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Châteaux de l'Orient Latin, Croisés, Templiers, Hospitaliers et Teutonique

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    Balatonos (Qal'at Mehelbé)

    La reconquête par les Ayyubide de la Syrie franque et l'émergence d'une architecture militaire islamique à la fin du XIIe siècle.

    château de Balotonos

    Châteaux de balatonos
    Vestiges du château de Balotonos - Sources : Châteaux d'Orient Jean Mesqui

    L'avancée des Ayyubides en 1170 et la rapide ascension de Salah al-Din conduisit à l'éviction des Fatimides et des Saljûq qui luttèrent jusqu'alors, Bilad al-Sham et qui avaient affronté individuellement les Croisés depuis la fin du XIe siècle. La prise de Damas en 1174 et d'Alep en 1183 par le Malik donna l'opportunité d'unifier leurs territoires et leurs armées contre l'ennemi commun franc. Cette unification de l'Egypte et de la Syrie par Salah Al-Din marqua un tournant fondamental dans l'évolution des croisades, puisque d'immenses armées musulmanes pouvaient maintenant être mobilisées contre les Etats Latins.

    Dans ce nouveau contexte géopolitique et militaire, l'équilibre des pouvoirs tourna largement à l'avantage des Ayyubides, étant donné qu'ils étaient maintenant capables de mener de nombreuses campagnes militaires contre les positions fortifiées croisées, campagnes qui n'avaient pas pour but la complète destruction des châteaux croisés, comme on avait pu le constater durant les contre-croisades des Saljûq, mais dont le but était d'occuper à nouveau des territoires par la conquête et la restauration et l'augmentation des places fortes croisées conquises. La campagne militaire menée par Salah Al-Din durant l'été 1188 a l'intérieur des territoires croisés de la Principauté d'Antioche démontra cette politique de reconquête et de «  réoccupation  » des territoires latins. L'objectif de Salah Al-Din était de déstabiliser le système de défense croisée à petite échelle en prenant plusieurs forteresses secondaires appartenant à un réseau de défense plus étendu plutôt qu'en s'attaquant directement à de puissantes places fortes qui auraient pu lui résister pendant plusieurs mois.

    Dirigeant une puissante armée, il entreprit de détruire en l'espace d'un mois le groupe de place fortes qui assuraient la protection d'Antioche en direction du Sud et contrôlaient la route reliant Lattakia à Alep à travers les monts du nord de Jabal Ansariyya: près de dix châteaux, toutes des possessions du croisé Sire de Saône, tombèrent durant cette campagne, les plus importants d'entre eux étant Sahyun (actuel Qal at Salah al-Din), Burzayh, Balatunus et Shughr-Bakaas.

    Les forteresses nouvellement acquises ne furent pas abandonnées, mais immédiatement confiées à des émirs locaux qui reçurent pour mission de réparer les châteaux endommagés par les sièges et de créer avec leur «  iqta  » le pendant des anciens fiefs croisés.

    Ce n'est qu'en juillet 1188 que la forteresse fut conquise par l'armée du sultan Saladin dans le cadre de sa campagne de reconquête des forteresses protégeant les abords méridionaux d'Antioche.
    Saladin confia ensuite la forteresse et son territoire, sous forme d'iqta', à l'émir Nasir al-Din Mankawars qui fit de Sahyun «  la plus invulnérable des forteresses  », d'après Ibn al-Athir.

    Devenant de nouvelles positions frontalières (thughr) face aux vestiges des Etats Latins de la côte, ces places fortes ne furent pas seulement réparées mais également «  refortifiées  ». Après la mort de Salah al-Din en 1193, certains de ces châteaux, Balatunus et Shughr-Bakas, furent intégrés au territoire d'Alep dirigé par al-Zahir Ghazi devinrent également les sujets d'une campagne de fortification qui améliorèrent les systèmes de défense des sites.

