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    Le château de Servantikar

    Un des pionniers qui ont rendu le plus de services à l'histoire des Croisades, E.-G. Rey, a eu le grand mérite, dans une brève communication faite le 16 juin 1897 à la Société nationale des Antiquaires de France (1) de préciser la situation du château de Servantikar qui commandait, au nord de la chaîne de l'Amanus, un défilé conduisant de Cilicie en Syrie. Il pensait que ce défilé constituait les Pylae Amanicae dont il est question dans les historiens de l'Antiquité (2). Il ne semble pas qu'on ail suffisamment insisté sur l'importance de cette position stratégique qui fit de Servantikar, pendant les Croisades, un château de frontière.

    château de Servantikar

    Château de Servantikar
    Château de Servantikar - Sources image Top Castelen:
    http://www.topkastelen.nl/index.php?Language=en

    Pour une armée qui, venant de Cilicie, voulait pénétrer en Syrie, ou inversement, deux principaux passages se présentaient. L'un était celui du littoral : à proximité d'Alexandrette, la route resserrée entre le rivage et les contreforts de l'Amanus franchissait d'abord les Pylae Ciliciae, probablement à Sarisaki et Saqaltoutan (les Croisés appelaient ce passage la Portelle), puis les Pylae Syriae, probablement à l'entrée du col de Beylan (3).

    L'autre, à l'est de la Cilicie, passait par un col du Giaour Dagh, chaînon septentrional de l'Amanus et menait vers la Syrie intérieure et la Mésopotamie. Servantikar commandait ce dernier passage (4).
    Ces deux issues étroites formaient pour la plaine de Cilicie, entourée de montagnes, de véritables portes qu'il était indispensable de tenir pour assurer la sécurité du pays.
    Aussi les voit-on maintes fois figurer au titre de postes de frontière dans les traités conclus par les souverains des nations diverses qui occupèrent successivement la Cilicie. Lorsque, en 1194, le prince d'Antioche se voit obligé d'abandonner définitivement au prince chrétien de Petite-Arménie la Cilicie que lui et ses prédécesseurs avaient disputée pendant cent ans aux Turcs, aux Byzantins et aux Arméniens, c'est à la Portelle, qu'il est obligé de fixer la frontière de sa principauté (5).

    L'étude de la position géographique de Servantikar (6), l'examen des textes historiques qui en font mention, nous montreront combien sa possession était précieuse aux maîtres de la Cilicie. Servantikar commande en réalité le plus septentrional de ces grands passages transversaux, qui franchissent les chaînes de montagnes bordant, du nord au sud de l'Asie antérieure, la Fosse Syrienne, cette grande dépression qui s'étend sur 900 kilomètres de Marash à la Mer Rouge. Ce passage traverse le Giaour Dagh au col de l'Arslan Boghaz (1.030 mètres) appelé encore le col de Bagtché (7). Par là on arrive dans la plaine d'el Amq, arrosée par le Qara Sou qui coule vers le Sud entre les chaînes parallèles de l'Amanus et du Kurd Dagh. La grande route venant d'Adana y conduit par ce col et bifurque au nord vers Marash, au sud vers Antioche, à l'est vers Aïntab. Le chemin de fer d'Adana à Alep emprunte la même voie.

    Servantikar est juché à 500 mètres sur un rocher au pied duquel passe un ruisseau, le Kalé Tchaï, affluent de l'Houmous Souyou, lequel va se jeter dans le Djeihan.
    Cette route venant d'Adana est gardée par plusieurs châteaux avant d'arriver à la hauteur de Servantikar. C'est d'abord, sur l'autre rive du Djeihan, le puissant château d'Iilan Kalé, le château des Serpents (8), encore fort bien conservé et muni d'une triple enceinte dont les murailles composant un décor fantastique semblent s'accrocher aux aspérités du rocher.
    Puis, plus à l'est, se trouve le château de Toprak Kalé. Cette forteresse, dressée sur un tumulus de 80 mètres de haut, est construite en matériaux de basalte. Elle est pourvue de deux enceintes, l'enceinte inférieure ayant 100 mètres de longueur sur 70 de largeur. Elle commande, au sud une gorge étroite qui mène vers Issus, et à l'est le chemin qui se dirige vers Servantikar. Du sommet du château de Toprak Kalé on a, vers le nord et l'ouest, une vue très étendue sur la plaine de Cilicie et le cours du Djeihan; on aperçoit le haut promontoire d'Anavarza et plus loin les rochers que couronne la citadelle de Sis qui fut la capitale des princes de Petite-Arménie. Plus à l'est, un peu après Osmaniyé, se trouvent le petit fort de Frenk Kalassé et le château de Tchardak kalé (9).
    Enfin, à une vingtaine de kilomètres au nord de Toprak Kalé et de Tchardak, se trouvent deux châteaux commandant la vallée du haut Djeihan : c'est Hémétié Kalé et Boudroum Kalé. Ce dernier, juché sur un étroit piton, a une silhouette analogue à celle si étrange de la chapelle Saint-Michel d'Aiguilhe au Puy, plantée au sommet d'un mince dykc de basalte.
    Ces châteaux, en arrière de Servantikar, défendaient l'accès de la plaine de Cilicie et ses principales villes à l'ouest du Djeihan, Mamistra, Adana. Anavarza, Sis. La ligne montagneuse qu'il fallait franchir pour passer de Cilicie en Syrie se trouve à une quinzaine de kilomètres à l'est de Servantikar.

