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Le château templier des Cours, à Fajac-en-Val

Château de Cours

Château des Templiers de Cours
Château de Cours situé
À Castellas, près de Fajac-en-Val

Ancienne dépendance de la commanderie templière puis hospitalière de Douzens, le château des Cours, aujourd'hui ruiné, est situé sur le territoire de la commune de Fajac-en-Val, une petite localité des Corbières septentrionales sise dans les collines et les vallons de rive gauche de la Lauquette, à 13 km à vol d'oiseau au sud-est de Carcassonne.

Localisation

Le château se trouve environ 1500 m à l'ouest du village de Fajac, niché sur un mamelon très boisé, aujourd'hui sans véritable chemin d'accès, qui est coté 399 m sur la carte IGN au 1/25000e, cette élévation étant comprise entre le ravin de Poudadoure, à l'ouest, et celui de la Clauzo, à l'est cf. carte IGN 2346 E Cazilhac ou site Géoportail pour les Ordinateurs

Il est à l'origine du lieudit cadastral le Castellas (littéralement «  le gros château  » en occitan), les ruines de cette forteresse médiévale étant situées sur le nº 169 de la section C 2 du cadastre moderne de Fajac-en-Val (cf. site cadastre.gouv.fr). Sur le cadastre de 1831 (PW8883/1-10 aux Archives de l'Aude), ce château constituait alors la parcelle nº 193 de la section C 2, avec tout autour un parcellaire parfois différent de celui d'aujourd'hui en raison des évolutions ultérieures de la propriété foncière et de la nature de l'exploitation des sols.

Le compoix de 1790 (4E133/1G1 aux Archives de l'Aude) n'y faisait nulle référence, ainsi qu'aux proches environs, sans doute en raison de leur statut comme propriété indivise de la communauté villageoise, alors non mise en compoix, c'est-à-dire non allivrée à la taille, l'impôt foncier royal. En effet, aucun document relatif à ce château ne figure aux Archives de l'Aude en série Q pour la période révolutionnaire en ce qui concerne les biens nationaux de première origine, seule la métairie de Peyremale étant citée à cette époque comme propriété directe de l'ordre de Malte sur le territoire de Fajac, constituant ainsi sur cette commune l'une des multiples propriétés audoises du commandeur de Douzens.

Mais ne confondons surtout pas ce château templier des Cours, comme le font certains, avec le château ruiné du proche village de Mas-des-Cours qui, s'il est par contre indiqué sur la carte IGN et est aisément visible, n'a strictement rien à voir avec le site templier qui nous intéresse ici.

A la fin du XVIIIe siècle, la carte Cassini indiquait entre les deux localités de Fajac-en-Val et du Mas-des-Cours ce château templier sous le nom «  Les Cours des Templiers  », avec le symbole d'une bâtisse ruinée, et figurait à l'est, en direction de Fajac, une église rurale dédiée à Notre-Dame dont il ne reste aujourd'hui aucun vestige apparent, vraisemblablement transformée en carrière de pierres à la Révolution pour ce qui en restait, puisque dite ruinée en 1771-1778 (cf. infra).

La description et l'histoire du château, très incomplètes en raison de la rareté des textes mais aussi de l'absence de véritables fouilles menée sur les lieux, ont été sobrement relatées en 1987-1999 dans les revues savantes locales, avec deux plans très schématiques de la partie centrale et beaucoup d'interrogations :
- Dominique Dieltens et René Quehen, «  Les casteillas des Corbières, un système de défense du XVIe siècle  », (Bulletin de la Société d'études scientifiques de l'Aude, 1987, p. 37-48 ;
- Jean-Louis Berman, «  Le château des Cours à Fajac-en-Val, état actuel, chronologie  », (Bulletin de la Société d'études scientifiques de l'Aude, 1999, p. 105-108).

Le présent document est la synthèse des données connues et des observations menées par nous-même sur le site lors de plusieurs visites, avec débroussaillage récent de l'accès, y incorporant au besoin notre parfaite maîtrise de l'histoire des ordres militaires en Languedoc et des voies anciennes de circulation.

Historique succinct

forteresse de Mas-des-Cours
Sources image: Christian Pioch.
Forteresse de Mas-des-Cours
Cette forteresse de Mas-des-Cours
Assiégée lors des guerres de Religion,
Avait certes fière allure en son temps, mais est tout
sauf templière...

