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Première Croisade par Foulcher de Chartres

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    Années 1103, premier siège de Saint-Jean d'Acre

    Au printemps de l'année 1103, après que nous eûmes célébré, comme de coutume, à Jérusalem la sainte Pâques, le roi attaqua la ville d'Accon ou Saint-Jean d'Acre (1), et en forma le siège avec sa petite armée. Mais il ne put s'emparer, ni par force, ni par ruse, de cette place que protégeaient une bonne muraille et de forts boulevards extérieurs, et où d'ailleurs les Sarrasins se défendirent avec la plus remarquable valeur. Après donc avoir dévasté toutes les récoltes, les vignes et les jardins des habitants, le roi revint à Joppé ou Jaffa.

    Alors se répandit la nouvelle, tant souhaitée de tous, que Bohémond était enfin, grâces à la faveur du ciel, délivré de sa captivité chez les Turcs.
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    Ce prince fit en effet connaître au roi par un message comment il avait brisé ses fers moyennant rançon.
    Antioche reçut avec des transports de joie ce guerrier, qui d'abord l'avait gouvernée le premier, et continua dans la suite d'y commander et de l'illustrer, outre cette ville, Bohémond posséda encore celle de Laodicée que Tancrède avait prise de vive force et enlevé aux gens de l'empereur de Constantinople. En échange de cette place, Bohémond donna une portion convenable de ses propres terres à Tancrède, qui en fut satisfait, et dont il se concilia d'ailleurs l'amitié.
    Le roi Baudouin cependant faisait comme de coutume la guerre aux Sarrasins ; un jour qu'il était tombé à l'improviste sur quelques-uns d'entre eux, se regardait déjà comme certain de leur mort et s'en réjouissait dans son âme, un Ethiopien, qui s'était caché derrière une roche, et embusqué ainsi adroitement dans l'intention de le tuer, le frappa d'un trait fortement lancé ; le coup atteignit le roi par derrière, dans un endroit voisin du cœur, et fit une plaie si profonde que ce prince fut blessé presque mortellement.
    Toutefois, comme il mit par la suite tous ses soins à se bien guérir, il revint entièrement à la santé après qu'on eut pratiqué l'incision de sa blessure, qui le faisait beaucoup souffrir.

    Année 1104, nouvelle marche sur Saint-Jean d'Acre

    L'année 1104 depuis l'Incarnation de Nôtre-Seigneur, après que l'hiver fut passé, et que nous eûmes, au moment où fleurissait le printemps, célébré les solennités de Pâques dans Jérusalem Porte Saint-Etienne, le roi réunit ses troupes, marcha sur Accon ou Saint-Jean d'Acre (4) et en fit le siège.
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    Les Génois, avec une flotte de soixante-dix navires à éperons, se rendirent également devant cette place. Pendant vingt jours on assaillit et l'on battit avec les machines la ville cernée de toutes parts ; alors les Sarrasins, frappés de terreur, la rendirent bon gré mal gré au roi.
    Elle nous était d'autant plus nécessaire qu'elle a un port tellement commode qu'il peut recevoir et mettre en toute sûreté, dans l'intérieur même de ses murs, un grand nombre de vaisseaux.
    Déjà le soleil s'était levé neuf fois dans le signe des gémeaux, quand fut prise la ville d'Accon ou Saint-Jean d'Acre, autrement appelée Ptolémaïs. C'était dans l'année mil cent quatrième.

    Cette cité d'Accon ou Saint-Jean d'Acre n'est pas celle que quelques gens prennent pour Accaron : celle-ci est une ville des Philistins, et celle-là connue sous le nom de Ptolémaïs.

    Lorsqu'on se fut emparé de cette place, on y massacra grand nombre de Sarrasins, et on permit a quelques-uns de vivre.
    Quand ensuite l'été fut passé, Bohémond, contraint par une dure nécessité, passa dans la Pouilles avec un petit nombre de vaisseaux, commit la ville d'Antioche aux soins de Tancrède, et emmena Daimbert, qui avait été patriarche de Jérusalem. Bohémond, homme prudent et d'une merveilleuse sagacité, faisait ce voyage pour recruter quelques troupes dans les contrées montagneuses de la Pouilles. Quant à Daimbert, son but était de porter au pape de Rome ses plaintes de l'injure que lui avait faite le roi Baudouin Ie. Il partit donc, obtint ce qu'il désirait, mais ne revint pas, parce qu'il mourut en chemin.

