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Toulouse et le proche Orient au XIIe siècle

Le 27 novembre 1095, dans la bonne ville de Clermont, où se tient un important concile présidé par le pape Urbain II, un cri retentit : « Dieu le veut ! »
Par un coup de théâtre dont il a le secret, le souverain pontife vient d'emporter l'adhésion populaire à son grand projet oriental.
Massée sur la place de l'église où siègent les pères conciliaires, la foule a entendu son appel. Il faut aller délivrer le tombeau du Christ : « Dieu le veut ! »
Il faut aller châtier les Turcs, peuple maudit et impie, qui massacrent les Chrétiens ou les réduisent en esclavage : « Dieu le veut ! »
Il faut aller rouvrir les églises chrétiennes confisquées au profit de l'Islam : « Dieu le veut ! »
Chacun se sent concerner et marque son vêtement d'une étoffe rouge en forme de croix. Le peuple de la Croisade se met en marche, sanctifié par la bénédiction pontificale.

L'appel d'Urbain II est un véritable ordre de mobilisation européenne. Il vise à défendre la Foi menacée par la nouvelle invasion musulmane. Les Turcs sont à portée du Bosphore, prêts à passer en Europe. Leur armée borde la Méditerranée. Il est temps de réagir, de répondre au Djihâd par la Guerre Sainte ! Le moment est d'ailleurs favorable. Des divisions internes menacent l'Empire turc : l'héritage du sultan Mélik-shah, mort le 15 novembre 1092, est disputé entre ses fils, ses neveux et ses cousins. Il faut partir : « Dieu le veut ! »

Parmi ceux qui répondent à l'appel d'Urbain II en prenant la croix, figure le puissant comte de Toulouse Raimond de Saint-Gilles. Celui-ci n'est pas un inconnu pour le pape, qui connaît sa piété, la solidité de ses sentiments filiaux envers l'Eglise. Son ami Adhémar de Monteil, évêque du Puy, a parlé de lui à Rome, rappelant ses exploits en Espagne lors de la troisième croisade française dirigée par le duc de Bourgogne en 1087.
Et puis, l'Etat toulousain est riche : le pape est persuadé qu'il pourra en obtenir une aide importante. A peine débarqué en France, Urbain II se hâte d'aller au Puy, où il arrive le 15 août 1095, pour y célébrer la fête de l'Assomption. A cet instant même, il est assuré de l'appui du comte de Toulouse.

Second fils de Pons de Toulouse et d'Almodis de la Marche, Raimond de Saint-Gilles est alors au faîte de sa puissance. Malgré ses cinquante ans passés et ses cheveux gris, il a encore belle prestance. Robuste de corps, énergique de visage, c'est un chevalier courageux, dévoué à la cause de Dieu, ayant un sens profond de l'honneur. Mais, comme tout homme du Moyen Age, il porte la marque d'un caractère contrasté. S'il est très religieux, voire superstitieux, comme en témoigne sa dévotion à saint Robert fondateur de La Chaise-Dieu, il est aussi un guerrier fanatique, violent, sans pitié. Prompt et bouillant, irascible, il entre dans de violentes colères qui se calment aussi vite qu'elles se sont enflées, d'où sa versatilité. Malgré tout, il est intelligent, tenace, prêt à saisir la chance pourvu qu'elle se présente.

C'est justement cette chance qui lui permet de rassembler sous son autorité le Languedoc, de la Garonne au Rhône, et les marches septentrionales, du Quercy au Gévaudan, tout en faisant valoir ses droits sur la Haute et la Basse Provence.
Prince habile et ferme, Raimond s'emploie à y maintenir l'ordre, en réduisant l'agitation seigneuriale, et à en écarter les menaces venant de l'Aquitaine et de la Catalogne. Entre 1088 et 1093, alors que son frère Guilhem IV vit toujours, il prend fièrement les titres de « comte de Toulouse, duc de Narbonne et marquis de Provence. » Par-là, il veut montrer qu'avec son aîné il a des droits indivis et qu'il participe déjà à la gestion des affaires toulousaines.

Ami et soutien de l'Eglise, Raimond ne manque pas de favoriser les moines clunisiens, comblant de bienfaits les abbayes de La Chaise-Dieu et de Saint-Gilles. Désireux de donner satisfaction aux réformateurs, il renonce à divers droits injustes auxquels il prétendait sur l'héritage des défunts évêques de Béziers (1084). Envers Saint-Sernin de Toulouse il se montre plein de prévenances, s'efforçant de ne pas empiéter sur la liberté de ce monastère. Cette attitude lui vaut d'être associé aux plans de la Papauté pour la défense et le développement de la Chrétienté. S'il participe à l'expédition française venue en 1087 au secours des chrétiens d'Espagne vaincus par les Almoravides, il est avant tout séduit par le projet oriental élaboré par les papes Grégoire VII (1073-1085) et Urbain II (1088-1099) : lancer une expédition armée sur la route de la Palestine, délivrer Jérusalem et sauver au passage Byzance (Constantinople) du schisme. L'appel de Clermont s'inscrit dans cette perspective.

Le lendemain même de son discours historique, Urbain II reçoit l'adhésion de Raimond de Saint-Gilles (28 novembre 1095). Dans son esprit, il ne doit y avoir qu'une armée d'Orient, confiée au comte de Toulouse et au légat pontifical Adhémar de Monteil. Le pape connaît la valeur des seigneurs du Midi, rompus dans la lutte contre l'Islam. Pour stimuler les enrôlements, il entreprend une tournée qui de Limoges, en passant par Poitiers, Saintes et Bordeaux, le conduit à Toulouse, où il arrive au commencement de mai 1096. Il y est rejoint par Raimond, en présence duquel il consacre solennellement l'autel majeur de Saint-Sernin (24 mai). Durant près de trois mois, le souverain pontife parcourt le Languedoc aux côtés du comte, achevant son voyage à Nîmes où il préside un dernier concile, moins connu que celui de Clermont dont il complète pourtant les décisions (juillet 1096).

Tandis qu'Urbain II s'applique à recruter le contingent méridional, l'appel de Clermont porte ses fruits dans d'autres pays. A la grande surprise du pape, trois autres armées se constituent, groupant respectivement : les Français du domaine royal ; — les Français du Nord, les Lorrains et les Allemands ; — les Normands de l'Italie méridionale. Mais, seule, l'Armée du Midi répond aux aspirations pontificales, d'autant plus que le légat Adhémar de Monteil, évêque du Puy, est un prélat convaincu de son rôle religieux, secondé par le comte de Toulouse qui apparaît aux yeux du pape comme le type accompli du chevalier chrétien.

En attendant le départ, prévu en principe pour le 15 août 1096, les croisés se préparent. Les contingents placés sous le commandement de Raimond de Saint-Gilles sont qualifiés de « Provençaux » par les gens du Nord. En fait, ils se composent de Bourguignons, d'Auvergnats, de Gascons, de Goths (du Languedoc méditerranéen) et, enfin, de vrais Provençaux. Il est impossible d'évaluer leur nombre exact, tant les sources d'information sont contradictoires. Certains historiens parlent de cent mille hommes. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que le comte de Toulouse est responsable de la plus importante formation armée de la Croisade.

