderie dans l'étude assez bien documentée de M. René Blaise, La Commanderie de Clichy, dans le Bulletin de la Société historique du Raincy et du pays d'Aulnoye, n° 29, 1962, page 4 et suivantes.
24. Le local devait être assez vaste pour pouvoir contenir une dizaine de personnes.
En janvier 1304, Pierre de Sarcelles y fait profession entre les mains du visiteur Hugues de Pairaud, devant son oncle Adam de Sarcelles, commandeur de Lagny, Jean de Menouville, commandeur de Clichy, Jean de Tour, trésorier du Temple, et Jean Boucel, chapelain de ce dernier, ainsi que devant deux autres religieux dont on ignore le nom : déposition du 18 février 1311, dans Jules Michelet, Le Procès des Templiers, tome I, Paris, 1841, in-4°, page 575 (Collection de documents inédits sur l'histoire de France).
Ipse autem receptus fuerat in capella domus Templi de Clichi Parisiensis diocesis, per fratrem Hugonem de Penrando, in festo Conversionis sancti Pauli proximo preterito fuerunt VII anni, presentibus fratribus Johanne de Turno tunc thesaurario Templi Parisiensis, Adam de Cercellis tunc preceptore Templi de Lathiniaco super Maternam, avunculo ipsius testis, deffunctis, et Johanne de Menovile custode tunc dicte domus de Clichi, servientibus, et Johanne Bocelli presbytero, capellano dicti thesaurarii, et duobus aliis quorum nomina et cognomina ignorat, in hunc modum: nam instructus a dicto thesaurario, peciit junctis manibus et flexis genibus absque capucio sibi concedi amore
25. J. Michelet, Le Procès des Templiers, tome II, Paris, 1841, in-4°, page 285 (déposition de Mathieu de « Bosco Audemari », commandeur de Clichy, du 20 octobre 1307).
Item anno, indictione, pontificatu, anno, mense et die predictis, in ipsius inquisitoris, nostrum notariorum publicorum et infrascriptorum testium presencia constitutus frater Matheus de Bosco Audemari Belvacensis diocesis, magister domus de Clichiaco, eodem modo juratus, et interrogatus de tempore et modo recepcionis sue, dixit per juramentum suum quod receptus fuit apud Latigniacum Siccum Meldensis diocesis, per fratrem Johannem de Turno tunc thesaurarium Templi Parisius, presentibus fratre Johanne de Besencuria et fratre Nicolao Flamingo, fratribus ordinis predicti, et quibusdam aliis de quorum nominibus non recolit.
26. G. Mollat, Les Papes d'Avignon (1305-1378), 9e éditions, Paris, 1950, in-8°, page 51 et suivantes. Les quelques indications que l'on trouvera plus loin sur la commanderie de Clichy ne peuvent malheureusement pas être remises dans une perspective d'ensemble. Si, grâce surtout aux travaux de Delaville le Roulx, on connaît bien l'œuvre des Hospitaliers en Terre Sainte, à Chypre et à Rhodes, il n'existe aucune étude générale sur le fonctionnement et l'administration de l'ordre en Occident.
A cet égard on en est réduit aux travaux de détail, dont le plus solide en dépit de sa date est celui de Henri de Curzon, La Maison du Temple de Paris. Histoire et description, Paris, 1888, in-8°, 358 page L'ouvrage de Mannier, cité page 53, n° 22, n'est qu'un recueil de monographies sans lien les unes avec les autres et dont il convient de contrôler souvent les assertions.
27. Sur ce point l'exposé le plus limpide et aussi le moins partial reste celui de Borrelli de Serres, Recherches sur quelques services publics du XIIIe au XVIIe siècle, Paris, 1909, in-8°, page 31 et suivantes. On doit en retenir ici que la transmission des biens-fonds ne s'est pas faite en bloc, mais séparément, à des dates et des conditions différentes pour chacun d'eux.
28. J. Glénisson et J. Guerout, Registres du Trésor des chartes, tome I : Règne de Philippe le Bel. Inventaire analytique..., Paris, 1958, in-4°, n° 406, et surtout F. Pasquier, Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790. Haute-Garonne. Archives ecclésiastiques, Série H, tome I, n° 1-417. Ordre de Malte... XIIe siècle-1790, Toulouse, 1927, in-4°, page 72 et suivantes.