Situé à peu près à mi-distance des villages de Fajac-en-Val et du Mas-des-Cours, à l'écart de tout lieu aujourd'hui habité et difficile d'accès, le château templier des Cours est souvent confondu avec les vestiges du château ruiné situé dans la bourgade même du Mas-des-Cours, dont l'histoire est pourtant très différente, en lien avec l'abbaye de Lagrasse et surtout l'évêché de Carcassonne.

Les mentions anciennes du site qu'occupaient les templiers, font état au XIIe et XIIIe siècles d'un domaine agricole manifestement alors non fortifié, connu en 1136-1215 sous le nom de villa de Curtis ou villa de Curtibus, voire de villa Sancte Maria de Curtes, du nom de l'église rurale et mariale, aujourd'hui disparue, qui se situait alors en direction de Fajac.

Le château templier des Cours, s'il est aujourd'hui à l'écart des voies modernes de communication, ne fut pas pour autant implanté en son temps en un lieu qui aurait été désert et dénué de vie ou d'intérêt.

Pont de Mas-des-Cours
Sources image: Christian Pioch.
Pont du Moyen-Age.
Quelques dizaines de mètres plus loin.
On franchit ce magnifique pont à dos d'âne, érigé.
Au Moyen-Age sur la Lauquette

Nous partirons donc du château de Mas-des-Cours pour traverser le petit village de Mas-des-Cours et franchir son pont jeté sur la Lauquette. (L'ancestrale voie reliant Lagrasse à Carcassonne passait-là)

En effet, et cela justifia son édification sur la colline où il fut implanté, il contrôlait jadis une importante et ancestrale voie, pastorale et muletière, reliant Lagrasse au Carcassès, via le val de Dagne, qui passait nettement à l'écart de la route actuelle empruntant la vallée de l'Alberte puisque située sur les hauteurs de rive gauche de celle-ci, loin vers l'intérieur des terres.

Venue d'Arquettes-en-Val, et constituant ainsi le plus court chemin depuis l'abbaye de Lagrasse pour gagner Carcassonne aux époques anciennes, cette voie franchissait ainsi les crêtes dominant le val au col dit de las Corbos, atteignait Fajac, puis filait vers l'ouest en direction du Mas, passant en contrebas et au nord du château templier, à faible distance de celui-ci. Franchissant la Lauquette au pont de Mas-des-Cours, elle obliquait ensuite au nord-ouest pour se diriger vers Carcassonne, traversant alors les garrigues de l'actuel champ de tir de Villemaury au lieudit Pech de la Ramière, en gagnant la ligne de crête légèrement à l'est de la Roque Maurel (cote 460).

Ayant perdu son statut de véritable chemin avant la fin du XVIIIe siècle, elle est néanmoins encore cadastrée de nos jours sur son intégralité, mais une bonne partie de son tracé ne figure pas sur la carte IGN et elle est au demeurant souvent très effacée sur le terrain.

De nombreuses possessions templières étaient situées dans les environs : à Fajac même, de part et d'autre du vallon de la Jasso, au hameau de Peyremale, dans la vallée même de la Lauquette, comme plus au sud, au hameau de Molières, dans la vallée de l'Alberte, de l'autre côté de la montagne. Les cartulaires de Douzens, publiés en 1965 par la Bibliothèque Nationale, en citent un bon nombre à diverses époques et à diverses occasions.

Le château verrouillait ainsi à l'ouest les possessions les plus méridionales de la commanderie templière, puis après 1312 de l'ordre des hospitaliers, ou ordre de Malte, la limite communale avec le Mas se situant de nos jours en contrebas du château, à environ 200 m à l'ouest, soit très près de celui-ci, à portée d'arc ou d'arbalète à l'époque où cette limite fut fixée.

Dès 1162-1163, Isarnus de Moleira (de Molières) est cité comme procurator puis comendator de la domus de Curtibus (maison de Cours).

En 1269, les templiers ayant réussi à absorber la majeure partie ou la totalité des terres avoisinantes, la domus militae templi de Curtibus (maison de la milice du temple de Curtibus) est citée, mais sans que l'on sache si elle était alors fortifiée. Le site n'est en effet officiellement considéré comme fortifié qu'au siècle suivant, à l'époque où les hospitaliers en sont devenus les maîtres et où la région connaît les affres de la guerre dite de Cent-ans. La mention tardive de castrum de Curtibus (château de Curtibus) apparaît ainsi en 1347. On présumera toutefois que les fortifications de ce château de Cours sont bien plus anciennes que cette première mention, vraisemblablement construites dès le XIIIe et non au XIVe siècle.