La concentration des forces croisées s'opère assez rapidement. Il faut voir dans cette célérité le résultat de la prospérité de l'Etat toulousain, favorisée par la paix relative qui y règne depuis plusieurs années. Nous savons le rôle joué par l'Eglise languedocienne dans le développement du mouvement de la Paix de Dieu. Le moment est donc favorable pour que les Chrétiens réconciliés s'unissent contre les Infidèles.

En ce qui concerne le commandement de l'armée « provençale », celui-ci a été confié par le pape à Raimond de Saint-Gilles. Mais il ne s'agit pas d'un commandement exclusif et absolu. Raimond doit tenir compte du « conseil des chefs », qui prend les décisions importantes et où il est à égalité avec les autres. C'est que l'Etat toulousain n'est pas un état féodal hiérarchisé comme dans la France du Nord : il apparaît comme un état fédéral, dont le ciment est la fidélité à la foi jurée.
Les vassaux du comte ne sont aucunement tenus de lui obéir impérativement. Ils peuvent même manifester leur indépendance, s'ils le jugent utile. C'est ce que font certains qui, comme les Trencavel, refusent de participer à la délivrance de Jérusalem. Par contre, Raimond de Saint-Gilles peut compter sur le concours de Gaston IV de Béarn, de Guilhem Amanieu d'Albret, de Golfier de Lastours, de Raimond de Turenne et de beaucoup d'autres.

L'autorité du comte de Toulouse est également limitée par celle du légat pontifical, ainsi que par les critiques de nombreux clercs dont Raimond d'Aguiliers, chapelain de Raimond de Saint-Gilles, se fait l'écho complaisant. Parmi ces clercs, il y a plus de séculiers que de réguliers, dont les principaux représentants sont l'abbé de Saint-Victor de Marseille et le prieur de La Chaise-Dieu. Quant à la hiérarchie épiscopale, elle est bien représentée par les évêques du Puy, d'Orange, de Valence et d'Apt.

Les nerfs de Raimond de Saint-Gilles sont, de plus, mis à rude épreuve par la présence d'un grand nombre de pauvres indisciplinés, attendant tout de la générosité du « chef », prêts à se livrer aux pires exactions en cas de besoin. Et puis, il y a les femmes qui suivent l'armée. Bien sûr, les épouses des croisés sont présentes, comme la comtesse Elvire, troisième femme de Raimond, qui mettra au monde Alfonse Jourdain au cours de l'expédition. Plus grave est la présence des prostituées, qui serviront de « boucs émissaires » aux prédicateurs chaque fois que la victoire abandonnera le camp des croisés.

Malgré tout, les préparatifs vont bon train. L'argent ne manque pas, d'autant plus que Raimond de Saint-Gilles fournit l'essentiel des crédits : commerçants, Juifs du Midi, églises et abbayes sont mis à contribution pour le triomphe de la Chrétienté ! Disposant ainsi des moyens nécessaires, l'armée « provençale » va pouvoir se mettre en route. Ses forces principales sont constituées par les chevaliers lourdement armés d'une cuirasse, d'un heaume, d'un bouclier, d'une épée et d'une lance. Les fantassins, plus légers, ne portent que des arcs et des flèches. Les différents contingents se distinguent par leurs bannières aux couleurs vives : dorées, vertes, rouges...
Et puis, il y a les ouvriers enrôlés par le comte pour construire et manier les machines de siège. Le cri de ralliement est « TOLOSA ! », qui sera poussé chaque fois qu'une ville sera prise.

Enfin, vient le jour du départ... Contrairement aux prévisions du pape, l'armée « provençale » ne quitte ses cantonnements de Lyon qu'à la fin d'octobre 1096, se mettant en route par échelons successifs. Raimond de Saint-Gilles s'éloigne de son pays natal pour ne plus y revenir. Ses sentiments pour la cause de Dieu priment tous les autres : il accepte volontairement de perdre l'Etat qu'il a patiemment constitué dans le Midi de la France. Il n'est donc pas possible de prétendre, comme le font certains historiens, qu'il est poussé par une soif insatiable de nouvelles terres et de nouvelles richesses.

Il ne nous appartient pas de conter l'histoire de la première Croisade. D'autres historiens, plus qualifiés, l'ont fait avant nous. Aussi, nous contenterons-nous de parler des événements auxquels Raimond de Saint-Gilles a été mêlé jusqu'au moment de la fondation du comté de Tripoli.

Par l'Italie du Nord, les « Provençaux » parviennent en Slavonie, le pays des Slaves, où le danger est permanent. Par prudence, ils suivent la côte dalmate, où ils sont harcelés par les Serbes, dont les coups de main sont favorisés par le relief tourmenté et le brouillard. Raimond de Saint-Gilles paye de sa personne à l'arrière-garde, protégeant ses hommes l'épée à la main. Quel soulagement en arrivant à Durresi (Durazzo), en pays « chrétien », où le comte de Toulouse est accueilli par Jean Comnène, gouverneur byzantin de la ville !

Assurés d'être ravitaillés à condition de ne se livrer à aucun pillage, les « Provençaux » se remettent en marche, accompagnés sur leurs flancs par une escorte byzantine, avec laquelle les rapports ne tardent pas à se dégrader. Les incidents se multiplient au fur et à mesure de la progression à travers l'Epire et la Macédoine. A Thessalonique, Adhémar de Monteil tombe malade : on l'y laisse avec une petite troupe pour le protéger. L'énervement des méridionaux croît en proportion des kilomètres parcourus. Des soldats affamés s'emparent de la ville de Roussa : (Turquie orientale), dont ils démolissent les remparts aux cris de « Tolosa ! » D'autres incidents se produisent à Rodostro (Rodosto en Grec et Tekirdag en Turc), à quatre jours de marche de Byzance (Constantinople). C'est alors que, le 18 avril 1097, des envoyés de l'empereur Alexis Comnène viennent demander à Raimond de Saint-Gilles de venir d'urgence conférer avec leur souverain.

La situation exige, en effet, la présence du comte de Toulouse à Byzance... Les autres armées de la Croisade sont déjà parvenues à destination avec leurs chefs, Godefroy de Bouillon et Bohémond de Tarente. Les relations ne font que se dégrader avec Alexis Comnène, qui veut faire des croisés des vassaux, sinon des mercenaires. Après bien des réticences, Godefroy et Bohémond acceptent de prêter hommage à la personne de l'empereur. Dans ces conditions, quelle va être l'attitude de Raimond de Saint-Gilles ?

Dès le début des entretiens, le comte de Toulouse rappelle à Alexis l'idéal de la Croisade. Ne reconnaissant d'autre maître que le Christ, dont il va délivrer le tombeau, il refuse de prêter hommage à l'empereur, à l'inverse de ce qu'ont fait Godefroy de Bouillon et Bohémond de Tarente. L'âpreté de la négociation atteint son point culminant, lorsque sont connus les incidents ayant opposé les croisés « provençaux » aux mercenaires byzantins. Raimond de Saint-Gilles accuse son interlocuteur de perfidie, tandis qu'Alexis soupçonne du pire les contingents occidentaux campant aux portes de Byzance (Constantinople). La discussion tournant à l'aigre, Godefroy de Bouillon et Bohémond de Tarente s'interposent pour apaiser les deux princes chrétiens.