29. Archives nationales, S 5097B, liasse 215, n° 1 (anciennement S 5096, n° 17).
30. Lebeuf, opuscule cité, page 571, d'après un acte aujourd'hui perdu du cartulaire de Livry.
31. E. Mannier, cité, page xxv, place cette suppression au début du XIVe siècle.
32. Voici la liste provisoire, et que des recherches plus approfondies permettraient sans doute de compléter, des titulaires Hospitaliers de la commanderie au Moyen Age :
Adam de Brois, 1324 (Lebeuf, opuscule cité, page 571)
Adam de Saint-Laurent, 1333
Philippe Herbelin, 1343 (Archives nationales, MM 99, fol. 1)
Pierre de Rampillon, 1353-1361 (Archives nationales, MM 100, fol. 49, et S 5097b, liasse 215, n° 3 (anciennement 5096, n° 16)
Yvon le Bossu, 1370-1371 (Archives nationales, MM 99, fol. 4 et 1 v°)
Pierre Contier, 1385 (Archives nationales, S 5098A, liasse 228, n°4 (anciennement S 5097, n° 11)
Thomas Louette, 1456-1467 (Archives nationales, S* 5558 (visite) et S 5097B, liasse 215, n° 25)
Josse de la Porte, 1491-1506 (Archives nationales, S 5097B, liasse 215, n° 42, et H. de Curzon, La maison du Temple de Paris, p. 42, n. 2).
Aucun d'eux naturellement ne doit être considéré comme le chef d'une maison religieuse, et le grand prieur, qui dispose à sa guise de la commanderie, s'en réserve très souvent les revenus.
33. H. de Curzon, opuscule cité, page 43, n° 4. Receveur de 1443 à 1467, il était remplacé en 1469 par Nicolas Sainthomme.
34. Archives nationales, S* 5558 (visite de 1456).
35. Se fondant surtout sur les registres capitulaires, Curzon n'a pas rencontré Josse de la Porte avant 1506. Or il était déjà prieur en 1491 (Archives nationales, S 5097B, liasse 215, n° 42). Vingt ans auparavant, à moins qu'il ne s'agisse d'un homonyme ou d'un parent, il avait exercé la charge de receveur (Curzon, op. cit., page 43, n° 4).
36. E. Mannier, page 19.
37. E. Mannier, page 21. Le château du Mail était situé entre Argenteuil et Franconville.
38. L'atlas de la seigneurie de Clichy dressé en 1703 donne un plan très précis du village (Archives nationales, N IV Seine-et-Oise 222, n° 25). La disposition des lieux ayant à peine varié, il est assez aisé de retrouver la place de la commanderie par rapport à l'église.
Le vieux Clichy s'étend en effet de part et d'autre d'une rue orientée grossièrement est-ouest — c'est l'ancien chemin de Livry, aujourd'hui Allée de Sévigné — sur laquelle débouchent quatre voies orientées nord-sud, à main droite le chemin de Clichy à Gagny (aujourd'hui rue de Gagny) et le chemin de Clichy à Notre-Dame-des-Anges (aujourd'hui rue Fernand-Lindet), à main gauche le chemin de Coubron (aujourd'hui rue de Coubron) et le chemin conduisant à la voirie de Montauban (aujourd'hui rue de Bellevue).
Les terrains relevant de l'église, limités au nord par l'Allée de Sévigné, occupaient l'espace sis entre les rues de Gagny et Fernand-Lindet : ils comprenaient un grand jardin, le presbytère qui donnait sur l'Allée de Sévigné, et enfin à l'ouest le cimetière : ce dernier longeait la façade occidentale de l'église et s'étendait en bordure de la rue Fernand-Lindet jusqu'à l'Allée de Sévigné ; amputé de sa partie méridionale pour laisser place au parvis planté d'arbres que l'on voit encore aujourd'hui, il finit par être transféré hors du village en 1846 (Archives communales de Clichy, Registres de délibérations, année 1846, 18 mai).
Les bâtiments de la commanderie, situés de l'autre côté de l'Allée de Sévigné, un peu en deçà de la rue de Coubron, étaient bornés à l'ouest par la rue de Bellevue, qui aboutissait au nord à la voirie de Montauban (aujourd'hui route stratégique de Vaujours). Ils comprenaient une ferme avec toutes ses dépendances : granges, bergeries, écuries, colombier, pressoir, une maison seigneuriale parfois désignée sous le nom de Petit Château, avec des terrasses plantées de tilleuls, et enfin des prisons qui étaient en fort mauvais état en 1789 (Archives nationales, S 5103A, liasse 295, 1767, 15 décembre, et S 5102, liasse 274, 1789, 20 mars). C'est sur ce château que deux banquiers, Louis-Jacques Dangirard et Guillaume, l'un des chefs de la puissante banque Mallet, avaient jeté leur dévolu, projetant de profondes transformations.
Déjà ils s'étaient portés acquéreurs de terrains contigus (Archives nationales, Min. Cent., étude LXXXIX, 1819, 24 mai).
Les événements, en précipitant la ruine de l'Ordre de Malte, favorisèrent leurs desseins : par deux achats successifs, le 13 septembre 1793 et le 16 pluviôse an III, le château et une partie des terres passèrent aux mains de Guillaume Mallet (Archives de Seine-et-Oise, Séries Q, Vente de biens de première origine, n° 768, et Archives nationales, Min. Cent., étude LXXXIX, 1819, 24 mai).