    A la vérité, il n'y a pas qu'un seul col qui traverse le Giaour Dagh. Le P. Philippe, qui parcourut cette région en 1898, en comptait cinq et il semble que Servantikar se trouvait en un point de jonction qui pouvait surveiller ces divers chemins. De ceux-ci, le col de l'Arslan Boghaz ou de Bagtché est le plus au nord.
    Le deuxième chemin retrouvé par le P. Philippe est situé à la hauteur de Hassan Beyli, et gardé à son extrémité par le fort de Karafenk Kalassé. Après Karafenk, on franchit la passe en un point élevé, à 1.250 mètres. Depuis le P. Philippe, une route moderne a été construite sur la trace de cet ancien chemin.
    On note un peu plus au sud le passage du Meydan. Celui-ci, bien meilleur, paraît être le plus direct pour qui vient de Servantikar; il descend vers Islahiyé, l'ancienne Nicopolis. Le P. Philippe a reconnu à l'entrée du col les restes d'un petit fort.
    Un quatrième chemin suivait la ligne Osmaniyé, Yarpouz, Islahiyé. Avant Islahiyé la passe était commandée par le château d'Edilli Kalassé. Enfin le dernier passage, le plus au sud, est celui qui va d'Erzin à Islahiyé en passant au pied du mont Doumanleu. Le P. Philippe formulait l'hypothèse que Darius et ses Perses fuyant devant Alexandre avaient dû prendre, en venant de la plaine d'Issus, le chemin le plus court, c'est-à-dire celui-ci, plutôt que de remonter à près de vingt kilomètres plus au nord jusqu'au col de l'Arslan Boghaz.

    Aboulféda parle du château de Servantikar dans sa Géographie (10) : « Sirfandakar est une forte citadelle située dans une vallée sur un rocher. Plusieurs de ses côtés sont dépourvus de murs, fortifiés qu'ils sont naturellement par des rochers. Cette citadelle est près du Djaïhan sur la rive méridionale ; elle commande la route du défilé de Marri... Le défilé de Marri se trouve à l'est de Sirfandakar, à moins d'une marche. Dans tout l'espace compris entre le défilé et Sirfandakar, il croît des pins incomparables pour la taille et pour la grosseur... »
    Il sera question plus loin d'une bataille livrée dans ces parages par les Egyptiens aux Arméniens, en 1266 ; les historiens arméniens l'appellent la bataille de Mari.
    Et l'on n'a pas remarqué jusqu'à présent, croyons-nous, que ce même nom de Mari ou encore Merry que Rey et le P. Philippe malgré leurs enquêtes n'ont pas retrouvé dans la toponymie actuelle, figure dans Guillaume de Tyr (11) qui en fait la frontière du comté d'Edesse lorsqu'il énumère les quatre États constituant la grande colonie franque d'Orient : « ... quartus erat comitatus Edessanus, qui ab ea sylva quae dicitur Marrim, in Orientem ultra Euphraten protendebatur. »
    Son traducteur écrit : « ... La quarte baronnie étoit le contenez de Roches (Rohez-Édesse) qui commençoit d'une forest que l'on apele Marri.. »
    Jacques de Vitry (12) reprend la même énumération et commence par le comté d'Edesse : « Primus est Edessanus comitatus, in regione Medorum, a silva quadam quae dicitur Marith habens initium ; protenditur autem trans fluvium Euphraten versus partes orientales... »
    Guillaume de Tyr parle une seconde fois de la forêt de Marris quand il raconte en des termes émouvants l'émigration, vers la principauté d'Antioche, de la population franque du comté d'Édesse en 1150, sous la protection du roi de Jérusalem Baudoin III : « In sequentibus diebus, populo sine molestia per sylvam quae dicitur Marris, et usque ad loca nostra ditioni subdita traducto, dominus rex in Antiochiam se recepiti (13). »
    Cette forêt de Marrim, Marris, Marith est évidemment la forêt de pins de Marri dont parle Aboulféda, située entre Servantikar et les cols du Giaour Dagh menant de Cilicie en Syrie.

    Il nous reste à aborder les détails historiques que nous avons pu recueillir sur Servantikar.
    Il apparaît dans l'Histoire des Croisades dès le début; Raymond de Saint-Gilles, ayant pris en 1101 le commandement d'une grande armée de Croisés venus surtout de Lombardie, fut vaincu au début d'août par le sultan seldjoukide de Qonia, Qilij Arslan, non loin du littoral de la Mer Noire au sud de Sinope (14). Les Turcs firent des Croisés un effroyable massacre. Le comte de Toulouse put, cependant, s'échapper et gagna presque seul Constantinople.
    Quelques mois plus tard il arrivait à Antioche où Tancrède, qui assurait alors la régence de la Principauté, le fit prisonnier. D'après Mathieu d'Édesse (15), il l'aurait enfermé quelque temps à Sarouanti qui paraît correspondre à Servantikar.