Finalement, tout rentre dans l'ordre. Raimond de Saint-Gilles accepte de reprendre ses pourparlers avec l'empereur qui, de son côté, s'efforce de l'amadouer par des présents. Cet apaisement semble être le résultat d'une intervention de l'évêque du Puy, Adhémar de Monteil, remis du malaise qui l'avait contraint à un repos forcé à Thessalonique (Grèce). Quoi qu'il en soit, le comte de Toulouse souhaite conclure avec Alexis un accord de coopération devant permettre à l'armée des croisés de passer en Asie Mineure. Fidèle à la coutume de son pays, il veut contracter des engagements plutôt que de rendre hommage à l'empereur. En conséquence, il prête serment dans les formes en usage dans l'Etat toulousain, s'engageant à respecter les possessions impériales et à restituer à Alexis les terres byzantines qu'il viendrait lui-même à reconquérir sur les Turcs. De son côté, l'empereur promet de fournir aux croisses les approvisionnements nécessaires, de protéger les pèlerins et d'envoyer des subsides chaque fois qu'une ville serait délivrée du joug musulman, Enfin, Alexis s'engage à fournir une aide militaire.

Telle est la teneur du « pacte de Constantinople », auquel souscrivent tous les chefs de la Croisade, qui font serment de restituer à l'empereur byzantin toutes les provinces qu'ils libéreront au cours des opérations à venir. Cet accord ne fait pas l'unanimité dans le camp des croisés, surtout parmi la piétaille qui comprend difficilement l'interdiction du pillage et autres exactions dans les terres autrefois byzantines. Il en faudrait plus pour ébranler la détermination de Raimond de Saint-Gilles. Celui-ci jouit de la confiance d'Alexis Comnène, dont la sœur Anne nous a laissé un témoignage éloquent sur notre héros, disant de lui : « Saint-Gilles l'emporte sur tous les autres autant que le soleil sur les astres. »

Assuré de la bienveillance impériale, le comte de Toulouse reste à Byzance (Constantinople) jusqu'au 10 mai 1097. S'il s'attarde ainsi, c'est pour mieux surveiller le passage de ses troupes en Asie Mineure : le nombre des « Provençaux » est trop important pour que l'improvisation soit de mise. Le débarquement ayant réussi, les contingents se dirigent vers Nicée, devant laquelle les autres chefs de la Croisade campent depuis le 6 mai. La Guerre Sainte contre l'Islam est désormais engagée.

Après la prise de Nicée (1) (26 juin 1097), les croisés battent les Turcs à Dorylée (2) (1er juillet), puis entament leur descente vers la Syrie du Nord, efficacement secondés par les réfugiés arméniens du Taurus (3) et de Cilicie (4). Leur marche devient un calvaire sous un soleil implacable, dans un pays rendu encore plus désert par les Turcs. Ils parviennent enfin sur les rives de l'Oronte, à Antioche (5), dont ils s'emparent le 3 juin 1098 à l'issue d'un siège de plus de sept mois. A peine dans la place, ils doivent la défendre contre l'émir de Mossoul (6). La situation devient désespérée quand, soudain, on découvre la sainte Lance ayant percé le flanc du Christ. Cette relique, confiée à Raimond de Saint-Gilles en raison de sa grande piété, redonne courage aux croisés qui mettent leurs adversaires en déroute le 28 juin.
1. Actuelle Turquie, Nicée en Grec et Iznik en turc.
2. Dorylée ou Dorylaion (grec moderne) est une ancienne cité d'Anatolie, en Turquie. Ses ruines sont aujourd'hui situées à proximité de la ville d'Eskisehir.
3. Taurus, chaîne des monts Taurus en Turquie orientale.
4. Cilicie est une région historique d'Anatolie méridionale et une ancienne province romaine située aujourd'hui en Turquie.
5. Antioche, ou Antioche-sur-l'Oronte en latin : Antiochia ad Orontem) afin de la distinguer des autres Antioche plus récentes, est une ville historique originellement fondée sur la rive gauche de l'Oronte dans la Syrie historique et qu'occupe la ville moderne d'Antakya, en Turquie.
6. Mossoul (en arabe : al-mawsil ; en kurde : Mûsil) est la seconde ville d'Irak par son importance, chef-lieu de la province de Ninive, en Haute Mésopotamie, dans le Nord du pays.
Mossoul est une cité située au nord de la Mésopotamie et qui tient les routes reliant cette région à la Syrie. La création du comté d'Édesse dès 1098 la place sous la menace directe des Francs.


Mais la zizanie se glisse parmi les vainqueurs. Au mépris des droits de l'empereur byzantin, Bohémond de Tarente se fait reconnaître prince d'Antioche. Son exemple est contagieux. Baudouin de Boulogne, frère de Godefroy de Bouillon, s'empresse d'aller prendre Edesse, en Mésopotamie, dont il se proclame comte. Et c'est la curée. Chacun veut se tailler un fief dans la Syrie du Nord. C'est alors que la foule anonyme des pèlerins intervient, indignée par la cupidité des barons.
Le 5 janvier 1099, une émeute éclate, rappelant aux chefs croisés qu'ils sont là pour délivrer le tombeau du Christ. Pour Raimond de Saint-Gilles, cette mutinerie est un signe de Dieu : sans hésiter, il prend le chemin de Jérusalem, nu-pieds, à la tête de sa troupe. Par ce geste spectaculaire, le comte de Toulouse montre qu'il sait manier la foule, communiant avec elle dans le même idéal. Godefroy de Bouillon s'empresse alors de le rejoindre.

La marche sur Jérusalem s'accélère... Les croisés remontent la vallée de l'Oronte, puis obliquent vers la côte méditerranéenne qu'ils suivent depuis Tripoli jusqu'au nord de Jaffa. Prenant alors la direction de l'Est, ils traversent le plateau de Judée, parvenant enfin en vue de la Ville Sainte, alors au pouvoir des Fâtimides d'Égypte. La place succombe le 15 juillet 1099. Raimond de Saint-Gilles se distingue au cours des combats, s'emparant de la tour de David, malheureusement dépassé par ses troupes qui se livrent à un affreux massacre de musulmans.

Peu après la victoire, Godefroy de Bouillon est élu roi de Jérusalem (22 juillet) plutôt, avoué du Saint-Sépulcre. Les « Provençaux » ont voté pour lui, ayant très certainement le mandat de Raimond de Saint-Gilles. Le comte de Toulouse est néanmoins déçu, faisant des difficultés pour restituer la tour de David à son heureux rival. Finalement, il quitte Jérusalem, pour aller se baigner dans le Jourdain (28 juillet). Peu après, il participe à la bataille d'Ascalon, ville côtière située au nord de Gaza (12 août). De nouveau, Raimond se distingue au combat. Mais une malheureuse dispute éclate entre lui et Godefroy de Bouillon pour la possession de la ville. Il est temps d'aller ailleurs. Déjà son esprit se tourne vers le Nord, vers Tripoli qu'il a entrevu lors de la marche sur Jérusalem.