    Par conséquent, ces châteaux pris par Salah al-Din au nord de la Syrie présentent une homogénéité historique, géographique et par dessus tout architecturale. Places fortes byzantines du Xe siècle conquises par les croisés au début du XIIe, elles demeurèrent des possessions féodales jusqu'à leur capture par Salah al-Din à la fin du XIIe siècle. Ayant été immédiatement fortifiées par leur nouveau propriétaire Ayyubide, ces châteaux constituaient le principal centre de l'expression architecturale militaire Ayyubide dans le Bilad al-Sham à la fin du XIIe siècle, étant seulement le deuxième vaste programme de fortification de la cité du Caire. L'analyse architecturale de ces châteaux et des fortifications islamiques qui perfectionnèrent leurs systèmes de défense révèle les traits d'une architecture militaire islamique originale émergeant à la fin du XIIe siècle.

    Sources : DESCHAMPS (P.), «  Le château de Saône et ses premiers seigneurs  », Syria, XVI, 1935, pages 73-88.
    Sources : Plus de détails à propos de la campagne militaire de 1188 sont disponibles dans P. Deschamps, «  Les Châteaux des Croisés en terre Sainte  », III, La défense du comté de Tripoli et de la principauté d'Antioche, Paris (1973)

    Le Sultant Melik-Daher-Bibars

    château de Balotonos

    Châteaux de balatonos
    Vestiges du château de Balotonos - Sources : Châteaux d'Orient Jean Mesqui

    Le vingt sixième jour du même mois les officiers du sultan prirent possession de Balatonos qui est une forteresse considérable le même jour des troupes parties de Birah prirent la route de Karkar, brûlèrent tout sur leur passage et enlevèrent un grand butin. Elles s'emparèrent d'une place située entre cette ville et Kakhta, en massacrèrent la garnison, et y recueillirent un butin prodigieux, sur lequel ils prélevèrent le cinquième pour le fisc.

    L'auteur de la Vie de Bibars (man 803, fol 124 v° ), et le prétendu Hasan-ben-Ibrahim (fol 200 v° ), donnent sur ces événements des détails plus étendus.

    Modaffer-eddin ou Izz-eddin), Othman fils de Mankoures prince de Sahioun s'était emparé de la ville de Balatonos, à l'époque des conquêtes des Tatars. Melik-Daher étant monté sur le trône, réclama cette place. Le possesseur éludait la demande et donnait des réponses évasives. La négociation se prolongea sans amener aucun résultat satisfaisant. Le sultan écrivit alors aux Turcomans, et leur enjoignit de faire des courses sur le territoire de la ville, Ils obéirent et portèrent partout le ravage et la désolation.

    Othman, se voyant aux prises avec ces féroces ennemis, députa vers le sultan son fils et le kadi de la ville. Il demanda qu'on lui accordât, à titre d'aumônes, un bourg dont le revenu pût le faire vivre, lui et sa famille. On lui assigna le bourg nommé Hama, situé sur le territoire de Schaïzar. Le sultan lui en concéda la possession par un acte écrit, revêtu de son serment. Alors Othman livra la ville. «  Au rapport de Hasan-ben-Ibrahim, le sultan accorda à Othman, en échange de Balatonos, plusieurs villes du territoire de Sahioun  ».

    Suivant un autre récit, il eut en partage cinq bourgs, dont le revenu produisait trente mille dirhems. Parmi les émirs de Syrie qui, en l'année 678 (de JC 1279), reconnurent pour sultan l'émir Sonkor-aschkar, on compta le gouverneur de Sahioun, de Burziah, de Balalouos
    (Nowaïri, Vie de Kelaoun f 108 r° ).

    Sources : Histoire des sultans mamlouks, de l'Égypte, écrite en arabe par Taki-Eddin-Ahmed-Makrizi Par Ahmad ibn Ali Maqrizi, Etienne Quatremère
    Extrait du livre "Les Châteaux d'Orient" de Jean Mesqui. Edition Hazan : Les photographies en couleurs sont de Mohamad Al Roumi et Jean Mesqui.