Citerne du Château
Sources image: Christian Pioch.
Cette immense citerne, de 8,2 X 4,2 de superficie au sol, et de plus de 1,5 m de profondeur.
Contenait sans doute autour de 100 à 150 m3 d'eau.
Sachant que pour capter 50 à 70 m3 de pluies annuelles.
Il faut au moins 100 m2 de toiture.
On imagine sans peine l'importance des couvertures de bâtiments qui alimentaient une telle réserve souterraine.

Malgré son importante citerne (cf. infra), ce château templier, flanqué d'une petite bourgade de quelques maisons sur son flanc sud-oriental, avait l'inconvénient d'être niché dans une région trop aride pour y laisser subsister longtemps, dans des conditions acceptables, des populations et une garnison, même modestes, les ruisseaux avoisinants n'étant que des oueds très vite asséchés et aucune source digne de ce nom ne s'ouvrant à proximité. De plus, l'intérêt militaire en devint assez vite limité une fois la paix revenue dans la contrée.

Les populations se dispersèrent donc assez vite, sans doute bien avant la fin du Moyen-Age, en direction des proches localités situées en contrebas, à Fajac ou au Mas, s'installant ainsi le long des cours d'eau pérennes, avec moulins, où l'on pouvait vivre avec plus d'aisance, tout en conservant l'usage des terres, des pâtures et des forêts sises dans la montagne avoisinante. Dans les environs du Mas et de Fajac, des moulins sont ainsi attestés dès 1157-1167, «  ad Lausam de Passo  » et à la «  Lausa  », dans le terroir du Layrou (cf. Laurent Macé, «  L'utilisation des ressources hydrauliques par les templiers de la commanderie de Douzens  », Archéologie du Midi médiéval, 1994, p. 99-113).

L'abandon du château des Cours des templiers semble donc définitif à des époques sans doute très anciennes, peut-être précipité lors du grand effondrement démographique, propre au XIVe siècle, qui désertifia nombre de campagnes.

Vestiges de mur
Sources image: Christian Pioch.
Vestiges de mur.
Entrecoupant la terrasse comprise entre les deux murailles de l'ancien château

Il sera en tous cas détruit dès juin 1575, à l'occasion des guerres de religion, quand le gouverneur de Carcassonne, Laviston, après avoir canonné le proche château des Mas-des-Cours, tenu par les religionnaires, se porta ensuite sur Montlaur, à l'est. Il fit alors détruire par Ramon et Nazère Malvès, l'un maçon, l'autre charpentier, ce réduit fortifié qui aurait pu, malgré son isolement, servir encore dans la contrée d'inexpugnable camp retranché aux troupes ennemies.

L'ancienne église Notre-Dame, le château des Cours et le terroir de Fajac en 1778
Cette église mariale qu'indiquait la carte Cassini était en piètre état à la fin du XVIIIe siècle quand, en janvier et février 1778, le frère Chrisostome de Gaillard d'Agoult, chevalier de l'ordre de Malte, et Joseph Goutard, prêtre de l'église prieurale et collégiale de Saint-Gilles, dressèrent l'état des biens et des revenus temporels et spirituels qui dépendaient alors de la commanderie hospitalière de Douzens.

Cette commanderie de Douzens était l'un des multiples établissements de l'immense prieuré de Saint-Gilles, établi en France méridionale pour les possessions que l'ordre de Malte tenait dans cette portion de la chrétienté.

Partis de Homps, en Minervois, ils sont à Douzens le 9 janvier (alors accueillis par maître François Simon, avocat au parlement et procureur fondé du bailli Riquetti Mirabeau), à Cabriac le 10, à Peyriac le 12, à Laroque-de-Fa ensuite, une dépendance de la commanderie d'Homps qu'ils visitent à l'occasion. Le 26 janvier, de retour sur les terres de la commanderie de Douzens, ils sont à St-Jean de Molières, à Fajac le 27, à Peyremale le 28, à St-Jean de Brucafel, à Carcassonne, le 29, puis filent dans la haute-vallée de l'Aude, atteignant Notre-Dame de Salles le 30, Magrie le 31, puis Campagne-sur-Aude le 3 février, se rendant à Carcassonne le 5 (cf. résumé de la visite par Jean Raffanel, «  la commanderie de Douzens, de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, ou ordre de Malte, en 1778  », Bulletin de la Société d'études scientifiques de l'Aude, 2002, p. 65-69, d'après le document conservé aux Archives de la Haute-Garonne, série H, registre 478 bis).

