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Études réalisées sur les Templiers

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Au fil des siècles : Au XXe siècle — L'époque moderne

Département: Gers, Arrondissement: Condom, Canton: Valence-sur-Baïse, Commune: Ayguepinte - 32

Domaine du Temple La Claverie
Domaine du Temple La Claverie

« La hauteur des murs qui l'entourent, le ciel azuré qui lui sert de voute, le voisinage pieux de la chapelle, le calme qui règne dans cette cour, lui donnent cet air à la fois mystérieux et sévère que possèdent les cloitres de nos vieux monastères. Il semble en y pénétrant que vos pieds foulent un sol béni, aussi vous faites instinctivement silence, votre imagination s'élance vers le passé et vos regards errant dans cette petite enceinte, cherchent vraiment les traces des hommes illustres, dont tout autour de vous, semble pleurer l'absence. »
1895 — extrait Revue de Gascogne, Bregail Gilbert — la Commanderie de la Cavalerie page 63

Ancrée sur 8 siècles d'histoire, la Commanderie rentre dans le XXe siècle avec fracas. Sa chapelle subit le poids du temps. Son mur clocher s'effondre et sa cloche se brise ; des trouées sont percées dans ses murs, les foudres occupent la nef, ses niches funéraires sont déplacées sur un autre site. Sa flamme faiblit et vacille jusqu'a presque s'éteindre dans la mémoire locale. Ses fondamentaux sont pourtant toujours bel et bien là et attendent un nouvel élan.

Au XIIe et XIIIe siècle — Le Chapitre Templier

La Claverie d'Armagnac
La Claverie, image d'Archives — Sources : Association Les Amis de la Commanderie

Entre le Castéra Verduzan et Ayguetinte, la maison templière de la Cavalerie est fondé par les Seigneurs de Pardailhan entre le XIIe et le XIIIe siècle. Austère et d'une robuste simplicité, elle comprend un groupe de bâtiments contiguës et disposés en rectangle pour former une cour intérieure d'une vingtaine de mètres de long. L'un des petits cotés est fermé par une solide tour de garde carrée à trois niveaux ; celui qui lui fait face par une grange fortifiée, une écurie et un chai. L'un des grands cotés est occupé par un haut mur rempart tandis que l'autre côté est défendu par une chapelle forteresse. On rentre dans la cour par un lourd portail entre chapelle et tour. L'ensemble défensif permet aux habitants du petit village de la Cavalerie de se mettre à l'abri lors d'un coup de force extérieur ; il procure aussi à la petite communauté des frères soldats du Christ toute la quiétude nécessaire à leur mission monastique.
Mais la Commanderie est aussi un petit centre d'économie : exploitation agricole et viticole, halte pour les pèlerins de saint Jacques de Compostelle, élevage et dressage de chevaux combattants ; comme quelques centaines d'autres commanderies rurales en France, elle contribue à accomplir l'idéal moyenâgeux de l'ordre Templier: protéger les chemins vers Jérusalem et défendre par les armes, la chrétienté partout où elle est menacée.

La commanderie est dirigée par un chevalier commandeur. Il est de condition noble, organise et gère une petite communauté d'une dizaine de frères. Sous ses ordres, des chevaliers nobles également, sont eux-mêmes assistés de sergents et écuyers de condition plus modeste. Des frères occupent les fonctions essentielles de forgeron, maréchal ferrant, boulanger et chapelain. Les taches agricoles sont organisées par les moines mais laissées le plus souvent à des corvéables ou à une main d'oeuvre extérieure. Il en est de même pour le travail de la pierre dévolue aux compagnons itinérants.

Porte Romane

Porte Romane
Porte Romane — Sources : Association Les Amis de la Commanderie

Un frère chapelain est chargé de conduire les nombreux offices et services qui rythment très précisément la vie de ces moines soldats, des matines à 5 heures du matin jusqu'au primes à minuit. On pénètre dans la chapelle par une porte étroite donnant sur la cour. Un gros tore horizontal en pierre sous l'arc en tiers-point impose l'humilité. La porte peut être barrée solidement par l'intérieur grâce à des cavités profondes dans l'épaisseur du mur. L'ornementation est des plus modeste : les badigeons à la chaux sur la pierre obéissent aux règles de simplicité toutes bernardines. Le sanctuaire est formé d'une abside voûtée en cul de four et d'une travée de choeur en plein centre. Le chevet est éclairé par trois fenêtres romanes étroites set évasées intérieurement et extérieurement. Une grande pierre plate au bord inférieur chanfreiné tient lieu d'autel. Dans l'encoignure formée par les gros pilastres et les murs de la nef, deux piédestaux surmontés portent des statues mariales. La nef, d'une dizaine de mètres de long est pourvue de quatre meurtrières rectangulaires largement évasées vers l'intérieur.
L'épaisseur des murs, la rudesse du gré des pierres, l'étroitesse des ouvertures donnent au lieu une rigueur, une austérité à la fois monastique et militaire que la lueur des bougies vient à peine adoucir.