    Le 28 février 1105, mort de Raymond de Saint-Gille

    L'année 1105, et le vingt-huitième jour de février, Raimond, comte et vieux chevalier, mourut dans son château de Tripoli Saint-Gilles bâti en face de la ville de Tripoli, et eut pour successeur son neveu, Guillaume Jourdain.
    Vers ce temps, la méchanceté si ordinaire aux Turcs et aux Sarrasins ne les abandonna point : en effet, le roi d'Alep, nommé Rodoan, rassembla de tous les pays qui l'avoisinaient une armée considérable, et, tel qu'un taureau, dressa ses cornes aiguës pour combattre Tancrède, qui alors gouvernait Antioche ; mais celui-ci, enfonçant l'ancre de son espoir dans le Seigneur et non dans des troupes nombreuses, rangea les siens en bon ordre, et, monté sur son coursier, marcha sans délai contre les ennemis.

    Pourquoi m'arrêterais-je à de plus longs détails ?

    Tancrède fondit sur eux avec une admirable audace, et eux, Dieu aidant, tournèrent le dos, prirent la fuite, et furent vivement poursuivis.
    Quiconque d'entre eux ne put fuir n'évita point la mort. Le nombre de leurs tués ne fut pas considérable ; mais Tancrède s'empara de plusieurs de leurs chevaux et de l'étendard de leur roi fugitif : c'est ainsi que ce taureau mutilé s'en alla les cornes brisées ; et les vainqueurs louèrent le Seigneur, qui avait si bien secouru les siens.
    Nous ne dirons que ce peu de mots des gens d'Antioche ; maintenant parlons de ceux de Jérusalem.

    Année aout 1105, les Mamelouks du Caire marchent sur Ascalon

    Nous avons, en effet, a raconter comment, cette même année, le roi de Babylone ou du Le Caire (2) rassembla une grande armée, et l'envoya, sous la conduite du général de la milice, à Ascalon (3) pour combattre la foi chrétienne, formant le projet et se flattant de nous exterminer de la Terre-Sainte jusqu'au dernier.
    On lui avait rapporté que nous étions réduits à un très-petit nombre, et ne recevions plus, comme de coutume des recrues de pèlerins. A Ascalon se réunirent donc des cavaliers Arabes, des fantassins éthiopiens et environ mille Turcs de Damas, excellents archers.
    Quand le roi Baudouin en fut instruit, il appela tous les siens à Joppé Jaffa, et s'y prépara à soutenir cette guerre. Comme la nécessite l'exigeait, on ne laissa dans nos villes aucun homme en état de porter les armes ; tous partirent pour cette guerre, à l'exception des sentinelles indispensables à la garde des murailles pendant la nuit.
    Une vive frayeur s'empara de nous alors ; nous tremblions, en effet, ou que les Infidèles ne surprissent quelqu'une de nos cités ainsi dénuées de toute garnison, ou qu'ils ne vinssent à bout d'accabler enfin notre roi et sa petite troupe.
    On était dans le mois d'août. Les deux partis usèrent d'abord de ruse en différant de combattre ; et des deux côtés on resta, nous sans marcher contre eux, et eux sans nous attaquer. A la fin cependant, et, je crois, au terme fixé par la Providence, la gent impie des Païens quittant Ascalon, s'approcha de la contrée que nous occupions.
    Aussitôt que le roi l'apprend, il sort de Joppé, et, monté sur son coursier, s'avance jusqu'à la ville de Ramla. Comme il ne pouvait qu'être fort utile que les nôtres s'unissent au Seigneur de toute les manières possibles, et plaçassent en lui seul leur ferme espérance, Baudouin, inspiré par Dieu même, envoie d'abord, en toute diligence, un messager recommander au patriarche, au clergé, ainsi qu'au peuple, d'implorer avec ferveur la miséricorde du Tout-Puissant, afin qu'il daigne, du haut des cieux prêter son appui à ses Chrétiens, placés dans une si difficile position. Ce messager, quelque prière qu'on lui fasse, ne veut accepter aucune récompense, dans la crainte d'être surpris et tué en route par les ennemis, mieux inspiré, il préfère s'en remettre au Seigneur du soin de lui payer le prix de sa fatigue, et, commandant son âme et son corps a Dieu, il monte à cheval et se rend en toute hâte à Jérusalem. A peine est-il entré dans la Cité sainte, qu'il fait connaître sa mission, et ce que requiert l'état actuel des choses : aussitôt qu'il a expliqué sa demande, le patriarche commande que l'on sonne la plus grosse cloche, et que tout le peuple se rassemble devant lui.