    On voit dans le courant du XIIe siècle les princes chrétiens d'Arménie conquérir en Cilicie des positions stratégiques qui vont leur permettre d'étendre leur pouvoir sur le pays, d'abord au détriment des Turcs, puis aux dépens des Byzantins. Ce sont de fidèles alliés des Francs et les unions entre familles princières latines et arméniennes sont fréquentes ; mais, à mesure que leur puissance s'affermit, les princes de la dynastie de Roupen manifestent une politique plus audacieuse et s'affranchissent de toute espèce de vassalité vis-à-vis des princes d'Antioche, qui considéraient la Cilicie comme une province de leur état. Des rivalités éclatent entre Francs et Arméniens.
    Le prince Léon Ier devenu chef de la famille Roupénienne en 1129, n'hésite pas à combattre les Byzantins et vers 1132 leur enlève trois cités importantes de Cilicie : Tarse, Adana, Mamistra. Puis, en 1135, il occupe le château de Servantikar et ceci le brouille avec les Francs (16), car ce château relevait du Comté Franc de Marash. L'année suivante (1136) la guerre éclate. Baudoin de Mares (Marash) et de Kaisun est soutenu par le prince d'Antioche, Raymond de Poitiers et par Foulque, roi de Jérusalem. D'autre part, Léon est appuyé par un prince franc, Jocelin II, comte d'Édesse, qui est son neveu. Après avoir vaincu Baudoin de Mares, le prince arménien est fait prisonnier par Raymond de Poitiers qui ne lui rend la liberté que deux mois plus tard, grâce à l'intervention de Jocelin. Le prince d'Antioche exige la reddition de Servantikar en se faisant donner, en outre, une rançon de 60.000 tahégans ainsi que les villes d'Adana et de Mamistra.

    Un demi-siècle plus tard, Servantikar était de nouveau aux mains des Arméniens, puisqu'en 1185 Roupen III, prince d'Arménie, est fait prisonnier par traîtrise par Bohémond III d'Antioche et, pour recouvrer la liberté, il cède à Bohémond les châteaux de Servantikar, de Thil et de Djéguer (17).

    Léon II, dit le Magnifique, prince d'Arménie, voit dans la première année de son règne (1187), son domaine envahi par des maraudeurs turcomans ; il les attaque, tue leur chef Roustem, poursuit et massacre les fuyards jusqu'à Servantikar (18). Ce prince, ayant par une sage politique affirmé sa puissance, parvient, comme on l'a vu plus haut, à se libérer (1194) de la suzeraineté du prince d'Antioche, puis à faire de sa principauté de Cilicie un royaume: il reçoit la couronne de roi de Petite-Arménie le 6 Janvier 1198 (19), et à cette occasion la liste des seigneurs, qui assistaient au couronnement, fut dressée ; elle nous a été conservée. Parmi ces seigneurs figure Sempad, seigneur de Servantikar (20).

    Au mois d'août 1266, le sultan d'Egypte, Beibars, s'inquiétant de l'alliance conclue par Héthoum Ier roi de Petite-Arménie avec les Mongols, chargea l'émir de Hama, Malik el Mansour, d'envahir la Cilicie. Les troupes arméniennes allèrent garder les passages donnant accès à la Cilicie. L'armée musulmane se porta au nord de l'Amanus et vint camper à Nicopolis qu'on a identifiée avec Islahiyé. La troupe arménienne se trouvait près de là (sans doute entre Islahiyé et Servantikar) et surveillait le défilé de Marris. Mais les musulmans trompèrent sa surveillance et, évitant les passages naturels, franchirent les crêtes. Les deux armées s'affrontèrent près de Servantikar et les Arméniens furent écrasés. Les deux fils d'Héthoum combattirent courageusement; l'aîné, Léon, fut fait prisonnier, le cadet Thoros fut tué et plusieurs nobles arméniens succombèrent à ses côtés (21).
    Cette bataille que certains chroniqueurs appellent la bataille de Mari fut un terrible désastre pour les Arméniens. Sis, la capitale des rois de Petite-Arménie fut prise et toute la région fut dévastée.

    Trois ans plus tard, en 1269, un tremblement de terre détruisit le château de Servantikar : « il se fendit de haut en bas et se renversa enterrant sous ses ruines presque tous ses habitants (22). »

    En 1271, Constantin, seigneur de Servantikar, fils du baron Djof ré (Geoffroy) et frère du baron Sempad signait une charte confirmant un accord avec les Chevaliers Teutoniques qui avaient des possessions dans le voisinage et avaient établi tout près de Servantikar, à la « Tour noire », un péage qu'ils percevaient sur ceux qui suivaient la route à proximité du château (23). Ce poste de douane avait été naturellement placé sur un étroit passage où le contrôle des voyageurs était facile et cette charte nous montre à nouveau que Servantikar constituait un fort d'arrêt et se trouvait en un lieu dont géographiquement le choix s'imposait comme poste de frontière.