Au XIVe et XVe — L'Essor

Le 22 mars 1312, le pape Clément V, prononce la suppression de l'Ordre du Temple et ordonne que les Biens soient dévolus aux Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem. Cet héritage a des conséquences en matière de gestion et d'administration de l'Ordre Hospitalier en France.
La Commanderie de la Cavalerie devient un établissement administrant plusieurs commanderies subalternes. A ce titre, elle fait l'objet d'« améliorissements » substantiels.
La tour de garde, jusque-là dotée que de deux entrées gothiques, basses au rez-de-chaussée et de quatre lucarnes à bascule et archères au deuxième niveau, voit son premier niveau aménagé en appartement du Commandeur. Des fenêtres à meneau simple sont ouvertes, des cheminées imposantes sont installées, les sols sont pavés de terre cuite.
Un escalier extérieur simple en pierre en descend et débouche sur un petit chemin pavé menant à la Chapelle.
La chapelle reçoit les soins nécessaires à la continuité de sa mission spirituelle. Des motifs d'ornementation à la chaux, d'ocre rouge et de pigment coloré éclairent désormais le chevet.

Chapelle Romane

Chapelle de la Commanderie
Chapelle Romane de la Commanderie
Sources : Association Les Amis de la Commanderie

Deux niches funéraires en grés dur, une à l'extérieur au midi et une à l'intérieur, au nord sont édifiées pour honorer quelque chevalier valeureux.

Chapelle Romane

Chapelle de la Commanderie
Chapelle Romane figure
Sources : Association Les Amis de la Commanderie

Des figures de pierre, les unes finement sculptées, les autres grossièrement embauchées sont encastrées dans les murs et concourent à personnifier le sanctuaire.
De Frère Bertrand de Santa Orsa entre 1330, à Frère Pons Raffin, fin XVe l'administration par une longue liste de commandeurs sera sans faille et rigoureuse. La prise sous tutelle d'un grand nombre d'autres biens en d'autres lieux en Gascogne, en fait une des commanderies principales de l'ordre des Hospitaliers dans le Sud-ouest. La guerre de cent ans coure pourtant ces deux siècles et la ligne de front n'est qu'à quelques kilomètres au nord de la Cavalerie. La Commanderie gardera donc toutes ses dispositions défensives et ses possibilités de repli pour les habitants alentours.

Au XVIe siècle — L'Apogée

Signe des temps, le Commandeur Pons Raffin octroie aux vassaux de la Cavalerie, le droit d'avoir des fours dans leur maison pour leur propre consommation.
L'Ordre des Hospitaliers revient peu à peu à sa mission caritative première au détriment de sa dimension militaire.
Le dernier « étage en bois de la tour de Garde sera démonté et remplacé par une imposante charpente à quatre pans ; le rez-de-chaussée amélioré par l'ouverture d'une porte d'entrée centrale et de deux fenêtres donnant au levant et au midi. Le mur rempart est en parti démembré et inséré dans un bâtiment long et étroit servant de logements à une communauté monastique un peu plus nombreuse. Des écuries et étables gagnées sur l'emplacement des fossés de défense désormais inutiles, prendront appui au nord contre la grange fortifié.

La chapelle recevra une décoration plus riche, où dessins de guirlandes de feuilles et raisins s'imbriquent dans des rosaces colorées.
Au milieu, le Saint Esprit sous la forme d'une colombe irradie ses rayons de lumière.
Un enfeu de pierre calcaire blanche est posé sur le mur intérieur au midi, face au premier ; ces moulures, ces base prismatiques.

Enfeu du XIIIe siècle

Enfeu du XIIIe siècle
Enfeu du XIIIe siècle
Sources : Association Les Amis de la Commanderie

La devanture de son tombeau finement sculpté, marque la Renaissance.
La Commanderie exerce une autorité de plus en plus large dans la gestion des biens de l'Ordre. Les revenus suivent cette ascendance et réclament la mise en responsabilité de Grands Commandeurs: Poncé d'Urre, Pierre de Baulat de Trébons, Pierre de Baulac Grand Prieur de Toulouse, Jean de la Valette, Futur Grand Maître. La Commanderie devient Chambre Prieurale au XVIe siècle, preuve de son rayonnement. L'Ordre des Hospitaliers devient Ordre de Malte, du nom de l'île méditerranéenne qui abrite désormais le siège de l'Ordre. La Valette en est devenue la capitale du nom de son fondateur...

Du XVIIe au XVIII siècle — Le Déclin

Le XVII siècle rétablit la Commanderie dans son ancienne étendue territoriale ; elle perd considérablement de son influence. Les entretiens du bâti se raréfient, des lézardes menacent certains bâtiments. La salle d'accueil des pèlerins de Saint Jacques appuyé contre la tour de garde à l'entrée de l'enceinte, perd sa toiture et devient jardinet. Le jardin médiéval clos de murs, et grossièrement recouvert de ruines diverses qui effacent même l'existence d'un puits carré profond remarquable. Les abords, la cour, certains rez de chaussée subissent le même traitement qui fait disparaître passages anciens, galeries et autres souterrains que quelques mémoires locales évoquent encore.
La grange dimière menace ruine.
La seconde partie du XVIIIe siècle verra un certain sursaut secouer la Commanderie dans sa léthargie. Leon Malvin de Montazet, Commandeur en place, entreprend des travaux importants de rénovation. La grange est raccourcie mais bien restaurée, les limites des propriétés sont redéfinies et bornées de pierres flanquées de la Croix de Malte.