Le revenu total de la commanderie, toutes possessions et tous droits confondus, est assez conséquent pour l'époque, soit 16034 livres, dégageant un revenu net de 13860 livres 17 sols et 5 deniers (soit environ 4,3 kg d'or fin). Le chef-membre de Douzens et ses dépendances immédiates, Cabriac, Peyremale, Fajac et St-Jean de Brucafel, représentent alors 8310 livres de revenu, pour 2600 à Peyriac, 3800 à Magrie, Notre-Dame de Salles et Campagne, et 1314 à St-Jean de Molières, plus 10 livres d'une rente due par le séminaire d'Alet.

Mais le tout est assez piètre état, tant sur le plan de l'exploitation agricole que pour l'entretien des églises ou de la voirie. Le commandeur est certes seigneur spirituel de l'église extra-muros de Fajac, Notre-Dame Delbaux (lire des Vals ou des Rochers), y partageant à parts égales le produit de la dîme et le dixième de tous les fruits avec l'archevêque de Narbonne, et il est même seigneur temporel pour de nombreuses terres. Mais, si 38 contribuables sont inscrits au compoix de Fajac, avec 11 métairies alors en exploitation, se partageant 1170 sétérées de terres, soit environ 380 hectares, l'ancienne prospérité des lieux n'est plus.

A Fajac, comme dans la proche localité de Molières, les habitants «  n'ont pas même de chemins praticables pour aller dans les villages voisins.  » Les litiges fonciers et de droits d'usage, notamment forestiers, comme les litiges sur les divers droits féodaux, sont pléthore.

L'ancien château des templiers, non cité au compoix de 1790, est alors sans doute inclus dans les terres communales de la seigneurie, non compiézées, seules les parcelles exploitées par les particuliers étant allivrées à la taille. Les commissaires rapporteurs notent tout au plus les ruines «  d'un ancien château, dit le Castelas, et d'un moulin à vent qui, suivant la tradition du pays, appartenaient [jadis] aux templiers.  » Quant à «  l'ancienne église paroissiale [Notre-Dame], [celle-ci] est entièrement abandonnée et découverte, n'y restant que les deux arceaux de maçonnerie qui soutenaient le toit  » D'ailleurs, «  la pierre sacrée (l'autel) et le tableau ont été transportés dans l'église du lieu  », l'abandon du site ayant été autorisé par le commandeur en 1771.

Seule la métairie de Peyremale, avec ses 150 sétérées de terres et un troupeau de près de 500 bêtes, attire véritablement l'attention, domaine sur lequel nous donnerons en fin de la présente étude le bail de location qui en fut dressé en 1786, mais dont les bâtiments, dès 1778, avaient «  un grand besoin de réparation.  »

Des bornes délimitent encore l'ancien domaine des Templiers et des hospitaliers

Croix latine de délimitation
Sources image: Christian Pioch.
Croix latine pour les domaines de l'évêque d'un côté.
Croix de Malte de l'autre, pour le domaine des hospitaliers de St-Jean de Jérusalem.
Successeurs des templiers dans la contrée.

Plusieurs bornes de pierre matérialisent de nos jours encore l'ancienne limite des possessions templières puis hospitalières sises au terroir de Fajac, cette limite étant devenue par la suite limite communale avec diverses localités, dont le Mas-des-Cours.

La première que nous connaissons, à environ 250 m au nord du château (les bornes intermédiaires éventuelles étant noyées dans une végétation inextricable), est située sur le flanc du col emprunté par l'ancien chemin reliant Fajac au Mas, tout près et au nord de celui-ci, non loin d'une ligne électrique reliant les deux localités.

Elle est constituée d'un parallélépipède de grès de petites dimensions et porte sur sa face ouest une belle croix latine, les vestiges de ce qui fut jadis une croix hospitalière étant par contre très dégradés et même presque effacés sur la face opposée.