    ô mes frères, dit-il ensuite, vous mes amis et les serviteurs de Dieu. Cette guerre qu'on vous disait devoir éclater bientôt, va avoir lieu ; ce messager vient de nous l'annoncer, et, sans aucun doute, elle est près de fondre sur nous. Sans le secours de Dieu, nous serions certes hors d'état de résister en aucune manière à la foule d'ennemis qui nous menacent, implorez, donc tous la clémence du Seigneur, afin que, dans le combat qui s'apprête, il daigne se montrer favorable et miséricordieux envers notre roi Baudouin et tous les siens. Notre prince n'a pas voulu donner aujourd'hui le combat, ainsi qu'il nous le fait savoir par ce messager, pour le livrer avec plus de sécurité demain dimanche, jour où le Christ est ressuscité d'entre les morts : il a attendu que les aumônes et les prières lui eussent assuré l'appui du Seigneur, en qui seul il se confie.
    Ainsi donc, conformément aux paroles de l'apôtre, veillez toute cette nuit, demeurez fermes dans la foi, et faites avec amour tout ce que vous faites.
    Demain allez nu-pieds aux lieux saints, affligez-vous, humiliez-vous, adressez au Seigneur votre Dieu d'ardentes, supplications, afin qu'il nous délivre des mains de ses ennemis; pour moi, je vous quitterai pour aller à cette bataille qui va se donner; et si parmi vous il en reste encore quoiqu'un qui veuille prendre les armes, qu'il vienne avec moi, car les hommes manquent à notre roi.
    Que dirai-je de plus ?
    Tous ceux qui le peuvent montent a cheval ; ils sont au nombre de cent cinquante, tant, cavaliers qu'hommes de pied ; a la nuit tombante ils se mettent en route, marchent rapidement, et arrivent au petit jour à la ville de Ramla.
    Quant à ceux qui sont restés dans Jérusalem, ils se livrent avec ferveur à la prière, à l'aumône et aux larmes; jusqu'à l'heure de midi, ils ne cessent de visiter les églises ; ils, chantent en pleurant, ils pleurent en chantant; tout cela, ils le font, processionnellement.
    Moi-même j'étais avec eux et nu-pieds. Les hommes les plus Agés s'abstiennent ce jour-là de toute nourriture jusqu'à la neuvième heure; les enfants mêmes sont privés de sucrer le sein de leurs mères jusque ce que le tourment de la faim leur arrache des larmes, d'abondantes aumônes se distribuent aussi aux indigents Ces œuvres sont en effet celles qui apaisent le Seigneur, l'excitent à nous sauver, et le forcent à ne point laisser en arrière sa bénédiction, et à la tourner sur nous.

    Lors donc que le patriarche fut arrivé, comme on la dit plus haut, à Ramla, et que l'aurore eut commencé à chasser les brillantes étoiles, tous les nôtres se réjouirent de la venue de leurs compagnons ; tous, pleins d'un pieux zèle, courent aux prêtres pour confesser leurs fautes ; tous se précipitent également aux pieds du patriarche, tous veulent entendre de sa bouche quelques paroles, et recevoir de sa main l'absolution de leurs péchés. Tout cela fait, le patriarche revêt ses habits pontificaux, et prend dans ses mains la croix du Sauveur, qu'on portait d'ordinaire dans de telles occasions.
    Une fois que les diverses troupes de chevaliers et de gens de pied sont rangées convenablement, on marche à l'ennemi. Nos chevaliers étaient, dit-on, au nombre de cinq cents, sans compter les gens qui, quoiqu'à cheval, ne jouissaient point du titre de chevaliers ; quant à nos gens de pied, on ne croyait pas qu'ils excédassent deux mille.
    L'armée ennemie comptait quinze mille hommes, tant cavaliers que gens de pied, qui, cette même nuit, avaient campé à quatre milles tout au plus de la cité de Ramla. Dès que les Sarrasins voient le roi se porter contre eux avec les siens, aussitôt, et suivant leur coutume, ils se préparent à combattre.
    Ce pendant leurs méchants projets sont alors un peu déjoués par notre marche, ils avaient résolu, en effet, d'envoyer une portion de leurs troupes, mais la plus petite, devant Ramla, afin de tromper quelque temps notre armée, et de diriger en même temps tout le reste, formant le corps le plus considérable, sur Joppé, pour l'attaquer et s'en emparer sans que nous pussions en avoir le moindre soupçon.
    Mais aussitôt qu'ils s'aperçoivent que le roi vient à eux et que leurs desseins sont confondus, ils se réunissent en une seule masse. Sans plus tarder, les combattants se précipitent les uns sur les autres, alors les boucliers résonnent, et le fer aiguisé fait retentir l'air de ses coups.
    Au moment où, des deux côtes, on s'élance pour en venir aux mains, tous les nôtres, ainsi qu'ils en ont reçu l'ordre, poussent contre les Païens ce cri terrible, le Christ vit, le Christ règne, le Christ seul commande.
    Quant à eux, nous entourant de toutes parts, ils se flattent d'enfoncer nos rangs et d'y jeter un désordre complet.
    Déjà, en effet, les Turcs tournant par derrière nos derniers escadrons, font pleuvoir sur eux une grêle de flèches; puis, cessant de se servir de leurs arcs, ils tirent leurs glaives du fourreau, et en frappent les nôtres de plus près. A cette vue, le roi, entraîné par son audace, arrache sa bannière blanche des mains d'un de ses chevaliers, et suivi seulement de quelques-uns des siens, court en toute hâte en cet endroit porter secours à ceux des nôtres qui sont si cruellement accablés.
    Bientôt, avec l'aide du Seigneur, il disperse les Turcs par la vigueur de son attaque, en tue un grand nombre, et retourne aux lieux où combat la foule la plus nombreuse des Sarrasins et des Ethiopiens.
    Je ne m'étendrai pas davantage au surplus sur les efforts des deux partis, et les coups qu'ils se portent ; je veux resserrer mon récit dans les bornes les plus étroites.