En participant héroïquement à la délivrance de Jérusalem, Raimond de Saint-Gilles a accompli son vœu. Mais il estime avoir encore une mission à remplir : maintenir la présence chrétienne en Terre Sainte. Dans son esprit, il s'agit de transformer ce pays en refuge pour les pèlerins et en base militaire contre les Musulmans. Il ne faut cependant pas s'y méprendre : il n'est pas du tout question d'annexer des territoires appartenant à l'empereur byzantin — ce serait contraire au « pacte de Constantinople » ; seules, les terres sarrasines seront soumises à la suzeraineté chrétienne.

Tripoli de Syrie, sur la côte libanaise, fait partie de ces territoires infidèles. Campée sur la presqu'île d'El-Mina, la ville appartient à une famille de cadis, les Bénou-Ammâr, relevant du moins nominalement de l'Égypte. La clef en est le bourg d'Arqa (1), édifié au nord-est. Séduit par le site, Raimond de Saint-Gilles ne l'est pas moins par la riviera qui, de Tortose (Tartous) à Beyrouth, lui rappelle son Midi natal. Mais, avant de conquérir ce lieu privilégié, il faut ménager une base de départ : ce sera Lattaquié, l'ancienne Laodicée.
1. Tell Arqa, Arqa1 ou Arka est un site archéologique situé près du village de Minyara au Liban à 12 km au nord-est de Tripoli.
Port byzantin, libéré des Turcs et restitué à l'empereur Alexis, en 1098, par le comte de Toulouse, Lattaquié est frauduleusement occupé par Bohémond de Tarente, prince d'Antioche. Raimond n'hésite pas : il force l'usurpateur à lui livrer la ville, où il fait flotter sa bannière, en y installant une garnison de 500 méridionaux. Par ce coup d'éclat, il se ménage un moyen de transiger avec l'Empire.


Investir Tripoli, l'obliger à se rendre, tel est le rêve de notre héros ! Mais, auparavant, il faut conquérir l'arrière-pays. Le petit nombre des méridionaux restés sur place ne permet guère que des incursions sans lendemain. Un appui extérieur est nécessaire. Aussi, Raimond prend-il la décision de se rendre à Byzance (Constantinople), à la cour d'Alexis Comnène, pour solliciter l'aide impériale en vue de la création d'un nouvel état sur des terres arrachées aux Musulmans, sans risque d'intervention de la part des Normands de la principauté d'Antioche.

En juin 1100, le comte de Toulouse s'embarque pour Byzance, via Chypre. Sa rencontre avec Alexis a lieu en août. L'accord est total : le concours des Byzantins est acquis, moyennant la restitution de Lattaquié et de deux autres forteresses. Le temps presse d'autant plus que les méridionaux viennent de pendre Tortose, reprise par les Turcs. De retour à Lattaquié, Raimond y retrouve son épouse, Elvire, qui vient de mettre au monde Alfonse Jourdain.

Toujours préoccupé par son souci de maintenir l'emprise chrétienne sur la Terre Sainte, le comte de Toulouse accueille avec joie l'annonce de l'arrivée d'une nouvelle vague de croisés : 200 000 hommes, en majorité des Lombards et des Allemands, devant assurer le peuplement de la conquête. Nous sommes au début de 1101. L'empereur Alexis craint des incidents : les occidentaux ont si mauvaise réputation ! Appel est donc fait à Raimond de Saint-Gilles, qui facilite les négociations entre les deux camps et qui est même choisi comme commandant et conseiller de l'expédition.

Hélas ! La croisade dégénère en une expédition punitive à la suite de la capture par les Turcs de Bohémond, prince d'Antioche. Malgré les efforts de Raimond et d'Alexis, l'armée s'enfonce au cœur de l'Anatolie, dans une région montagneuse et désertique, où elle est épuisée par la soif et le harcèlement des Turcs. A l'arrière-garde, Raimond se distingue comme toujours par son courage intrépide. Brusquement, le 5 août 1101, les croisés se trouvent en présence d'une armée immense : toutes les factions de l'Islam se sont réconciliées contre les Chrétiens ! Et c'est le désastre. Les occidentaux sont taillés en pièces, peu d'entre eux échappent au massacre. Cette terrible défaite compromet la colonisation des principautés latines de Terre Sainte.

Quant à Raimond de Saint-Gilles, il n'a plus qu'une ressource : quitter le champ de bataille et regagner Byzance (Constantinople). Cette « fuite » lui sera souvent reprochée par ses adversaires, notamment par certains chroniqueurs de la Croisade, qui feront de lui un portrait poussé au noir. Beaucoup se réjouissent de le voir capturé sur les bords de l'Oronte par un aventurier, qui s'empresse de le livrer à Tancrède, nouveau prince d'Antioche. Ce dernier en profite pour lui arracher la promesse de ne rien tenter contre sa principauté. Enfin libre, le comte de Toulouse peut songer à la conquête de son futur Etat.
La tâche s'annonce rude. Perchée sur son roc, Tripoli est une sorte de Gibraltar libanais, qui peut être ravitaillé sans difficulté par la flotte égyptienne. Face à cette forteresse, Raimond ne peut aligner que trois ou quatre cents chevaliers. Moyens dérisoires ! Tout autre que lui renoncerait. Mais il a du courage et de la volonté. Et il sait pouvoir compter sur l'appui des chrétiens maronites du Liban et sur le concours d'une flotte génoise croisant au large des côtes.

Bien décidé à parvenir au but qu'il s'est fixé, notre héros élabore un plan systématique de conquête. Il dirige tout d'abord son attaque au Nord, gagnant Tortose, qu'il libère avec l'aide des « Provençaux » de Lattaquié et des marins génois (18 février 1102). C'est là qu'il établit son camp avant d'entreprendre la seconde phase (de sa campagne. Son objectif est maintenant le Sud. Le 28 avril 1104, il enlève Djébaïl, l'antique Byblos, la Giblet des croisés.

Tortose au Nord, Djébaïl au Sud, les limites du comté sont déjà fixées. Reste à prendre Tripoli, qui en constitue le noyau central. Raimond montre sa volonté en faisant le blocus de la ville. Sur un éperon rocheux dominant la presqu'île d'Al-Mina, il fait surgir la forteresse de Mont-Pèlerin, le « Château de Saint-Gilles », appelé par les Arabes « Qalaat Sandjil », aujourd'hui citadelle de Tripoli.
Cette forteresse est érigée en un temps record, au cours de l'année 1102-1103, avec l'aide de maçons et de matériaux fournis par l'empereur Alexis, les transports étant assurés par des bateaux génois et pisans.
Le « Château de Saint-Gilles » est à la fois un refuge pour les pèlerins et une menace pour les Musulmans.

Le siège de Tripoli se prolonge, malgré les renforts venus du Midi de la France. Parmi ceux qui viennent ainsi se joindre à Raimond figurent Bernart Aton de Béziers, Bérenger de Narbonne, Aimar de Marseille, l'abbé de Saint-Victor et l'évêque de Glandève. Mais le comte de Toulouse n'aura pas la joie de voir capituler la ville. Il meurt au Mont-Pèlerin le 28 février 1105, peut-être des suites de ses blessures reçues au combat.
En tout cas, nous pouvons dire qu'il est mort à la tâche, après avoir refusé de quitter la Terre Sainte. Jusqu'au bout, il est resté fidèle à ses convictions.