    En mars 1276, le connétable Sempad, qui fut au XIIIe siècle le principal historien de la Petite-Arménie, combattit les Égyptiens près du défilé de Servantikar ; il les battit, les poursuivit jusqu'aux, environs de Marash et trouva une mort glorieuse dans cette poursuite (24).

    En 1298, le sultan d'Egypte envoie ses troupes envahir la Cilicie et les divise en deux corps, l'un qui passe par la Portelle et l'autre par le défilé de Marris.
    Les deux corps se réunirent au bord du Djeihan. Lors de cette campagne ils s'emparèrent de Servantikar (25).

    C'est vers 1337 que les Arméniens perdirent définitivement Servantikar. Les Égyptiens ayant envahi la Cilicie et l'ayant ravagée pendant plusieurs mois, le roi Léon V demanda la paix. Il fut obligé pour l'obtenir de céder aux Musulmans toute la contrée à l'est du fleuve Djeihan avec quatorze châteaux dont Servantikar.

    Voilà tout ce que nous savons sur ce château arménien qui fut à plusieurs reprises en la possession des princes d'Antioche et qui gardait la frontière orientale de leur territoire.
    Sources : Le château de Servantikar en Cilicie. Le défilé de Marris et la frontière du comté d'Edesse. Extrait de la revue Syria, 1937, fascicule 4. Librairie Orientaliste Paul Geuthner 12 rue Vavin (VI) - 1937

    Notes : Servantikar

    1. Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France, année 1897, page 276-277 (carte). Après avoir publié cette note, Rey poursuivit son enquête sur Servantikar avec le concours d'un religieux, le P. Philippe, qui résidait dans la région, à la Trappe de Chekhlé. Celui-ci fit, en 1898, plusieurs reconnaissances dans l'Amanus pour E.-G. Rey. Plus tard, Rey sans en avoir tiré parti, semble-t-il, donna les lettres du P. Philippe à l'érudit Camille Favre qui, à son instigation, avait fait un voyage en Cilicie, en 1871, et qui continuait à étudier cette contrée. La famille de Camille Favre a bien voulu me remettre les documents réunis par Je P. Philippe. Je lui en exprime ma très vive gratitude.
    2. Notamment Quinte-Curce, III, 8 : « Darius, ad eum locum quern Amanicas Pylas vocant, pervenit. »
    3. René Dussaud, Topographie historique de la Syrie antique et médiévale, page 446. — Recueil des Historiens des Croisades, Documents Arméniens tome I, introduction pages XXVI-XXVII. — Les chroniqueurs et les géographes anciens varient dans la dénomination des Pylae dont il vient d'être question.
    4. En 1069, les Turcs, faisant une offensive contre l'empereur byzantin Romain Diogène, ravagent la Cilicie malgré le duc d'Antioche Khatchatour qui essaye de leur couper la retraite. Il est noté qu'ils opèrent leur retraite vers Alep en passant par la montagne de Servantikar. — Voyez Ehnst Honigmann, Die Ostygrenze des byzantinischen Reiches, von 863 bis 1071, tome III de A. A. Vasiuev, Byzance et les Arabes, Bruxelles, 1935 (Corpus Bruxellense Historiae Byzantinae, 3), page 121, et note 2.
    5. Guillaume de Tyr, XXVI, 26 ; Historiens Occidentaux des Croisades tome II, page 215. Voyez H. Grousset, Histoire des Croisades (1936), tome III, page 132.
    6. Ou Sarfandakar. Ce château figure sur la carte au 200.000e de l'Etat-major ottoman, sous le nom de Savouran Kala. On trouve encore Savranly ou Savrandy Kalé.
    7. J. Garstang, The land of the Hittite, page 14.
    8. Sur la légende qui se rattache à ce nom voyez le P. Alishan, Sissouan ou l'Annéno-Cilicie. Venise, 1899.
    9. Orthographe préférable à Tchordaa Kalé qui figure sur certaines cartes. Tchardak désigne un tréteau de planches couvert de feuillages que les Arméniens dressent devant leurs maisons et où ils couchent pendant la belle saison. Par extension on appelle Tchardak un sommet de montagne en forme de plateau.
    10. Edition Guyard (1883), tome II, deuxième parte, page 34.
    11. Guillaume de Tyr, L. XVI, c. 29; Historiens Occidentaux des Croisades, tome I, 2e partie, page 755.
    12. Historia Iherosol., Livre I., édition Bongars, Gesta Dei..., page 1067.
    13. Guillaume de Tyr, L. XVII, Historiens Occidentaux des Croisades, tome I, 2e partie, page 789.
    14. Voyez René Grousset, Histoire des Croisades, tome I (1934), page 326-328.
    15. Historiens Occidentaux des Croisades, Documents arméniens, tome I, page 57.
    16. Sempad, Chronique du royaume de la Petite-Arménie. Recueil des Historiens des Croisades, Documents arméniens, tome I, page 616. Voyez Rohricht, Gesch., des Konigreichs Jérusalem, page 209 ; E.-G. Rey, Revue de l'Orient latin, tome IV, page 359.
    17. René Grousset, Histoire, des Croisades, tome II, pages 52-53.
    18. Sempad, Documents arméniens, tome I, page 628, chronique rimée de Vahram, Documents arméniens, tome I, pages 509-310. Voyez le P. Alishan, Sissouan, page 238. Djeguer est peut-être Payass, aujourd'hui à la frontière de la Turquie et des États sous mandat français.
    19. Sempad, Documents arméniens tome I, page 629. - Voyez le P. Alishan, page 238.
    20. Documents arméniens, tome I. Introduction par Dulaurier, plan LXV.
    21. Documents arméniens, tome I, page 636. Des seigneurs de Servantikar appartenaient à la grande famille des Héthoumiens, seigneurs de Lampron qui, en 1226, remplacèrent la dynastie des Roupéniens sur le trône de Petite-Arménie. Voir un essai de généalogie des seigneurs de Servantikar dans le P. Alishan, Sissouan, pages 238-239 et mieux dans Documents arméniens, tome II, page 839, note d. Grégoire Aboulfaradj, Chronicon syriacum, édition Bruns et Kirsch, 1789, page 569.
    22. Grégoire Aboulfaradj, Chronicon syriacum, page 572. - Voyez Alishan, page 239.
    23. Voyez traduction de cette charte arménienne, dans Alishan, page 239 ; et Documents arméniens, tome II, page 840.
    24. Documents arméniens, tome I, page 530, n° 1, pages 607-608. — Alishan, page 75.
    25. Autobiographie d'Aboulféda, Histiens orientaux des Croisades, tome I, page 169. — Gestes des Chyprois, Documents arméniens tome II, page 839 (à la date de 1299) : « Et en cest meismes an vos diray que le royaume d'Ermenie estoit en trop mal estat; ... y avoient pris les Sarazins aucuns chastiaus, c'est à saver la Roche Guillerme et un chastiau qui a nom Calat el Rom et Salvendagar... »