    Le Dieu tout-puissant, qui jamais n'oublie ses serviteurs, ne voulut pas que ces Infidèles détruisissent les Chrétiens, qui, par amour pour lui et pour accroître la gloire de son nom, étaient venus des contrées les plus éloignées visiter Jérusalem.
    Les Infidèles, prirent donc subitement la fuite, et ne s'arrêtèrent qu'à Ascalon.
    ô si on eût pu se saisir de Gemelmuch, le chef de leur armée, que d'argent il eût payé pour sa rançon au roi Baudouin !
    Mais au moins Gemelmuch, émir d'Ascalon, homme renommé par ses richesses et sa prudence, n'évita point le trépas; et sa mort fut une désolation pour tous les Païens.
    On, prit vivant un autre émir, autrefois émir d'Accon ou Saint-Jean d'Acre, et le roi exigea, pour son rachat vingt mille pièces de monnaie, outre ses chevaux et tout le reste de son bagage.
    Quant aux Ethiopiens, ils ne purent fuir, et furent tous massacrés dans les champs. Il périt, dit-on quatre mille hommes, tant cavaliers que gens de pied, du côté de l'ennemi, et soixante seulement du nôtre.
    Les tentes des mécréants demeurèrent en notre possession, et ils perdirent en outre grand nombre de bêtes de somme, de chameaux et de dromadaires.
    Alors nous louâmes et glorifiâmes tous le Seigneur, qui seul avait fait notre force et anéanti nos ennemis.
    ô admirable profondeur des jugements de Dieu !
    Voilà que ces Infidèles disaient : Allons, exterminons les Chrétiens, et mettons-nous en possession du sanctuaire de Dieu, comme de notre héritage.
    Il n'en est pas ainsi, impies, il n'en est pas ainsi ; Dieu vous a rendus comme une roue qui tourne sans cesse, et comme la paille emportée par le vent dans sa colère il vous a troublé l'esprit. Ils avaient juré par leur loi de ne fuir jamais devant les Francs, et cependant ils ne trouvèrent de salut que dans la fuite.

    Le roi retourna joyeux à Joppé, et y distribua suivant les règles de l'équité, à ses chevaliers et à ses hommes de pied, le butin fait dans le combat.
    Devant cette ville était encore en mer une flotte des Sarrasins, qui attendaient là depuis quelque temps, pour s'assurer quand et comment ils pourraient détruire complètement, tant par mer que par terre, et nous et les villes maritimes dont nous étions maîtres. Mais aussitôt que le roi eut fait jeter par ses matelots dans un de leurs navires la tête de l'émir Gemelmuch, qu'on avait coupée dans la bataille, saisis de trouble et de frayeur a cette vue, les Païens n'osèrent demeurer plus longtemps où ils étaient ; une fois certains de la honteuse défaite des leurs, ils profitèrent d'un léger vent du midi, et se retirèrent dans les ports de Tyr et de Sidon.