Croix de Malte
Sources image: Christian Pioch.
Croix latine pour les domaines de l'évêque d'un côté.
Croix de Malte de l'autre, pour le domaine des hospitaliers de St-Jean de Jérusalem.
Successeurs des templiers dans la contrée.

En continuant vers le nord, en cheminant sur la rupture de pente dominant la rive gauche du ravin de la Clauzo, et en parvenant au sommet du mamelon appelé Montclar (cote 379 de la carte), se trouvent par contre deux belles croix de Malte sur la face méridionale d'un assez gros rocher de grès semi-enterré. La croix inférieure émerge pour moitié du sol, la seconde est bien visible et est encore très nette, malgré l'attaque des agents atmosphériques.

Descriptif sommaire du château
L'accès normal au château se faisait depuis le sud, à partir du col séparant la cote 399 portant le château de la cote 412, ce col étant alors relié au chemin de Fajac au Mas, sis à l'opposé, par un chemin contournant le Castellas par l'est.

L'accès le plus aisé au château se fait aujourd'hui par une sente, étroite et très abrupte, gravissant le flanc nord du mamelon. Nous décrirons cependant les vestiges du château tels qu'ils sont visibles pour celui qui arriverait, comme jadis, à l'époque templière, par le col compris entre les cotes 412 et 399.

Une petite tour circulaire, de 3,80 m de diamètre intérieur, avec des murs de 1,10 m d'épaisseur, constituait jadis sur ce col une défense avancée du château, à environ 300 m de celui-ci, ou du moins un moulin à vent, cité ruiné en 1778 lors de la visite des représentants du bailli de l'ordre de Malte. Ses murs subsistent aujourd'hui sur environ 3 m de hauteur. La porte, de 1,10 m de largeur, coiffée de quatre monolithes de pierre, dont l'un supporté, côté extérieur, par un corbeau, est encore en place. Ce moulin à vent était jadis fort utiles puisque le château et sa bourgade étaient situés loin au-dessus des rivières de la contrée.

En remontant vers le nord d'environ 250 m, en direction du château, se trouvent ensuite les vestiges, très éboulés, et sans appareillage de qualité, de ce qui fut vraisemblablement jadis un petit village de cabanes très rudimentaires; comme il s'en faisait tant au Moyen-Age, à simples toits de branchages reposant sur des murs de faible élévation, à la manière des cabanes les plus primitives. Ce sont-là les premiers éléments de l'ensemble fortifié proprement dit, le tout, cabanes comprises avec le château, pouvant avoisiner les 1000 à 1200 m² de superficie. Les ruines de ces cabanes sont hélas informes, envahies, comme la majeure partie du château lui-même d'une épaisse forêt de chênes, fréquemment embroussaillée et parfois impénétrable.

Vestiges de la muraille
Sources image: Christian Pioch.
Vestiges de la muraille intérieure.
Entourant un réduit elliptique d'environ 45 m de longueur sur 25 de largeur

Franchissant toujours vers le nord une sorte de fossé encombre d'éboulis, on accède alors à une plate-forme, de 5 à 8 m de largeur, qui fait le tour du château proprement dit et qui est encombrée, ici ou là, outre une épaisse végétation, d'une partie des murailles éboulées de celui-ci.

On peut supposer que le pourtour extérieur de cette plate-forme était jadis défendu par une palissade de bois, mais quelques éléments de pierre montrent que ce pourtour était toutefois jadis bâti sur l'extérieur, au moins en murs de soutènement, dont une bonne partie a aujourd'hui glissé dans la pente très abrupte du mamelon.

Le château proprement dit en occupe le centre, en nette surélévation, par talus et murs, formant un réduit sommital elliptique d'assez vaste dimension, qui est orienté du sud-est au nord-ouest. Ce vaste réduit fortifié mesure ainsi environ 45 m de longueur pour environ 25 de largeur.

Les vestiges de la muraille, en grès d'extraction locale, sont bâtis en gros appareil pour les parties basses, en moellons plus petits pour les parties supérieures. Ils s'élèvent sur 2 à 4-5 m de hauteur, renforcés par un talutage dans leur partie basse, et sont relativement peu épais. Sans doute étaient-ils jadis bien plus hauts puisqu'une seule meurtrière a pu être partiellement conservée sur le flanc sud et il est fort possible qu'un petit donjon ait jadis surmonté le tout.