L'héritage de Raimond de Saint-Gilles est recueilli par son cousin, le comte de Cerdagne Guilhem Jordan (1105-1109), qui poursuit le blocus de Tripoli sans trop de succès. Et pourtant, les Bénou-Ammâr n'ont pas réussi à obtenir l'appui de l'atabeg de Damas ni l'aide du khalife de Bagdad, si ce n'est de bonnes paroles ! Guilhem Jordan se console en prenant Tell Arqa, au nord-est de la ville (avril 1109), ainsi que les châteaux du Djebel Akkar ou Gibelacar. Il finit ses jours sous le fer d'un assassin, ce qui ne manque pas de favoriser Bertrand, fils aîné de Raimond de Saint-Gilles, venu de Toulouse avec une importante flotte génoise. L'arrivée de ces renforts est décisive : les croisés reprennent le combat et occupent Tripoli le 12 juillet 1109.

Le comté de Tripoli est devenu une réalité. Il s'agit d'un Etat essentiellement maritime, correspondant en gros à la côte centrale et septentrionale du Liban. Placé sous la suzeraineté du royaume de Jérusalem, il apparaît comme une véritable projection de la structure politique et sociale du Midi toulousain. Tel quel, il va poursuivre son existence pendant près de quatre-vingts ans. Durant cette période vont se succéder six comtes de la Maison de Saint-Gilles:
Raimond Ier (1102-1105)
Guilhem Jordan (1105-1109)
Bertrand (1109-1112)
Pons (1112-1137)
Raimond II (1137-1152) et Raimond III (1152-1187).
Pour plus de précision, notons que le premier de la liste n'est autre que Raimond de Saint-Gilles.

Cet Etat toulousain est défendu par plusieurs châteaux forts, en premier lieu par la forteresse édifiée sur le Mont-Pèlerin, à trois kilomètres du port. Sur la côte, se dressent la citadelle de Tortose confiée aux Templiers et celle de Giblet (Djébaïl) remise aux Génois. A l'intérieur, les châteaux du Djebel Akkâr surveillent la vallée du Nahr el Kebir, tandis que le Krak des Chevaliers protège la trouée d'Homp assurant la communication entre la Syrie intérieure et le littoral méditerranéen. Plus au Nord-Est, la forteresse de Montferrand (Baarin) se dresse aux abords de la plaine de Hama, sur la rive gauche de l'Oronte. La moitié du territoire est d'ailleurs placée sous la protection des ordres militaires, tandis que les Génois obtiennent la concession d'un tiers de Tripoli et de la totalité de Giblet.

Après le comte Bertrand, mort au printemps de 1112, vient son fils Pons, que nous voyons participer à la défense de la principauté d'Antioche menacée par les Turcs : une grande victoire est ainsi remportée en 1125 à Azâz sur les atabegs de Damas, d'Alep et de Mossoul.
Avec le roi de Jérusalem, son suzerain, Pons se montre beaucoup moins coopératif, faisant preuve d'un mauvais vouloir évident. A sa mort, en mars 1137, la situation n'est guère brillante. Son jeune fils, Raimond II, qui lui succède, doit en effet faire face à Zenugi (1) le Turc, atabeg d'Alep et de Mossoul, dont les troupes assiègent la forteresse de Montferrand (Baarin). Cependant, l'empereur byzantin Jean Comnène, après avoir soumis la Cilicie à son autorité, impose sa suzeraineté au prince d'Antioche, s'apprêtant à agir de même envers le comte de Tripoli. Contre cette double menace, Raimond II reçoit le renfort de son oncle, le roi Foulque de Jérusalem, qui décide de repousser les Turcs tout en négociant avec les Byzantins : il importe avant tout de manifester l'union des Chrétiens face à l'Islam !
1. Imad ed-Din Zengi devient atabeg de Mossoul en 1127 et d'Alep en 1128. Egalement appelé Zangi, Zengi, Zenghi, Zengui, Zenkî ou Zanki, et surnommé Sanguinus, en français le Sanglant, par les chroniqueurs francs des croisades.

C'est alors que Zengui le Turc surprend ses adversaires, capturant une partie de l'armée des croisés, y compris Raimond II. Le reste des chrétiens, avec le roi Foulque, s'enferment dans Montferrand, en attendant d'être délivrés par les renforts conduits par le patriarche de Jérusalem, le comte d'Edesse et le prince d'Antioche. Mais Zengui s'empare de Montferrand, laissant le roi Foulque et la garnison s'en tirer avec les honneurs de la guerre et rendant la liberté à Raimond II et aux autres prisonniers chrétiens (10-20 août 1137). La magnanimité du Turc est due à l'inquiétude qu'il ressent à l'annonce que l'étendard de l'empereur Jean Comnène flotte sur la citadelle d'Antioche : cette manifestation de la puissance byzantine lui fait craindre une attaque contre la Syrie musulmane.

Le conflit avec Zengui le Turc souligne la gravité du danger venant du Nord-Est, d'Alep et de Mossoul. Il met en évidence l'importance de Montferrand et du Krak des Chevaliers, qui sont en quelque sorte les verrous de sûreté du comté de Tripoli. Face à Homs sur l'Oronte, le Krak protège la route du littoral. Cette vieille place forte kurde, conquise en 1110 par Tancrède, prince d'Antioche, et donnée par celui-ci au comte Pons deux ans plus tard, sera confiée à la garde des Hospitaliers par Raimond II en 1142 : les chevaliers en feront une redoutable forteresse pouvant recevoir une garnison de 2 000 hommes. De quoi faire réfléchir les envahisseurs, jusqu'au jour où, en 1271, le Krak sera submergé par le raz-de-marée musulman.

La surveillance de ce système fortifié est confiée à un sénéchal, qui coordonne l'action des châtelains assurant la garde des forteresses. Dans chacune d'elles, la garnison se compose de chevaliers et de vassaux fieffés du comte. Ces troupes font partie de l'armée tripolitaine, commandée par le comte et, après lui, par le sénéchal. Il y a d'abord les contingents féodaux fournis par les vassaux à chaque semonce du comte. Viennent ensuite les corps fournis par les Ordres militaires, Templiers et Hospitaliers. A côté des éléments latins, on note la présence de mercenaires : sergents à cheval recrutés parmi les Syriens chrétiens et cavaliers « turcoples » nés de pères turcs et de mères chrétiennes. L'ensemble est complété par une infanterie indigène recrutée parmi les Syriens, les Arméniens et surtout les Maronites, qui fournissent d'excellents archers. Quant aux effectifs, ils sont peu élevés : quelques centaines de chevaliers, à peine deux fois plus d'auxiliaires indigènes.

Sous la protection de cette petite armée, la population vaque à ses occupations. Au sommet de la hiérarchie sociale, le comte gouverne assisté d'une cour, où siègent ses principaux officiers : sénéchal, connétable, maréchal, chancelier... Hors de Tripoli, il est représenté par des châtelains, qui gouvernent les forteresses en son nom, et par des vicomtes présidant les cours bourgeoises, assistés de jurés-légistes. En plus de leurs attributions judiciaires, les vicomtes administrent les domaines comtaux, dont ils perçoivent les revenus ainsi que les impôts. Mais, s'il est maître dans ses états, le comte est vassal du roi de Jérusalem et doit, en conséquence, participer aux sessions de la Haute Cour ou Cour des Liges, qui juge toutes les causes féodales. Cette vassalité est la conséquence de l'appui fourni en 1109 au comte Bertrand par Baudouin Ier, frère et successeur de Godefroy de Bouillon.