    Lorsque ensuite cette même flotte retourna à Babylone, grâce au Seigneur, l'esprit des tempêtes, travaillant pour nous, la dispersa par un horrible naufrage, et la jeta sur les côtes que nous occupions; vingt-cinq vaisseaux remplis de Sarrasins tombèrent en notre pouvoir, et le reste forçant de voiles ne s'échappa qu'à grand-peine. C'est ainsi que le Seigneur nous secourut avec bonté dans nos tribulations, et nous manifesta sa toute-puissance.
    Je veux, maintenant faire connaître avec précision au lecteur le jour de cette mémorable bataille.
    Le soleil se levait pour la dixième fois dans le signe de la vierge, la lune dans son plein avait sa face entière tournée vers la terre ; le calendrier marquait le sixième jour avant les calendes de septembre, quand le Tout-Puissant accorda aux Francs de jouir du triomphe.
    Alors fuirent tous ensemble les Arabes, les Turcs, les Ethiopiens ; les uns gagnèrent les montagnes, et les autres restèrent morts sur le champ de bataille.
    Dans la crainte que, par la négligence ou l'impéritie des hommes en état d'écrire, gens d'ailleurs fort rares peut-être, et tout entiers aux embarras de leurs propres affaires, tous ces faits ne fussent point écrits et tombassent en oubli, moi Foulcher, quoique d'une science grossière et d'une faible capacité, j'ai cru devoir courir le risque d'être taxé de témérité, plutôt que de ne pas publier ces œuvres merveilleuses du Seigneur ; j'ai donc recueilli tout ce que j'ai vu de mes propres yeux, ou appris en questionnant avec soin des narrateurs véridiques, puis, afin que toutes ces choses ne fussent sensibles aux yeux et saisissables d'un coup d'œil uniquement pour moi seul, je les ai, dans les sentiments d'une pieuse affection, réunies en un ouvrage vrai, quoique d'un style peu correct, et transmises à ceux qui viendront après moi.
    Je prie donc le lecteur d'user d'indulgence et de charité pour mon ignorance, qu'il rectifie ça et là, s'il le veut, le style de cet écrit qu'aucun orateur n'a corrigé ; mais que, dans le dessein de donner plus de pompe et de beauté à l'arrangement des parties de cette histoire, il n'aille pas en changer la marche, de peur d'altérer par quelque erreur la vérité des faits.
    Après les événements que j'ai racontés plus haut et sur la fin de l'année, tous ceux d'entre nous qui étaient alors à Jérusalem sentirent, la veille de la naissance du Sauveur, un violent tremblement de terre, qui leur causa une vive frayeur.
    Sources : Textes de Foulcher de Chartres - Collection des mémoires relatifs à l'Histoire de France ; Editions J-L. J.Brière, Librairies : Paris 1825