    Sources : Le château de Servantikar en Cilicie. Le défilé de Marris et la frontière du comté d'Edesse. Extrait de la revue Syria, 1937, fascicule 4. Librairie Orientaliste Paul Geuthner 12 rue Vavin (VI) - 1937

    Intervention de Henri de Champagne dans la question d'Antioche. Son arbitrage entre Bohémond III et les Arméniens

    Comme à tous les jours d'épreuve aussi les Francs d'Antioche se tournèrent vers la royauté hiérosolymitaine. Le patriarche Aymeri, le prince régent Raymond et son frère cadet Bohémond IV, pour lors, comme on l'a vu, comte de Tripoli, s'adressèrent à Henri de Champagne, à Saint-Jean-d'Acre. Et comme ses prédécesseurs, les Baudouin et les Foulque, Henri répondit aussitôt à leur appel. Il se rendit d'abord par mer à Tripoli (l'enclave ayyubide de Beyrouth coupant les communications par la corniche libanaise), y prit avec lui le jeune comte Bohémond IV et, accompagné de ce dernier, accourut à Antioche (2).

    Henri de Champagne ne se contenta pas de venir à Antioche pour délibérer de la situation avec le patriarche, les barons et la commune. Comprenant qu'une guerre franco-arménienne ne ferait le jeu que des Musulmans, il entreprit de ramener les Arméniens par la persuasion. Il s'invita chez Léon II, entra en Cilicie et vint lui rendre visite à Sis, dans sa capitale. Son autorité en imposa au prince arménien. Non seulement celui-ci le reçut avec honneur, mais il consentit à un accommodement. Bohémond III fut relâché moyennant renonciation au territoire contesté, depuis Gaston (Baghras) et la Portelle jusqu'à Lajazzo (3).

    Pour achever le rapprochement franco-arménien, Bohémond III maria son fils aîné Raymond à Alice, nièce de Léon II et fille du précédent prince arménien Roupen III (1195) (4).

    Cette union, ménagée par Henri de Champagne, permit de régler la question de préséance entre le prince d'Antioche et le prince (bientôt roi) arménien. Bohémond III, qui jusque-là prétendait à l'hommage des Arméniens, accepta de reconnaître la primauté — Ernoul dit la suzeraineté — de Léon (1). En revanche, comme ce dernier n'avait pas d'enfant mâle, on put espérer que le fils à naître de Raymond et d'Alice hériterait non seulement de la principauté d'Antioche, mais aussi de la principauté arménienne de Cilicie. Les chroniqueurs latins, désireux de masquer le succès de prestige remporté par le prince arménien, veulent que Léon II ait ensuite demandé à Henri de Champagne de le couronner roi; en réalité Léon ne reçut la couronne royale que le 6 janvier 1198, des mains de l'archevêque de Mayence Conrad de Wittelsbach qui vint le sacrer dans la cathédrale de Tarse, au nom de l'empereur romain germanique Henri VI (2). Mais si la subordination juridique de la principauté d'Antioche à l'État arménien de Cilicie, conséquence du « déjeuner » de Baghras, n'eut pas comme contrepartie une subordination analogue de l'État arménien au royaume franc d'Acre, il n'en est pas moins vrai que Léon II reconnaissait sans difficulté l'ascendant moral de la cour d'Acre.