Vestiges de la muraille
Sources image: Christian Pioch.
Vestiges de la muraille intérieure.
Entourant un réduit elliptique d'environ 45 m de longueur sur 25 de largeur

Ces vestiges de murs sont aujourd'hui conservés sur huit tronçons distincts, séparés par des zones entièrement éboulées et le plus souvent gagnées par les arbres et les broussailles, d'où un ensemble assez peu lisible et très dégradé depuis les destructions de 1575.

Il délimite une vaste cour ovoïde et sensiblement plane à laquelle on accédait, semble-t-il, par un étroit passage oriental. Mais ce qui a été considéré comme passage oriental par l'un de nos prédécesseurs, pourrait être en fait une très petite chapelle intérieure dont il ne subsisterait aujourd'hui que les murs intérieurs, hors abside, désormais disparue, un peu à la manière de celle nous avons pu observer de nos propres yeux, à l'intérieur même du château templier de la Couvertoirade, en Larzac, encore en élévations mais absolument infime par sa taille puisque réservée seulement à une poignée de membres, non à une population villageoise.

Vestiges de l'ancienne chapelle
Sources image: Christian Pioch.
Au sommet du mamelon, côté oriental.
Subsistent néanmoins les vestiges de ce qui fut vraisemblablement l'ancienne chapelle.
Intérieure dont on aperçoit ici le mur méridional.
Côté intérieur, avec sur la droite, à ras-de-sol.
Le haut de l'ancienne porte d'accès.

Sur le côté sud de ce passage ou de cette chapelle, à l'intérieur du réduit fortifié, on aperçoit en tout cas à ras de sol les arcatures d'une porte, constituées par huit grosses pierres, le remplissage par éboulis atteignant pratiquement la hauteur de cette ouverture. Le sol de la cour intérieure, du moins dans ce secteur, est donc nettement plus bas que celui apparent.

Vers le milieu de la cour intérieure, à l'ouest de celle-ci, une ouverture carrée, à même le sol, recouverte par sécurité d'une tôle de fer, constituait jadis le puits d'accès et de puisage à une vase citerne souterraine incluse dans la butte fortifiée.

Pour l'atteindre, on peut descendre avec précaution le talus presque vertical menant à l'ouverture occidentale de celle-ci, ou bien emprunter la tranchée, très embroussaillée et d'époque vraisemblablement récente, qui mène plus aisément à celle-ci depuis la muraille extérieure.

Ancienne citerne du château
Sources image: Christian Pioch.
Vue intérieure de l'énorme ancienne citerne du château templier de Cours.

Cette citerne est exceptionnelle par ses dimensions et il n'est pas impossible que d'autres salles souterraines existent tout autour, leurs entrées étant aujourd'hui cachées par les éboulis tombés vers l'intérieur des murailles.

Elle mesure 8,20 m de longueur sur 4,20 m de largeur, la voûte, en berceau, reposant sur des piédroits d'au moins 1,50 m de hauteur, la hauteur totale étant inconnue, la partie basse de la citerne n'étant pas visible en raison de l'important remplissage de terre et de pierres qui encombre le fond et qui y fut amené vers 1900 quand les lieux furent transformés en bergerie.

La contenance de cette citerne pouvait être de l'ordre de 100 m3, avec deux orifices de remplissage visibles dans la voûte, celle-ci étant située à moins d'un mètre de la surface actuelle de la cour.

Vestiges de la muraille
Sources image: Christian Pioch.
Un des rares morceaux de muraille qui ne soit pas noyé dans la végétation conquérante

Il va de soi que seules des fouilles sérieuses permettraient d'en savoir davantage et que la coupe des arbres qui envahissent inexorablement les lieux permettrait déjà de mieux lire dans ses détails architecturaux cet admirable monument méconnu du grand public et même de certains «  spécialistes  » de l'histoire templière qui s'évertuent de vouloir faire du Mas-des-Cours un fief templier, alors même que le terroir et le château templiers des Cours sont situés sur la seule commune voisine de Fajac-en-Val.

La métairie de Peyremale en 1786-1793
Lors de la vente des biens nationaux, effectuée à la Révolution au profit de la collectivité nationale, d'où leur nom, les biens dits de première origine, furent constitués par ceux du clergé, y compris ceux de l'ordre de Malte, pourtant puissance étrangère.