    La Comète



    Notes

    1 - Ptolémaïs ou Accon, pour l'antiquité.
    Accon ou Acco pour les historiens latins.
    Saint Jean d'Acre, pour les croisés et les Francs.
    Acca, Arabo-Palestinien.
    Cette ville porte un double nom, et s'appelait Ptolémaïs ou Accon, parce qu'elle fut, dit-on, fondée par deux frère, l'un appelé Ptolémée et l'autre Accon, qui lui imposèrent chacun son nom.
    Sources : Collection des Mémoires de France Relatif à L'Histoire de France - M. Guizot - Paris 1825.
    2 - Babylone, c'est pour les auteurs latins des Croisades, Le Caire. Le passage que nous allons transcrire n'a pas été copié par l'évéque d'Acre. A un mille de la nouvelle Babylone et dans le désert dît Gérard sont deux montagnes formées de grandes pierres de marbres carrées et placées avec un art admirable. Ces deux montagnes également carrées sont de même hauteur et de même largeur et éloignées l'une de l'autre de la portée du trait leur lawgeur respective est de la portée d'un trait lancé d'une main très vigoureuse et leur élévation est de deux portées de trait. Ce passage où l'auteur désigne les pyramides est d'autant plus remarquable qu'aucun de nos vieux chroniqueurs qui avaient suivi les croisés en Orient ne parle de ces monuments de l'antique Egypte.
    A un tiers de mille de la nouvelle Babylone poursuit Gérard est la ville qu'on nomme maintenant le Caire c'est une résidence royale et le séjour des princes et des mameloucks elle est près du Nil ses édifices sont admirables et somptueux elle est défendue par des murailles et entourée de très beaux vergers les Sarrasins les juifs et les chrétiens l'habitent ensemble et chacun y suit sa religion. On trouve dans le Caire plusieurs églises chrétiennes. A un mille de cette ville est le jardin du Baume Jacques de Vitry a encore copié ici l'ambassadeur allemand. Les Sarrasins croient qu'ils ont dans leur pays le paradis qui les attend après cette vie. Ils disent qu'il ya dans ce lieu de délices quatre fleuves le premier roule des flots de vin le second de lait le troisième de miel et le quatrième d'eau. Selon eux on cueille dans ce séjour toutes sortes de fruits on y mange et on y boit tout ce qu'on veut chacun aura tous les jours une vierge nouvelle pour ses plaisirs quand un sarrasin est tué par un chrétien dans un combat il a dans le paradis tous les jours dix vierges à sa disposition. Lorsque je leur de mandais ce que devenaient les femmes qui existent au jourd'hui et d'où venaient les vierges qui devaient servir chaque jour aux plaisirs des Sarrasins ils étaient embarrassés pour me répondre Gérard en quittant Babylone prit la route du désert pendant vingt jours il ne rencontra aucune terre cultivée, et, il arriva à Damas.
    Le médecin arabe Abd Allatif visita les pyramides à peu près vers la même époque il pourrait être curieux de comparer la description de ce anciens tombeaux qu'a laissée l'auteur musulman avec le récit de l'ambassadeur Gérard M Sylvestre de Sacy a donné une traduction du voyage d'Abd Allatif en Egypte.
    Sources : Bibliothèque des croisades Par Joseph Fr Michaud, Joseph Toussaint Reinaud
    3 - Ascalon, Port de l'ancienne Palestine méridionale, sur la route d'égypte, Ascalon était l'ancienne cité royale des Philistins. La situation stratégique de la forteresse d'Ascalon détermina l'acharnement que mirent à l'occuper les croisés et les égyptiens. Les Francs ne purent s'en emparer qu'en 1153 et Saladin la leur reprit, après un siège très dur, dès 1187. Elle fut rendue aux Francs en 1240 par le sultan d'égypte, désireux d'acquérir l'alliance du royaume latin contre Damas. Les égyptiens prirent définitivement la ville en 1247.La bataille dite d'Ascalon eut lieu entre les remparts et la mer le 12 août 1099, moins d'un mois après la prise de Jérusalem par les croisés. Les Francs, commandés par Godefroi de Bouillon, Raymond de Saint-Gilles, Trancrède, Robert de Normandie et Robert de Flandre, surprirent les égyptiens par la rapidité de leur attaque. La victoire d'Ascalon fut particulièrement importante parce qu'elle libéra la Terre sainte, encore inorganisée, de la menace d'une reconquête imminente par les égyptiens. Mais les discordes entre les barons francs empêchèrent une exploitation de la victoire qui eût été, cependant, facile.(...)
    Sources : Encyclopédie Universalis.
    4 - Saint-Jean-d'Acre: la capitale maritime du royaume des croisés
    La ville de Saint-Jean-d'Acre (Akko) est perchée sur un promontoire, à l'extrémité nord de la baie de Haïfa. La première ville fut fondée au cours de l'âge du bronze à Tel Akko (en arabe Tel el-Fukhar - le tertre des tessons de poteries), situé juste à l'est de l'actuelle ville. Akko est mentionnée dans les anciennes sources écrites comme une ville importante de la côte nord du Pays d'Israël. L'abondance des découvertes, notamment les vestiges de fortifications mis à jour à Tel Akko, témoignent de l'occupation prolongée et ininterrompue du site à l'époque biblique.