En plus du comte, la classe privilégiée comprend des seigneurs haut-justiciers, propriétaires de vastes domaines, tels les Giblet-Porcelet qui se rattachent à la famille provençale des Porcelet. La puissance de ce lignage est attestée par la possession d'une des places fortifiées du comté : Artusce, l'antique Orthosias (1), située dans le golfe d'Arca, au nord-est de Tripoli. C'est là que se trouve l'essentiel de ses terres, dans la basse vallée du Nahr el Barid, où l'irrigation est un vrai problème.
1. Orthosia, cité byzantine et médiévale située au Liban.
Orthosia, cité située au bord de la mer était au Ve siècle le siège d'un évêque grec, qui relevait du métropolite de Tyr, avec les autres diocèses environnants d'Arca et de Tripoli, dans le cadre du patriarcat d'Antioche.


D'un rang inférieur sont les chevaliers et les vassaux fieffés du comte, attachés à un château dont ils assurent la garde. Ces privilégiés possèdent des maisons, des jardins, des casals (villages, hameaux), voire des villages, mais voient leur pouvoir limité à quelques prérogatives de justice foncière sur leurs terres.

Bénéficiant également de privilèges, les bourgeois ont une cour judiciaire spéciale composée de douze jurés, présidée par le vicomte représentant le souverain. Tous ne sont pas de même origine. Les plus anciens sont les purs « latins », marchands ou hommes du peuple ayant participé à la Croisade. Sont venus les rejoindre les « poulains », issus de mariages entre croisés et indigènes, et même quelques marchands syriens jugés dignes de la bourgeoisie.

La classe agricole est celle des Syriens, peuplant les fermes et les bourgades qu'ils habitent en territoire tripolitain. La tolérance étant de mise, ces musulmans s'administrent comme ils l'entendent : ils ont conservé leurs magistrats locaux, les reis, qui président les cours de justice traditionnelles. Tous les indigènes sont d'ailleurs soumis à la loi civile romaine, conservée par les Arabes, puis maintenue en vigueur par les croisés.

Dernier élément de la population : les colonies italiennes des ports, où des quartiers ont été concédés à des marchands et commerçants génois et pisans. Ces concessions sont pourvues de privilèges administratifs et juridiques. Les ressortissants étrangers qui y demeurent sont administrés et jugés selon les lois de leur pays.

La majeure partie des habitants demeurent à la campagne. Le comté de Tripoli est, en effet, un pays agricole très prospère. Le long du littoral s'étend une plaine, bornée au levant par les hauteurs du Liban. L'irrigation y est facilitée par les rivières — tels le Nahr el-Bared et le Nahr al-Kabir, au nord-est de Tripoli — dont la possession est une précieuse source de revenus. Les champs sont entourés de canaux alimentés par des prises d'eau, dont on aperçoit les barrages ou « paissières » entretenus à grands frais. Ils sont abreuvés périodiquement, selon un ordre rigoureux déterminé par les conventions passées entre les propriétaires. L'alternance de l'humidité et de la chaleur y favorise la canne à sucre, qui alterne avec la vigne, les vergers et les jardins enclos de haies.

Dans cette riche plaine littorale, paraissent çà et là des villages considérés comme alleux par les seigneurs locaux, conformément aux usages du comté fortement inspirés des coutumes du Midi languedocien et provençal, où l'allodialité est fort répandue. Les vassaux du comte peuvent fort bien ne pas tenir de lui la totalité de leurs domaines. Aussi, disposent-ils à leur guise des casals (villages hameaux) et des terres qu'ils possèdent en pleine propriété, en les donnant ou les inféodant à qui ils veulent. Ils sont particulièrement jaloux de leurs cours d'eau, dont ils concèdent l'usage pour l'irrigation et le fonctionnement des moulins à grains et des broyeurs de canne à sucre. Leurs sergents veillent sans relâche sur les barrages et sur la régularité de la distribution de l'eau. Il y a là une source de beaux profits !

Les plaines heureuses couvertes des fruits de la terre ne sont qu'un aspect de l'économie tripolitaine. La situation du comté sur le littoral méditerranéen fait le bonheur du commerce, stimulé par les échanges avec la Mésopotamie, étape obligée vers le Golfe persique, les Indes et la lointaine Chine. Les marchands de Mossoul arrivent, chargés de leurs belles étoffes, de tapis persans, de parfums d'Arabie, d'épices et de pierreries des Indes, de perles de Ceylan et de porcelaines de Chine. Leur but est Tripoli, l'un des ports les plus actifs de la côte, avec les entrepôts et les magasins du quartier génois regorgeant de marchandises.

Tripoli est de ces lieux qui font rêver. C'est là que sont rassemblées les richesses de l'Orient. Dans les petites rues fort peuplées, la laine et le lin voisinent avec le sucre, le safran et les fers du Liban. Des monceaux de soieries s'offrent à la vue des chalands : moires et camelots du pays, damas fleuris, brocards d'Antioche ... sans compter les tapis de Bagdad. Il y a encore les produits de la verrerie locale : lampes, coupes, bouteilles, bassins de verre émaillé et doré, proposés sous le nom de « verreries de Damas. » Les auteurs de ces merveilles sont des Syriens, des Arabes et des Juifs. Loin de faiblir, leur activité ne fait que croître !

Il faut répondre aux demandes qui parviennent des terres soumises à l'autorité des comtes de Toulouse. La flotte génoise s'active pour maintenir le contact entre l'Orient et l'Occident. Les ports languedociens deviennent ainsi autant de canaux alimentant le commerce intérieur de l'Etat toulousain. Saint-Gilles, Aigues-Mortes, Lates près de Montpellier et Narbonne connaissent un grand essor. Pèlerins et colons de Terre Sainte côtoient les marchands de toutes les nations, tandis que débarquent les produits de luxe venus des rivages palestinien et que sont embarqués les draps du Languedoc. Parmi les villes les plus animées figure Montpellier, visitée en 1165 par le voyageur juif Benjamin de Tudèle : les rues grouillent de monde... Anglais, Grecs, Orientaux de toute race, Arabes d'Afrique et d'Espagne y affluent, conduits au port par les vaisseaux génois et pisans.

Parmi les villes bénéficiaires de la manne économique, Saint-Gilles occupe une place de choix : les Génois y établissent des docks et des entrepôts qui font la fortune de la cité, rendant possibles les belles constructions romanes dont une partie subsiste encore aujourd'hui. Mais les grands profiteurs sont les ressortissants de Gênes, qui obtiennent de fructueux privilèges un peu partout sur les côtes provençales et languedociennes. L'appel de la Croisade, qui a entraîné Raimond de Saint-Gilles sur les routes de la Terre Sainte, est en quelque sorte le vecteur de l'hégémonie commerciale de la république de Gênes. Celle-ci ne se prive pas de faire monter les enchères, obtenant tout de la dynastie Raimondine jusque sur les rives de la Méditerranée orientale. Elle reçoit ainsi le tiers de Tripoli et la totalité de Giblet (Djébaïl), qui devient une seigneurie au profit de la famille des Embriaci dont on suit l'activité de 1109 à 1282 sans discontinuer.