Maître des lieux, il jeta à bas une partie de l'édifice et transforma la commanderie du XVIIIe siècle, jusque-là à peine séparée des bâtiments d'exploitation dont elle restait le centre, en une agréable demeure de plaisance, entourée d'un très grand parc. Des recherches poussées livreraient sans doute le nom du maître d'oeuvre et permettraient de préciser la date des travaux. On ignore les raisons qui incitèrent Mallet, devenu entre-temps baron et régent de la Banque de France, à se défaire d'un domaine qu'il possédait depuis vingt ans et où certains des siens avaient élu leur sépulture : peut-être faut-il y voir le contrecoup de la crise de 1818. Quoi qu'il en soit, le 24 mai 1819, le « château nouvellement construit à la moderne », le grand parc entouré de fossés et de haies vives, le petit parc et le jardin potager clos de murs, soit au total plus de neuf hectares, sont vendus à Kellermann, avec vingt hectares de prés et de terres (Archives nationales, Min. Cent., étude LXXXIX, 1819, 24 mai ; Archives de Seine-et-Oise, Atlas du cadastre parcellaire du canton de Gonesse, t. I, 1819, Clichy, et Département de Seine-et-Oise, Administration des Contributions directes, Arrondissement de Pontoise, Justice de Paix de Gonesse, Commune de Clichy-en-Aunois, n° 285, Exercice 1819, Section A dite du Village, n° 140 à 162).
Fort âgé, le vainqueur de Valmy n'eut guère le temps de s'attacher à Clichy : il mourait l'année suivante (13 septembre 1820).
Il serait hors de propos de poursuivre plus avant l'histoire du domaine. Il suffira d'indiquer ici que les bâtiments de la ferme sont encore visibles en retrait de la rue de Coubron : on distingue notamment les restes du colombier. Le parc a conservé les dimensions considérables que lui avait données Guillaume Mallet.
Comme en 1819, il s'étend jusqu'à la route stratégique conduisant au fort de Vaujours qui longe le cimetière (ancienne voirie de Montauban) : il est donc beaucoup plus vaste que ne l'était celui de la commanderie. A l'intérieur, très en deçà de l'Allée de Sévigné, on voit encore un corps de bâtiment qui paraît dater du début du XIXe siècle. Le parc et le château sont aujourd'hui laissés à l'abandon. Désignés communément sous le nom de la Terrasse, ils appartiennent depuis une vingtaine d'années à M. Grampa. Il serait à souhaiter que la ville de Clichy, qui a su montrer tant d'intelligente initiative en faisant du château de Robert de Bragelonne et de Le Bas de Courmont le siège de la municipalité, s'attachât à préserver ce qui mérite de subsister des bâtiments et du parc de la commanderie, qui, avec la pierre tombale de Jeanne de Saint-Laurent, sont les plus anciens vestiges de son histoire. La chose presse : en quinze ans, Clichy, de village — on y comptait encore 800 habitants en 1946 — est passé au rang de petite ville — 10.448 habitants en 1960 — et un important programme de constructions envisage de porter ce chiffre à 50.000 (Clichy-sous-Bois et son passé, Le Raincy 1960, in-16, page 8).
39. E. Mannier, opuscule cité, page 21.
40. Lebeuf, opuscule cité page 571.
41. Archives nationales, S* 5558 (visite de 1456).
42. Archives de Seine-et-Oise, G 598. Voir plus haut, page 50, n° 13.
43. La chapelle de M. de Prime mentionnée à cette date est située derrière celle du Grand Prieur (Archives communales de Clichy, Registres d'état-civil, 1662).
44. Archives nationales, S* 5560, folio 48 v°. Le rédacteur a commis une étourderie en plaçant la chapelle à droite du chœur.
45. Archives communales de Clichy, Registre des décès (1662, 27 mars).
46. Archives nationales, S* 5566, page 214.
47. Archives nationales, S* 5562, page 322 (1734, 19 mai).
48. En 1756, les visiteurs notent qu'il convient de réparer une poutre entre le chœur et la chapelle (Archives nationales, S* 5563, folio 5 v°).
Trente ans plus tard, le curé s'étant avisé de déplacer un confessionnal dans la chapelle dont les bancs ont disparu, ils décident de le faire enlever et de refaire un autre banc (Archives nationales, S* 5566, page 214, 1784, 27 mai).
49. Archives nationales, S* 5562, page 322.
50. Archives nationales, S 5103A, liasse 295 n. c. (1767, 15 décembre) et S 5102, liasse 274 n. c. (1777, 14 avril).
Sources : Anne TERROINE. Bulletin de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France, pages 47 à 61, 89e année. Bibliothèque historique de la ville de Paris. 1963.
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