    En somme Henri de Champagne avait, au prix d'une simple concession protocolaire, réussi à empêcher l'arménisation d'Antioche et maintenu le caractère franc de la grande cité du nord. Huit ans après Hattin, l'héritier des rois de Jérusalem pouvait de nouveau se rendre d'Acre à Antioche et même en Cilicie comme arbitre et pacificateur des petites cours chrétiennes. Rien ne montre mieux la restauration du prestige franc en Syrie.

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    1. E.-G. Rey, Histoires des princes d'Antioche, Revue de l'Orient Latin, 1896, pages 384-385.
    2. Eracles, tome I, pages 209 et 214.
    3. Eracles, tome II, pages 210-211 et 215. Les Annales de Jérusalem (page 434) et les Chiprois (chapitre 52) placent la délivrance de Bohémond III en 1195.
    4. Annales de Terre Sainte, Archives de l'Orient latin, tome II, chapitre II, page 434; Du Cange, éditions Rey, Familles d'outremer, pages 120 et 156; Ernoul, page 321; Sempad, Chronique de Petite Arménie, page 631-632.

    Sources : René Grousset, Histoire des Croisades tome I, pages 132, 133

    Désastre de la croisade lombarde. Les responsabilités.

    On atteignit ainsi la région de Qasiamuni. Là le plus élémentaire bon sens commandait de se rabattre sur les villes byzantines de la côte, Amastris ou Sinope. Il semble au contraire que l'armée, s'obstinant dans un plan absurde, ait franchi le Qizil Irmâq pour aller attaquer chez eux les Danichmendies. Mais la seule menace de l'invasion avait réalisé autour de ceux-ci la coalition des puissances turques, jusque-là si divisées. L'émir danichmendie Malik Ghazi Gumushtekin voyait accourir à son aide le sultan Saljûqide de Qonia, Qilij Aslan, et le malik Saljûqide d'Alep, Ridwan. Au moment, semble-t-il, où les Croisés venaient de franchir la frontière qui séparait le sultanat Saljûqide de l'émirat danichmendie entre Paphlagonie et Pont, tandis qu'ils s'avançaient en direction d'Amasia, sans doute à hauteur de Merzifun, le connétable allemand Conrad se laissa attirer dans une embuscade et perdit 700 hommes. Plus loin vers l'est (entre Amasia et Siwas ? ou simplement, comme il est beaucoup plus vraisemblable, entre Merzifun et Amasia), Malik Ghazi Gumushtekin et ses alliés livrèrent la bataille décisive. Les Croisés, qui s'y préparaient, avaient, semble-t-il, pris des dispositions de combat solides, mais les archers montés de l'armée turque, pratiquant leur tactique de harcèlement habituelle, les démoralisèrent sans permettre le corps à corps qui eût donné la victoire aux armures les plus puissantes. Bientôt les Lombards — les mauvais génies de toute cette croisade — prirent la fuite, leur chef, Albert de Blandrate, en tête. En vain Conrad et ses Allemands, Etienne de Bourgogne, Etienne de Blois (lequel racheta hautement ses fautes d'Antioche) et leurs Français, Raymond et ses Provençaux continuèrent-ils la résistance. Les Byzantins et Turcoples placés sous les ordres de Raymond l'abandonnèrent à leur tour. Raymond, laissé en l'air, n'eut que le temps de se réfugier sur une hauteur voisine, tandis que les comtes de Bourgogne et de Blois devaient battre en retraite sur leur camp ; encore le comte de Blois et Conrad eurent-ils la vaillance d'aller dégager Raymond cerné sur son rocher. Mais les Croisés avaient fait d'énormes pertes. Dès la tombée de la nuit, le comte de Toulouse, à qui le coeur manqua, s'enfuit vers la mer Noire avec ses Provençaux et ses Byzantins. Il atteignit à franc étrier la petite place byzantine de Pauraké ou Bafra près de l'embouchure du Qizil Irmaq, à l'est de Sinope, où il s'embarqua pour Constantinople.

    Quand la fuite de Raymond fut connue, ce fut la panique. En pleine nuit les autres barons prirent la fuite à leur tour en direction de la côte. La plupart réussirent en effet à atteindre le port byzantin de Sinope. Mais ils abandonnaient aux mains des Turcs leur camp, l'armée, les non-combattants, les femmes... Dès l'aube les Turcs se précipitèrent sur cet énorme butin. Albert d'Aix fait un tableau saisissant du sort des malheureuses chrétiennes livrées aux bandes turcomanes ou envoyées au fond de quelque harem. Puis les Turcs se lancèrent à la chasse des fugitifs. Ce fut une immense rafle, accompagnée de massacre. Albert d'Aix évalue à 160.000 le nombre des Croisés qui périrent ainsi dans les solitudes du Pont. Il est vrai que Guillaume de Tyr ne compte que 50.000 morts. Ibn al-Athir écrit que 3.000 hommes seulement purent s'échapper.