Ainsi donc, l'économie tripolitaine est florissante. Le commerce permet au comte d'encaisser de beaux revenus : droits de douane, droits de péage, droits de monopole. A cela s'ajoutent les tailles exigées des indigènes et la capitation payée par les Musulmans et les Juifs.
Tous ces impôts sont perçus par les vicomtes, qui les versent au Trésor ou « Secrète » administré par un bailli sous la surveillance du sénéchal.

Les problèmes fiscaux ne doivent pas nous faire oublier le principal objectif de la Croisade : rendre la Terre Sainte aux Chrétiens et y rétablir les cadres de la vie religieuse. Sans aller jusqu'à ressusciter la répartition ecclésiastique byzantine, les croisés victorieux créent deux patriarcats latins : Jérusalem et Antioche. C'est à ce dernier qu'est rattaché le comté de Tripoli avec ses trois évêchés : Giblet, Tortose et Tripoli, lequel englobe les anciens évêchés grecs d'Arqa et d'Artusce. De cette organisation naît un certain nombre de chantiers, marqués par le style architectural du Midi. Parmi les édifices entrepris au XIIe siècle, la cathédrale Notre-Dame de Tortose offre aux regards ses trois nefs et ses trois absides, ainsi que le berceau brisé sur doubleaux du vaisseau central ; elle présente également un chevet flanqué de deux chapelles rectangulaires à la manière des sacristies latérales des églises syriennes.

Quant aux Ordres militaires, ils sont étroitement associés à la défense du comté. De fait, ils constituent une armée permanente, toujours prête au combat. Les Hospitaliers sont ainsi responsables de la sécurité de la moitié du territoire tripolitain. Leurs garnisons occupent les châteaux frontaliers de l'Est et du Nord-Est : Djebel Akkâr et surtout le Krak des Chevaliers obtenu en 1142. De leur côté, les Templiers s'établissent à la frontière du Nord, occupant les forteresses de Chastel-Blanc (Safita, ville syrienne) et de Tortose (avant 1179). Cette implantation est d'autant plus nécessaire que la menace musulmane se précise avec la montée en puissance de Saladin.

RAIMOND III DE TRIPOLI - UN CHEVALIER REALISTE
Dernier représentant de la dynastie toulousaine, Raimond III est un homme d'état, le seul d'ailleurs à pouvoir s'opposer efficacement à la montée du monde musulman. Petit-fils de Baudouin II par sa mère, il est le plus puissant vassal du royaume de Jérusalem, unissant sous son autorité le comté de Tripoli et la seigneurie de Tibériade. Mais, il ne cherche pas à profiter de son ascendant pour se lancer dans de dangereuses aventures. La prudence est sa principale vertu.

Physiquement, Raimond III ne manque pas de prestance : mince, presque maigre, large d'épaules, il offre un visage énergique, éclairé par des yeux vifs et pénétrants. La figure est plaisante, malgré le manque de relief de la noire chevelure dont elle est agrémentée.

Tel quel, Raimond III est un chevalier courageux, sachant toutefois réfréner son ardeur guerrière. Réaliste, connaissant bien le monde musulman pour avoir été huit ans prisonnier à Alep, il préfère la négociation au combat en situation difficile. Il jouit d'ailleurs d'une bonne réputation chez ses adversaires, notamment auprès de Saladin, avec lequel il a des relations personnelles. Clairvoyant, plein de bon sens, il fait tout son possible pour maintenir la paix face aux forces de l'Islam chaque jour plus menaçantes.

Meilleur conseiller du roi de Jérusalem, Baudouin IV le Lépreux, Raimond III estime que le principal danger est l'unification des terres musulmanes. D'où ses efforts pour soutenir Nour Ad-Dîn, atabeg d'Alep, contre les attaques de Saladin (Salâh Ad-Dîn), déjà maître de l'Égypte et de l'émirat de Damas. Durant neuf ans (1174-1183), il réussit à empêcher l'annexion d'Alep par son génial adversaire.
Parmi les faits d'armes des chrétiens, signalons le succès remporté par ceux-ci dans la vallée de la Beqaa en juillet 1176.

Il faut y joindre la belle victoire de Baudouin IV sur Saladin entre Montgisard (Tell-Djazer) et Blanche-Garde (1) (Tell Aç-Câfiya), en Judée (25 novembre 1177). Ces exploits permettent la conclusion d'une trêve avec le maître de l'Égypte et de la Syrie (1180).
1. Le Château fort de Blanche Garde est un château fort croisé construit par le roi de Jérusalem Foulques V d'Anjou en 1142 afin d'assurer la sécurité de la Judée face à l'Égypte.
En effet, la frontière sud-ouest de la Judée était soumise aux razzias des Égyptiens venus de la citadelle d'Ascalon. Ses ruines se trouvent aujourd'hui dans l'État d'Israël.
La forteresse se dressait à mi-chemin entre Bethléem et Ascalon et complétait le dispositif de défense, assuré notamment par les forteresses de Gibelin(1136) et d'Ibelin(1141).


L'arrêt des hostilités sauve le royaume de Jérusalem, épuisé par le conflit. C'est alors que se manifeste Renaud de Châtillon, dont les manœuvres bellicistes rallument les hostilités en 1182.
Face au comte de Tripoli, Renaud de Châtillon incarne le parti de la guerre. Ce petit chevalier du Gâtinais, devenu prince d'Antioche par mariage d'amour avec la princesse Constance, veuve de Raimond de Poitiers (1153), est un aventurier courageux, certes, mais sans scrupule, prêt à tout pour de l'argent. C'est le type même du chevalier-brigand.

Parmi ses sinistres exploits, il faut citer le saccage en pleine paix de l'île byzantine de Chypre, dont il traite les habitants avec une brutalité inouïe. Pour ce forfait il est abandonné par son suzerain, Baudouin III roi de Jérusalem. Ce qui lui vaut d'être humilié par l'empereur byzantin Manuel Comnène, auquel il doit livrer la citadelle d'Antioche (1159). Peu après, il est fait prisonnier par Noûr Aid-Dîn (1), qui le maintien pendant dix-sept ans dans les prisons d'Alep (1160-1177).
1. Nour ad-Din Mahmûd el Mâlik al Adil, aussi appelé Nur al-Din, ou Nûreddîn (en français : « lumière de la religion »), appelé aussi Noradin par les Francs.

A peine libéré des geôles musulmanes, Renaud de Châtillon épouse en secondes noces la veuve du sire d'Outre-Jourdain, mariage qui lui permet de posséder la Transjordanie et l'Ouadi Mousa. Il y tient en particulier deux forteresses : le Crac de Moab (Kérak) et Montréal (Chaubak), qui coupent la route des caravanes entre la Syrie musulmane et l'Égypte, possessions de Saladin.

Le « Démon franc » — surnom donné par les Musulmans à Renaud de Châtillon — brise la trêve en attaquant une caravane se rendant de Damas à La Mecque (1181). C'est de nouveau la guerre ! Le roi de Jérusalem, Baudouin IV, rétablit la situation en remportant de nouvelles victoires en Galilée et devant Beyrouth (juillet-août 1182), poussant même ses troupes jusque dans la banlieue de Damas (octobre 1182).