Borne avec Croix de Malte

Borne avec Croix de Malte
Borne avec Croix de Malte
Sources : Association Les Amis de la Commanderie

Un portail d'entrée est reconstruit entre la chapelle et le restant du mur de la salle des pèlerins. Un blason portant les armes entrelacées du roi et de la religion scellent leur protection croisée. Le jardin médiéval est remis en culture, et une grille encadrée de jolies pierres de taille en donne l'accès. Son fronton porte la date de 1789. Elle marquera définitivement la fin de l'épopée chevaleresque et monastique de la Commanderie qui aura duré six siècles.
En 1793, la Commanderie sera vendue aux Biens Nationaux.

Du XIXe au XXe siècle — La Séparation

Le petit village de la Cavalerie devient la Claverie, nom peu signifiant mais qui marque la volonté de défaire définitivement les liens historiques nouant la Commanderie à son territoire d'influence.

Paradoxalement, la Chapelle devient l'église paroissiale Saint Georges de la Claverie. Messes et services religieux continuent de s'y célébrer, son cimetière ne sera pas déplacé. La Claverie sera par ailleurs quelques années plus tard regroupée avec deux autres communes pour constituer le village thermal de Castera-Verduzan.

Les autres bâtiments s'adaptent à l'activité agricole « stricto-sensu » et la tour de garde à la vie familiale des agriculteurs propriétaires. Le Hasard fait découvrir une petite galerie voûtée dans la grande qui est aussitôt rebouchée, puis ressurgir le puits carré du jardin médiéval ; mais bien que l'endroit soit déclaré site archéologique, peu d'attention et encore moins de recherches ne seront entreprises « in situ. »

Au XXIe siècle — Le Renouveau

Le début du XXIe siècle marque une nouvelle étape de la vie de la commanderie.

La Commanderie

Commanderie La Claverie d'Armagnac
La Commanderie
Sources : Association Les Amis de la Commanderie

Armés d'une solide volonté de faire revivre l'endroit, les nouveaux propriétaires s'attachent à en reconstituer l'Histoire, à comprendre les lieux. Une étudiante en archéologie du bâti médiéval apporte une contribution éclairée. Le projet se veut respectueux, fidèle à l'esprit encore présent aujourd'hui dans les murs. La chapelle en est bien sur le centre d'intérêt et l'objet des principales attentions.
Pour mener à bien sa restauration et sous l'impulsion conjointe des responsables et représentants de l'Ordre de Malte, de la Fondation du Patrimoine, de l'Archevêché et de la Préfecture du Gers, une association loi 1901 est créée fin 2009. Elle a pour mission de fédérer les bonnes volontés et les compétences, de relayer les initiateurs auprès des organismes chargés du patrimoine, de drainer des aides en toute transparence et confiance.
L'ambition profonde est de redonner à ce lieu singulier et fort une dimension spirituelle et culturelle, par l'ouverture au public, par l'organisation de petites manifestations cultuelles et culturelles, célébrations, expositions, concerts.
D'importants travaux de consolidation, de restauration, de sauvegarde sont d'ores et déjà réalisés sur certaines parties du bâti, mais la chapelle, hors d'eau pour l'instant, attend sa restauration.
— les trouées ont été refermées avec de la pierre gréseuses de même nature que celle constitutive des murs.
— Le dallage du sol en pierre, en grande partie détruit ou enlevé sera complété et réinstallé. Des dalles de la Chapelle ont été récemment retrouvées enfouis sous des lauriers centenaires de la Commanderie.
— La petite entrée en tiers-point sera ré-ouverte.
— Les enfeus ou niches funéraires, qui avaient été enlevés et mis à l'abri dans un musée locale en 1911 par le Docteur Lannelongue, ont été rapatriés à la Commanderie et sont réintégrés exactement dans leurs emplacements d'origine ; les saillies étaient encore bien visibles dans les murs.
— Le mur-pignon du fond de la nef sera consolidé et rehaussé d'un clocher, fidèlement, tel qu'il apparaît sur des photos exceptionnelles de la fin du XIXe siècle. La porte d'entrée gothique y sera ré-ouverte.
Une restauration des fragments de fresque encore visibles pourra peut-être alors être effectuée.
Certains esprits volontaires en charge de la protection du patrimoine évoquent, dans une phase ultérieure, la reconstruction de la voûte en cul de four du sanctuaire, ce qui constituerait aussi un exemple de restauration remarquable dans ce type de réalisation.
Comme les membres de l'association, participez au réveil de la Commanderie de la Cavalerie d'Armagnac, une nouvelle page d'Histoire s'écrit.
Vous pouvez aussi lire l'excellent article de Delphine Fabius écrit dans le journal Sud-Ouest : Sur les Traces des Templiers et sur la Commanderie de La Claverie d'Armagnac.
Sources : Association Les Amis de la Commanderie La Claverie d'Armagnac
Sud Ouest

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