    Les survivants se regroupèrent à l'abri de la forteresse byzantine de Sinope. De là, en suivant la côte, qui appartenait également aux Byzantins, ils regagnèrent lentement Constantinople (fin août-fin septembre 1101). Remarquons, puisque Albert d'Aix en convient lui-même, que, sans la protection des garnisons byzantines du littoral, les débris de la Croisade eussent été achevés par les Turcs. Il faut ajouter que lorsque Raymond et ses compagnons — Etienne de Bourgogne, Etienne de Blois, le connétable Conrad — arrivèrent à Constantinople, l'empereur Alexis ne put dissimuler à son allié son mécontentement pour sa fuite la nuit de la bataille, fuite qui avait déterminé la débâcle du reste de l'armée.

    La mauvaise humeur du basileus devant la fuite du Toulousain prouve mieux que tout document que la cour impériale n'était pour rien dans la débâcle de la Croisade anatolienne. Cette débâcle doit être imputée uniquement à la plèbe lombarde qui avait d'abord exigé la folle expédition contre les Danichmendies et qui, au moment de la bataille, avait deux fois lâché pied. Démagogie de croisade qui à chaque fois entraînera l'Orient latin aux abîmes. Quant à Raymond de Saint-Gilles, après avoir presque jusqu'à la fin fait bravement son devoir de général, il avait, après la défaite finale, perdu la tête, et sa fuite nocturne sur Bafra avait gravement atteint son prestige aux yeux des Francs comme aux yeux du basileus. En somme il revenait de la Croisade d'Anatolie moralement fort diminué. Après cet échec, il y aura quelque chose de changé en lui. Ce ne sera plus le prince inquiet, superbe et quelque peu outrecuidant que nous avons connu. Ce candidat universel, à qui la délégation impériale que lui avait accordée Alexis Comnène semblait promettre une sorte de mandat sur la Syrie entière, se contentera bientôt d'un simple comté au Liban.

    Mais avant d'en arriver à cette dernière phase, plus modeste mais aussi plus réaliste de la vie du comte de Toulouse, il convient d'en finir avec les événements que nous venons de résumer, en montrant les conséquences, pour la Syrie franque, de la victoire turque d'Anatolie.

    La première de ces conséquences fut d'effacer les bénéfices moraux de la victoire franque de Dorylée, de transformer les vaincus de 1097 en des « Ghazi » à nouveau conscients de leur force militaire et de rendre ainsi impossible le libre passage de nouvelles croisades même par l'itinéraire classique de 1097, via Eski-shéhir, Aqshéhir, Qoniya. Ces conséquences graves du désastre d'Anatolie apparurent dès que d'autres barons croisés, le comte de Nevers, le duc d'Aquitaine, le duc de Bavière, se présentèrent pour la traversée de la péninsule.

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    Sources : René Grousset, Histoire des Croisades tome I, pages 326, 327, 328, 329

    Querelle des frontières franco-ciliciennes. Brouille et réconciliation de Raymond de Poitiers et du prince arménien Léon Ier (1136).

    On se rappelle que la famille arménienne des Roupéniens, établie dans le massif de Kozan, en plein Anti-Taurus, avait commencé, à la faveur des Croisades, à enlever tant aux Byzantins qu'aux Turcs le nord-est de la Cilicie. Vers 1080 le fondateur de la maison roupénienne, Roupen Ier, s'était installé dans les districts de Partzerpert, Tzakhoud et Gobidar, dans la région du Ghédin Béli, entre l'Ala-dagh et le Kozan, c'est-à-dire dans le bassin supérieur, du Seihûn (Sarus), à l'ouest de Sis. Son fils Constantin Ier (1092-1100) avait enlevé aux Byzantins l'importante forteresse de Vahka (Fikhé) sur le Goek-su ou Seihûn supérieur, où il installa sa résidence (1). Il avait profité de la Croisade pour s'allier aux Francs, alliance cimentée par le mariage de sa fille avec Jocelin Ier de Courtenay, sire de Turbessel, puis comte d'Édesse, comme précédemment, semble-t-il, par le mariage de sa nièce Arda (fille de son frère Thoros) avec Baudouin Ier, comte d'Édesse, puis roi de Jérusalem. Le fils et successeur de Constantin, Thoros Ier (1100-1129), enleva aux Byzantins la région des hauts affluents orientaux du Jihûn, avec Sis et Anazarbe (2). Léon (Livon) Ier, frère de Thoros, et qui lui succéda (1129-1137; mort en 1139), enleva de même aux Byzantins vers 1132 Mamistra (ou Mississa, ou Mopsueste, l'actuel Missis), Adana et Tarse, c'est-à-dire la plaine cilicienne du bas Jihûn, du bas Seihûn et du Tarsûstshai (3).

    En 1133 la principauté arménienne des Roupéniens englobait donc toute la Cilicie orientale, des approches de Mersina aux approches de Mar'ash, ville qui appartenait à un seigneur franc, vassal du comté d'Édesse, mais au sud de laquelle, sur la rive méridionale de l'Aq-su, Léon Ier occupa la forteresse de Sarvantikar (1135).