    L'ancien site d'Akko, Acco, Akka ou Acca, c'est Ptolémaïs, une nouvelle ville entourée de murailles, fut construite sur le site de l'actuelle Saint-Jean-d'Acre.
    Les Romains améliorèrent et élargirent le port naturel de la partie sud de la ville, et construisirent une digue qui en fit l'un des principaux ports du littoral oriental de la Méditerranée
    L'importance de Saint-Jean-d'Acre - une ville fortifiée bien protégée dotée d'un port en eau profonde - se reflète dans son histoire fertile en événements durant la domination des croisés en Terre sainte.
    Relief en pierre représentant l'emblème royal des croisés, découvert à Sait-Jean d'Acre
    Les croisés, qui fondèrent le royaume latin de Jérusalem en 1099, ne parvinrent pas, dans un premier temps, à venir à bout des fortifications de Saint-Jean-d'Acre. Le 26 mai 1104, après plusieurs mois d'un siège difficile, et grâce à l'aide de la flotte génoise, la ville se rendit et fut remise au roi Baudouin Ier. Conscients de l'importance de la ville et de son port pour la sécurité de leur royaume, les croisés entreprirent immédiatement de construire un système perfectionné de fortifications constitué par des murailles et des tours d'un style entièrement inédit.
    Ces fortifications furent érigées le long de la mer, à l'ouest et au sud de la ville, alors qu'à l'est et au nord, un rempart (probablement une double muraille) flanqué d'un large et profond fossé séparait la ville de l'arrière-pays. Le port fut également reconstruit et, d'après des sources littéraires et des cartes, comportait une partie extérieure et une partie intérieure, cette dernière étant aujourd'hui envasée. Une nouvelle digue, protégée par une tour, fut dressée à son extrémité ; c'est ce qu'on appelle aujourd'hui la Tour des mouches.
    Les fortifications de Saint-Jean-d'Acre, dans lesquelles les croisés placèrent leur confiance, furent prises relativement aisément par les musulmans. Peu après leur victoire à la bataille des Cornes de Hattin, le 9 juillet 1187, la ville se rendit à Salah-al-Din (Saladin), et ses habitants chrétiens en furent chassés.
    Les croisés revinrent assiéger Saint-Jean-d'Acre en 1188, mais ne parvinrent pas à forcer les massives fortifications qu'ils avaient eux-mêmes érigées. Le 12 juillet 1191, les musulmans capitulèrent cependant devant le roi d'Angleterre, Richard Cœur de Lion, et le roi de France, Philippe-Auguste (les chefs de la troisième croisade). Au cours des cent années suivantes, les croisés administrèrent Saint-Jean-d'Acre. Jérusalem demeura (pour une brève période) sous domination musulmane, ce qui accrut considérablement l'importance de Saint-Jean-d'Acre devenue, durant le XIIIe siècle, la capitale politique et administrative du royaume latin. Bastion des croisés en Terre sainte, la puissante forteresse de Saint-Jean-d'Acre se trouvait en permanence sous la menace des musulmans. Son port assurait la liaison entre le royaume des croisés et l'Europe chrétienne ainsi que le transbordement vers l'Occident des marchandises de valeur en provenance de l'Orient.
    Le palais (castrum) des rois croisés, situé dans la partie nord de la ville, était entouré de puissantes fortifications. Des quartiers commerçants, désignés sous le nom de communes, furent créés à proximité du port par les villes maritimes italiennes de Venise, Pise et Gênes. Chaque quartier possédait une place de marché, avec ses entrepôts et ses échoppes, ainsi que des demeures pour les familles des marchands. En outre, les différents ordres militaires - les Hospitaliers, les Templiers, etc. - chargés de la défense du royaume latin, disposaient de centres d'hébergement. Dans toute la ville, nombre d'édifices publics comme des églises et des hospices, furent construits.
    Au début du XIIIe siècle, un nouveau quartier résidentiel, appelé Montmusard, fut créé au nord de la ville. Il était entouré de ses propres remparts (probablement aussi une double muraille). Au milieu du siècle, parrainée par Louis IX de France, Saint-Jean-d'Acre s'étendit et gagna en prospérité. Dotée d'une population d'environ 40 000 habitants, c'était la ville la plus importante du royaume des croisés.
    La dernière bataille que se livrèrent les croisés et les musulmans pour le contrôle de Saint-Jean-d'Acre commença en 1290. Après un long siège imposé par les Mamelouks sous la direction de al-Ashraf Khalil, une partie de la muraille nord céda ; la ville fut conquise le 18 mai 1291. Cette date marque la fin de la présence des croisés en Terre sainte.
    Les constructions de la période croisée, notamment les remparts de la ville, furent partiellement ou totalement ensevelies sous les édifices des XVIIIe et XIXe siècles, la cité faisant alors partie de l'empire ottoman.
    Vestiges de la période des croisés
    Céramiques des croisés retrouvées à Saint-Jean-d'Acre