Le 24 avril 1793, le citoyen Paul Nouguié, ménager de Villetritouls, dressa ainsi en 42 articles, pour le district de Lagrasse, un état détaillé du bien, la métairie de Paire Malle (lire Peyremale) que le commandeur de Douzens détenait à Fajac, estimant le tout à 60184 livres (Archives de l'Aude, 1 Q 2051).

Cette métairie figurait au compoix de 1790 comme bien roturier du commandeur de Douzens et comportait 150 cannes (600 m²) de bâtiments. Par contre, le reste du territoire de Fajac, s'il faisait partie de la seigneurie foncière et spirituelle du commandeur de Douzens, n'était pas la propriété de celui-ci, mais la propriété collective ou individuelle des habitants du lieu ou d'autres localités.

Les Archives de l'Aude conservent, sous la cote 1 Q 2179, à l'époque du dernier commandeur de Douzens, un Mezay-Marnésia, copie du bail qui fut passé le 6 février 1786 pour ce domaine de Peyremale et les droits de l'ordre de Malte sur les alentours (restitué ci-après en orthographe et ponctuation moderne), moyennant la somme annuelle de 4500 livres de droits de fermage :
«  Par devant le notaire royal à Carcassonne soussigné (Godan), fut présent Me (maître) Jacques Gourg, ancien procureur au sénéchal et siège présidial de Carcassonne, demeurant au dit Carcassonne, fondé de procuration de très haut et très puissant seigneur Anne Etienne Gaspard de Mezay-Marnésia, colonel commandant du régiment des chasseurs des Ardennes, commandeur de la commanderie de Douzens, résidant ordinairement à Lons [le] Saunier, en Franche-Comté, suivant l'acte retenu par nous dit notaire le cinq septembre dernier, lequel, en ladite qualité, a volontairement affermé, pour le terme de neuf années, qui commenceront le premier mai prochain et qui finiront à pareil jour de l'année mil sept cent quatre-vingt-quinze, si tant est que ledit seigneur reste en possession de ladite commanderie pendant le terme de la présente ferme, laquelle, cependant, aura lieu tout au moins durant quatre années, nonobstant toutes omissions, morts et changements quelconques de commandeur, suivant la bulle authentique qu'a obtenu ledit seigneur commandeur du grand-maître de Malte le dix neuf juillet mil sept cent quatre-vingt-quatre, ladite bulle déposée [par-]devers nous notaire suivant la susdite procuration, au Sr(sieur) Vincent Ramel, bourgeois, habitant du lieu de Floure, ici présent et acceptant, savoir et le domaine de Peyremale et les droits seigneuriaux de Fajac dont ledit seigneur jouit dans le diocèse dudit Carcassonne, consistant en dîme, droits seigneuriaux, bâtiments, terres cultes et incultes, prés, pacages et autres fonds quelconques en dépendant, le tout ainsi et de même que les précédents fermiers en ont joui ou dû jouir, dans laquelle afferme n'est (ne sont) point compris la chasse, la pêche, les amendes et confiscations, [comme] ne pourra ledit preneur couper aucun arbre vif, ni mort, [mais] pourra néanmoins, ledit preneur, couper le mort-bois et ébrancher les arbres pour faire seulement le feuillage nécessaire pour la nourriture des troupeaux et le bois qui en proviendra lui appartiendra, sera tenu ledit preneur de consommer les pailles qui proviendront du domaine de Peyremale, seulement sur icelui, de les convertir en fumier et de porter ledit fumier sur les parties desdits fonds qui en auront le plus besoin, sans pouvoir les divertir ailleurs, sera encore tenu, ledit preneur, d'entretenir les couverts des bâtiments de la présente ferme et de les garantir des larmes et gouttières, de jouir desdits fonds et de les travailler en bon ménager et père de famille, et de laisser à la fin de ce bail lesdits fonds travaillés à cinq labours, y compris le couvrir, ensemble les outils aratoires, pour desdits labours, outils aratoires et semences qui seront jetées sur lesdits fonds la dernière année de ce bail, ledit preneur être remboursé de tout par ledit seigneur ou par le fermier qui lui succédera sur le pied (tarif) qui sera amiablement fixé entre-eux ou à dire et jugement d'experts, tout ainsi et de même qu'il l'a fait envers l'ancien fermier à l'époque de son entrée en possession de la présente ferme qui lui fut consentie par Messire de Mirabeau, ancien commandeur d'icelle, par acte retenu par nous dit notaire le seize octobre mil sept cent