    Malheureusement l'occupation de Sarvantikar brouilla Léon Ier avec les Francs d'Antioche. Raymond de Poitiers, devenu, sur ces entrefaites, prince d'Antioche (1136), inaugura donc son gouvernement par une guerre avec les Arméniens, guerre au cours de laquelle, nous dit le connétable Sempad, il pouvait compter sur l'appui du roi de Jérusalem Foulque. Naturellement le comte franc de Mar'ash et de Kaisûn, Baudouin (« Baudouin de Mares »), se trouvait au premier rang des adversaires de Léon, la possession de Sarvantikar étant précisément revendiquée par le comté de Mar'ash. Mais le comte d'Édesse, Jocelin II, se déclara au contraire pour Léon qui se trouvait, comme on l'a vu, son oncle. Léon défit complètement Baudouin de Mar'ash (4). Mais peu après il fut fait prisonnier par Raymond de Poitiers. D'après Tchamitchian, Baudouin avait attiré le prince arménien dans un guet-apens, sous prétexte de le réconcilier avec Raymond de Poitiers, et s'était saisi de lui par trahison (5). Le prince d'Antioche garda Léon prisonnier dans une forteresse.

    Cette lutte entre Francs et Arméniens ne profita qu'aux Turcs. Tandis que l'Arménie cilicienne était privée de son chef captif des Francs et que ceux-ci étaient absorbés par la conquête des châteaux-frontières, l'émir danichmendie de Cappadoce, Muhammed II ibn Ghazi, envahit les possessions des deux adversaires. A l'époque des vendanges de 1136, il se jeta sur le comté de Mar'ash, pillant les récoltes, saccageant les bourgs, brûlant les habitations et les couvents, et vint bloquer Kaisûn, la seconde place du comté. La population de Kaisûn, prise de panique, avait déjà abandonné le mur extérieur, quand elle fut ramenée au devoir par les chevaliers et le clergé (1). Le Danichmendie leva alors le siège et se contenta d'aller brûler près de là le couvent de Garmir Vank' (le couvent-rouge) qui avait, servi de résidence au patriarcat arménien. Nous savons par le connétable Sempad que les Turcs profitèrent aussi de la captivité de Léon Ier pour ravager la principauté arménienne de Cilicie où ils enlevèrent un grand nombre de chrétiens. Le Danichmendie ne rentra en Cappadoce qu'à la nouvelle que l'empereur byzantin Jean Comnène s'avançait en Asie Mineure. Raymond de Poitiers, après avoir gardé deux mois captif Léon Ier, finit par le relâcher moyennant la cession non seulement de la forteresse de Sarvantikar, mais encore des villes de Mamistra et d'Adana (2). Léon, à peine délivré, reconquit d'ailleurs Adana et Mamistra (3). Mais l'apparition d'un danger commun rapprocha les deux adversaires. L'empereur Jean Comnène s'était mis en marche dans l'intention d'enlever la Cilicie aux Arméniens et Antioche aux Francs. L'intervention du comte d'Edesse, Jocelin II, amena entre Léon Ier et Raymond de Poitiers la réconciliation nécessaire. Les deux ennemis de la veille se hâtèrent de conclure une alliance pour se défendre contre le péril byzantin (1137) (4). On a vu que la consécration de cette entente politique devait être la présence du katholikos arménien Grégoire III Bahlavouni au synode latin de Jérusalem de Pâques 1140.

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    1. Sempad, Documents arméniens, tome I, page 610.
    2. Chronique rimée de Felite Arménie, Documents arméniens, tome I, page 499.
    3. Sempad. Histoire Arménie, I, page 615. Chalandon a établi que Léon Ier enleva ces trois villes non aux Francs d'Antioche qui ne les avaient possédées que temporairement, mais aux Byzantins qui, entre 1104 et 1108, les avaient reprises à Tancrède. Les titres de Guy le Chevreuil donné comme seigneur de Mamistra pour les années suivantes et de Raoul de Domfront, archevêque de Mainistra avant de devenir patriarche d'Antioche, sont vraisemblablement des titres conservés après perte de la ville. Cf. Chalandon, Les Comnènes, tome I, page 235; II, pages 108-109.
    4. Sempad, Chronique du royaume de Petite Arménie, Documents arméniens, tome I, p. 616.
    5. Documents arméniens, tome I, p. 152. TCHAMITCHIAN, III, p. 50-51. Cf. GRÉGOIRE LE PRÊTRE, Documents arméniens, tome I, p. 152, note de DELAURIER : « Raymond, n'osant attaquer Léon à force ouverte, s'entendit avec Baudouin de Mar'ash qui invita Léon à venir avec lui faire une visite à Raymond. Le prince d'Antioche profita de l'occasion pour se saisir du chef arménien et le renferma dans une forteresse. »
    6. MATHIEU D'ÉDESSE, Documents arméniens, tome I, p. 149; SEMPAD, p. 616.
    7. SEMPAD, p. 616.
    8. TCHAHITCHIAN, cité par CHALANDON, II, 110, et par DULAURIER, Documents arméniens, tome I, 152.
    9. Documents arméniens, tome I, p. 152.

    Sources : René Grousset, Histoire des Croisades tome II, pages 51, 52, 63

     

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