    Balatonos (Qal'at Mehelbé)

    Ce château se dresse à 750 m d'altitude sur un des deux sommets du Djebel Arbaïn qui fait partie du massif du Djebel Bahra. C'était une position stratégique importante assurant la liaison avec la grande forteresse de Saône à 11 km au Nord et avec les Ports de Lattaquié à 27 km à l'Ouest et de Djebelé à 20 km au Sud-Ouest.

    château de Balotonos

    Plan du château de Balotonos
    Plan du château de Balotonos

    Il a été identifié par Richard Hartmann. Les textes latins ne le désignent pas explicitement. La construction de cet ouvrage fut commencée par un clan de montagnards, les Banoul Ahmar au XIe siècle. En 1031, au temps de l'Empereur d'Orient Romain III Argyre, il leur fut enlevé par Nicétas, Catépan d'Antioche, qui en acheva les fortifications. En mai 1118, le Prince d'Antioche l'enleva à la tribu des Banou l'Sulaia et donna cette Place à Robert, Seigneur de Saône. Nous l'apprenons par Ousama qui parle à la date de 1119 de la mort du comte Robert, seigneur de Saône, de Balatonos et d'autres Forts.

    En 1136, les montagnards de la région assiégèrent Balatonos, mais la garnison Franque résista et fut dégagée par des renforts. Après avoir pris Saône, Saladin envoya un de ses lieutenants devant Balatonos ; la Place fut occupée trois jours après, le 1er août 1188. Plus tard Balatonos tomba en la possession de Beibars (1269), qui le fit réparer Van Berchem (page 286) signale un guépard sculpté sur une pierre, emblème de Beibars qu'on a retrouvé sur des châteaux occupés auparavant par les Francs
    A l'époque de la visite de Van Berchem (1895), le château était déjà très délabré. Ses commentaires semblent prouver, tant les éléments des constructions sont disparates, que les occupants successifs autochtones, Byzantins, Francs, Musulmans, y ont tous fait des aménagements. Il a remarqué des rajustements dans l'appareil d'une même muraille.
    Claude Cahen observe : «  Les Francs en renforcèrent plusieurs parties sans en altérer la physionomie générale.  » Il couronne une plate-forme rocheuse de forme ovale d'où l'on découvre un vaste horizon. L'enceinte suit les rebords escarpés de cette plateforme. Elle s'étend d'Ouest en Est sur environ 200 mètres. Elle est flanquée de saillants les uns barlongs, les autres demi-circulaires encadrés par deux saillants arrondis. Ces tracés doivent être de l'époque byzantine. L'entrée (E) percée au Sud, est flanquée vers l'Ouest d'un ouvrage présentant deux saillants en quart de cercle d'un aspect étrange que nous n'avons vu nulle part. Par là on pénètre dans une vaste cour. Van Berchem a signalé au milieu de la face Nord, à la partie la plus haute de la forteresse, un ouvrage considérable (R), un réduit, sorte de grand donjon défendu, du côté de la Cour, par un talus, comme si on avait voulu le protéger contre un adversaire qui aurait envahi la cour. Il y a aussi, à l'Est, une muraille intérieure, avec un saillant arrondi dirigé vers la Cour ; et c'est comme un second réduit.

    Enfin Van Berchem a observé : «  au réduit (R) et dans des ouvrages voisins de l'Entrée (E), de gros blocs à refends et à bossages dressés avec soin.  » Et cela pourrait concorder avec l'époque, 1118, où les Francs s'établirent à Balatonos. Rappelons que Balatonos relevait du seigneur de Saône ; il assurait la liaison de cette forteresse avec le Sud et les communications entre l'Oronte et la côte. On appelait Djebelé «  le Port de Balatonos.  »
    Sources : Paul Deschamps - Les Châteaux des Croisés en Terre Sainte, tome III, La Défense du Comté de Tripoli et de la Principauté d'Antioche. Editeur Paul Geuthner, Paris 1973

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