quatre-vingt-un, pourra ledit seigneur commandeur, ou son fondé de procuration, commettre une personne pour voir jeter les semences sur lesdits fonds t vérifier la quantité et [la] qualité des grains que ledit preneur y fera jeter la dernière année de ce bail, auquel effet ledit preneur s'oblige d'avertir ledit seigneur ou son fondé de procuration, du jour qu'il devra jeter lesdites semences afin que ledit commis s'y transporte et dresse un état certifié d'icelles, sur lequel dit état lesdites semences seront reçues pour bonnes et valables, au paiement duquel dit commis, ledit preneur sera tenu, en seul, de fournir, ne pourra ledit preneur mettre récolte sur récolte, sur lesdits fonds, sauf sur les terres incultes qu'il pourra défricher, en semences chaque année, les six premières années de ce bail, pourra ledit preneur mettre récolte du récolte sur les feraljals, sans cependant les laisser grainer et les laissera à la fin de ce bail semés, attendu qu'il les prit de même lors de son entrée en possession de la présente ferme, ne sera tenu, ledit seigneur, envers ledit preneur, à autre indemnité qu'à celle du cas fortuit de grêle seulement, et sur le pied que Monseigneur l'évêque dudit Carcassonne indemnise ses fermiers, à la charge pour lui de dénoncer par acte le dommage au dit seigneur ou son fondé de procuration trois jours après [le sinistre] être arrivé, autrement il n'y sera en aucun égard, lequel bail à ferme est ainsi fait moyennant la somme de quatre mille cinq cents livres, pour chacune desdites neuf années, quitte de toutes charges, si point en sont dues, laquelle somme ledit preneur promet et s'oblige de payer au dit seigneur commandeur entre les mains et dans le domicile, au dit Carcassonne, dudit Me Gourg, en deux termes et paiements égaux de deux mille deux cent cinquante livres chacun, dont le premier sera fait le vingt-cinq décembre prochain et le second le jour et fête de Pâques de l'année prochaine, et ainsi de suite chaque année aux susdites époques, jusqu'à la fin de ce bail, sans pouvoir laisser accumuler les paiements, à peine de tous dépens, moyennant quoi ledit Me Gourg, comme [il] procède, promet de faire valoir au dit preneur le présent bail envers et contre tous qu'il appartiendra à peine de tous dépens. Et sur ce, est survenu le Sr (sieur) Jean-François Abraham, bourgeois, habitant dudit Carcassonne, lequel, parfaitement instruit du contenu au présent acte, comme fait et passé en sa présence, s'est volontairement rendu caution envers ledit seigneur commandeur pour ledit preneur et solidairement avec ce dernier, l'un pour l'autre et l'un d'eux en seul, pour le tout, sans division ni discussion d'action, à laquelle et à toute appellation de garantie il renonce par exprès, promet au dit seigneur ledit Me Gourg pour lui accepter de remplir et exécuter les clauses, conditions et obligations du susdit bail à ferme, comme en faisant son fait propre à peine de tous dépens. Et, pour l'observation de tout ce dessus, ledit Me Gourg oblige les biens de son dit constituant et lesdits preneur et caution les leurs, présents et à venir, et par exprès leurs personnes qu'ils soumettent aux rigueurs de justice. Fait à Carcassonne dans la maison d'habitation dudit Me Gourg, l'an mil sept cent quatre-vingt-six et le quatre février après-midi, en présence des Srs (sieurs) Jean-Louis Guiraud et Esprit Buffavier, praticiens, habitants dudit Carcassonne, signés au registre avec lesdites parties et nous, Ambroise Godan, notaire susdit soussigné. Contrôlé à Carcassonne le 11 février 1786. Reçu quarante-huit livres [etc.]  »

On précisera ici que Jean Antoine Joseph Charles Elzear Riquetti de Mirabeau (1717-1794), bailli de l'ordre de Malte et oncle du célèbre constitutionnel, passé à Douzens avec les années 1770 et 1780, fut avec les années 1790 le dernier commandeur de la commanderie de Sainte-Eulalie, en Larzac.

Pour les armoiries des commandeurs de Douzens, voir Joseph Montlaur; «  Liste et armorial des commandeurs de Douzens  », Bulletin de la Société d'études scientifiques de l'Aude, 1937, p. 237-258.
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Christian Pioch, auteur de diverses études sur les templiers et hospitaliers de Languedoc
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