Renaud de Châtillon ne renonce pas pour autant à ses provocations. Plein d'audace, il n'hésite pas, en 1183, à faire transporter à dos de chameaux toute une flotte de la Méditerranée à la mer Rouge : lançant ses navires dans le golfe d'Aqaba, il pille les ports du Hedjaz, atteint Aden, menace les villes saintes de l'Islam, Médine et La Mecque... C'en est trop ! Saladin réplique avec vigueur, détruisant l'armada de son ennemi, puis va assiéger le Crac de Moab, qui n'est sauvé que par l'intervention de Baudouin IV (novembre 1183).

La sage politique de Raimond III est ainsi compromise par les folles entreprises de Renaud de Châtillon. Pourtant, la trêve avec Saladin a été très utile aux Chrétiens, qui ont pu être ravitaillés en eau grâce au bon vouloir des Musulmans. Il ne faut pas oublier que les terres encore au pouvoir des Croisés sont cernées de toutes parts !

LE PARTI DE LA GUERRE L'EMPORTE
FIN DE LA DOMINATION CHRETIENNE

Brusquement, les événements se précipitent... Baudouin IV le Lépreux meurt le 16 mars 1185, laissant la couronne de Jérusalem à son jeune neveu, Baudouin V, un enfant. Raimond III est alors désigné comme régent du royaume. Tout est remis en cause par la mort prématurée de Baudouin V en septembre 1186. La reine mère, la princesse Sybille, qui s'est remariée avec Guy de Lusignan, s'efforce de faire proclamer ce dernier roi de Jérusalem. Contre cette prétention, la préférence des barons va à Raimond III.

C'est alors que, de nouveau, Renaud de Châtillon fait parler de lui. Il se ligue avec le grand-maître du Temple, Gérard de Richefort, et le patriarche de Jérusalem, Héraclius, un homme perdu de vices vivant avec une maîtresse, ainsi qu'avec Jocelin III de Courtenay : la candidature de Raimond III est écartée et c'est finalement la princesse Sybille qui devient reine et associe son époux au pouvoir.

Le parti de la guerre est victorieux... Renaud de Châtillon ouvre les hostilités en pillant une caravane musulmane allant d'Égypte à Damas. Saladin réplique en mai 1187 : il ravage les terres du « Démon franc » et envahit la Galilée, possession de Raimond III. Ce dernier, qui est alors en état de dissidence, oublie sa querelle pour venir en aide à ses adversaires.

L'armée chrétienne se concentre à Séphorie (1), à mi-chemin entre Tibériade et la Méditerranée. Elle est forte de 22 000 hommes, dont 1 500 chevaliers. Saladin, dont les troupes sont supérieures en nombre, occupe Tibériade. Malgré les conseils de prudence de Raimond III, le grand-maître du Temple fait avancer ses hommes à travers une région torride, où l'eau est quasi inexistante. Le 4 juillet 1187, son armée est bloquée sur la butte de Hattîn, où elle subit un irréparable désastre. Les trois adversaires de Raimond III sont capturés par Saladin, qui refuse de faire grâce à Renaud de Châtillon dont la vie prend fin en même temps que la domination chrétienne.
1. Sepphoris (hébreu : Tsippori ; grec : Sépforis ; arabe : Saffuriya), ville de la Galliée au nord de Nazareth.

Saladin ne perd pas son temps. Il s'empare de Saint-Jean d'Acre le 10 juillet... Jaffa et Beyrouth succombent à leur tour (6 août), suivies de toutes les villes de la côte... Enfin, Jérusalem est conquise le 2 octobre : Saladin fait preuve d'esprit chevaleresque en épargnant la population chrétienne, moyennant toutefois le paiement d'une rançon... Les croisés se rembarquent en hâte à Tripoli et même en Égypte.

Le royaume de Jérusalem est perdu. Le comté de Tripoli passe aux mains de Saladin, sauf Tripoli, Tortose et le Krak des Chevaliers. Dans la principauté d'Antioche, tous les ports sont occupés par les Musulmans : seuls, résistent Antioche et sa banlieue, ainsi que le château de Marqab (juillet 1188). Raimond III ne survit pas au désastre. Désespéré d'avoir vu sa politique d'apaisement mise à mal, il meurt à Tripoli aussi bien de maladie que de chagrin. Mais Saladin ne réussit pas à s'emparer de la place.

Tous ces événements vont déclencher la troisième Croisade — celle des souverains — à laquelle participeront Frédéric Barberousse, Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion.

CONCLUSION
Comment en est-on arrivé là ? La question mérite d'être posée.
Jusque vers 1150, Toulouse déborde de vitalité religieuse. Les chapitres de Saint-Etienne et de Saint-Sernin ont été réformés, et l'esprit de réforme développe le renouveau moral de la société. L'appel de la Croisade y est accueilli avec faveur, répandu par les chevaliers partant combattre les Arabes en Espagne ou en Orient, ainsi que par les nombreux pèlerins qui vont chercher en Galice la lumière de Compostelle. La littérature occitane entretient l'imagination des fidèles. Les expéditions en Terre Sainte sont évoquées par la Canso d'Antiocha rédigées entre 1106 et 1130 pour rappeler les exploits des barons méridionaux lors de la prise d'Antioche le 28 juin 1098. Elles le sont aussi par le troubadour Jaufré Rudel, amoureux d'une jeune palestinienne, qu'on croit être la comtesse de Tripoli. De fait, le poète partira en 1147 pour la Terre Sainte dont il ne reviendra pas. Ayant ainsi jailli de la conscience collective, l'esprit de croisade pousse les énergies et les enthousiasmes vers l'Orient méditerranéen. Il explique la création du comté de Tripoli et son développement jusque vers le milieu du siècle.

Ce courant se heurte bientôt aux difficultés nées des conflits opposant l'Etat toulousain à ses puissants voisins : l'Aquitaine et le tandem Catalogne-Aragon, qui menacent Toulouse tantôt séparément, tantôt alliés pour le meilleur et pour le pire. La permanence des conflits qui ébranlent le Midi explique en grande partie l'abandon de tout projet oriental par Raimond V (1148-1194).

Les tensions religieuses expliquent, elles aussi, la démission des esprits. L'église méridionale est paralysée par la montée du Catharisme, qui met en cause les dogmes chrétiens et dirige ses attaques contre un clergé jugé déficient. La vision pessimiste du monde, la hantise du diable, le combat entre la chair et l'esprit n'encouragent guère les Toulousains à franchir la Méditerranée pour aller renforcer la petite colonie de la côte libanaise menacée par Saladin. Le temps des grandes expéditions lointaines suscitées par l'enthousiasme religieux est maintenant révolu... Une nouvelle époque s'ouvre : Toulouse n'a plus de contact avec la Méditerranée que par l'intermédiaire des marchands italiens et catalans.

Carte Etats Latins
BNF

Toulouse et le proche Orient au XIIe siècle.
1. Conférence par M. Pierre Gérard, Conservateur général honoraire du Patrimoine, lors de notre Assemblée Générale du 25 février 1994.

Sources : P. Gérard. L'Auta : que bufo un cop cado més : organe de la société les Toulousains de Toulouse et amis du vieux Toulouse, page 195 à 219. Toulouse Septembre 1994.
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