    D'importants vestiges de la période des croisés furent découverts pour la première fois à Saint-Jean-d'Acre pendant les années 1950 et 1960, lorsque des ensembles de constructions, situés au-dessous du niveau du sol et presque intégralement conservés, furent en partie dégagés des débris. Au cours des années 1990, dans le cadre du plan d'urbanisme, des fouilles furent entreprises aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur des remparts de la Vieille Ville d'aujourd'hui, mettant à jour de fascinants vestiges de l'histoire médiévale de Saint-Jean-d'Acre, connus auparavant principalement par les récits des pèlerins.
    L'enceinte des Hospitaliers
    Les vestiges souterrains les plus importants de la Saint-Jean-d'Acre des croisés sont situés dans la partie nord de l'actuelle Vieille Ville. Il s'agit du quartier général de l'ordre des Hospitaliers (les chevaliers de Saint-Jean), un ensemble important d'une superficie d'environ 4 500 mètres carrés, comprenant de vastes salles et de nombreuses pièces s'ordonnant autour d'une vaste cour centrale à ciel ouvert. Les murs épais étaient construits en kurkar (grès local) soigneusement taillé et le complexe était protégé par des tours d'angle. Lorsque Ahmed al-Jazzar, le gouverneur ottoman de Saint-Jean-d'Acre, décida de bâtir une citadelle et un palais à cet endroit, il combla de terre l'édifice des Hospitaliers.
    Ces dernières années, la terre remplissant l'édifice des Hospitaliers sur une épaisseur de trois à quatre mètres a été déblayée, révélant la cour centrale, d'une superficie de 1 200 mètres carrés. Les murs de cette cour sont percés de larges ouvertures conduisant aux vastes salles et pièces qui l'entourent. Des voûtes de style gothique, jaillissant d'épais pilastres encastrés dans les murs, soutiennent l'étage supérieur. Sur le côté est de la cour, un escalier de 4,5 mètres de large, soutenu par des voûtes, donne accès au deuxième étage. Un important système d'évacuation entraînait les eaux de pluies tombées dans la cour jusqu'à l'égout principal. Dans l'angle sud-ouest de la cour, un puits en pierre assurait l'approvisionnement en eau des habitants.
    Au sud de la cour, se trouve une vaste salle appelée à tort de crypte de Saint-Jean. C'est une pièce rectangulaire, de style gothique, de 30 mètres sur 15, haute de 10 mètres, au plafond en voûte d'arête reposant sur trois piliers centraux de trois mètres de diamètre chacun. Les cheminées indiquent qu'elle servait de cuisine et de réfectoire. Aux deux angles de la salle, des fleurs de lys (l'emblème de la famille royale française) sont sculptées dans la pierre.
    Plus au sud, se dresse un ensemble de constructions connu sous le nom de al-Bosta. Il se compose d'une vaste pièce avec plusieurs piliers épais soutenant un plafond en ogive. Ce bâtiment souterrain correspond en fait à la crypte de Saint-Jean au-dessus de laquelle fut construite l'église, mise à jour partiellement ainsi que ses décorations durant les fouilles.
    Au nord de la cour centrale, s'alignent parallèlement plusieurs longues salles voûtées souterraines de dix mètres de plafond, appelées Salles des chevaliers. D'un côté, des portes ouvrent sur la cour ; de l'autre, des fenêtres et une porte donnent sur l'une des rues principales de la ville des croisés. C'était les quartiers d'habitation des membres de l'ordre des Hospitaliers.
    A l'est de la cour, la grande salle des colonnes s'étendant sur 45 mètres de long et 30 mètres de large et servant d'hôpital, a été mise à jour. Son plafond de 8 mètres de haut est soutenu par trois rangs de cinq piliers à section carrée. Au-dessus de cette salle, se dressaient probablement les quatre étages du palais des croisés figurant sur des dessins de l'époque.
    La plupart des bâtiments du côté ouest de la cour n'ont pas encore été mis à jour. On a retrouvé de nombreux chapiteaux décorés, caractéristiques du style architectural recherché de cette aile. Dans la partie nord, à chacun des deux étages, des toilettes comprenant 30 cabinets étaient reliées par un système de canalisations à l'égout principal de la ville.
    Un système d'égouts souterrain très élaboré a été retrouvé sous les bâtiments des Hospitaliers. D'un mètre de diamètre, et d'une hauteur de 1,8 mètre, il permettait d'évacuer, sur un parcours nord-sud, les eaux de pluies et les eaux usées jusqu'à l'égout municipal.
    Les rues
    Certaines rues de l'époque des croisés ont été partiellement mises à jour : dans le quartier génois, au centre de l'actuelle Vieille Ville de Saint-Jean-d'Acre, on a découvert un tronçon de 40 mètres de long d'une rue couverte, d'orientation est-ouest et de 5 mètres de large. Elle était bordée par des bâtiments dotés de cours ainsi que de pièces donnant sur la rue qui servaient de boutiques. Dans le quartier des templiers, situé dans la partie sud-ouest de la ville, une autre portion de la rue principale conduisant au port, a également été mise à jour. Une portion d'environ 200 mètres de cette rue bordée de plusieurs constructions des croisés ensevelies sous des édifices ottomans, a été exposée.
    Les remparts de la ville des croisés
    L'emplacement des remparts de la ville des croisés est bien connu grâce aux cartes de l'époque, fort détaillées, qui ont subsisté, mais on en a retrouvé bien peu de traces au cours des fouilles. Une partie des murailles est enfouie sous les fortifications ottomanes ; d'autres ont été endommagées lors de la construction des quartiers modernes.
    Près de l'angle nord-est des fortifications ottomanes, une portion du rempart des croisés, longue de 60 mètres, a été retrouvée ; construit en grès local, son épaisseur est de trois mètres.
    Non loin, vers l'est, l'angle d'une tour bâtie en grandes pierres de grès a été partiellement préservé jusqu'à une hauteur de six mètres. La façade de la tour donnait sur un profond fossé de 13 mètres de large, et était protégée de l'autre côté, par un mur en contrescarpe. Cette portion de murailles fait partie des fortifications extérieures du nord, construites au XIIIe siècle pour protéger le quartier de Montmusard, nouveau à l'époque. C'est probablement la tour vénitienne figurant sur les cartes de l'époque des croisés. Sur le littoral, à quelque 750 mètres au nord de la Vieille Ville, on trouve les vestiges des fondements d'une tour circulaire se prolongeant vers l'est par une muraille et recouverte aujourd'hui par la mer. Pour les chercheurs, il s'agit de la tour d'angle circulaire qui se dressait à l'extrémité ouest des remparts entourant le quartier de Montmusard.
    La reprise des fouilles à Saint-Jean-d'Acre a été menée par A. Druks, M. Avissar, E. Stern, M. Hartal et D. Syon pour le compte de la Direction des antiquités d'Israël. Les fouilles effectuées dans l'enceinte des Hospitaliers ont été dirigées par E. Stern, également pour le compte de la Direction des antiquités d'Israël.

    Sources : Textes de Foulcher de Chartres - Collection des mémoires relatifs à l'Histoire de France ; Editions J-L. J.Brière, Librairies : Paris 1825

    La Comète

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